Cynique à dire, mais Rich Peverley, des Stars de Dallas, a sans doute fait son arrêt cardiaque au bon endroit lundi soir: derrière le banc d'une équipe de la LNH.

«S'il avait été seul à la maison ou à un endroit qui ne dispose pas de défibrillateur cardiaque, je ne crois pas qu'il aurait pu s'en tirer», lance Serge Doucet, cardiologue à l'Institut de cardiologie de Montréal.

«Heureusement, tous les amphithéâtres de la LNH sont munis d'un défibrillateur, et il y a toujours des médecins sur place», ajoute-t-il.

L'attaquant Patrice Bergeron, des Bruins de Boston, un ancien coéquipier et ami de Peverley, a eu la même réaction.

«Dieu merci, il y a des médecins proche du banc des joueurs. C'est rassurant», a-t-il confié après l'exercice du matin de son équipe mardi, à la veille de l'affrontement avec le Canadien au Centre Bell.

Ça n'a pas nécessairement toujours été le cas dans la KHL et plusieurs ligues en Europe, puisque trois hockeyeurs professionnels, Sergei Zholtok, Alexei Cherepanov et Stéphane Morin, n'ont pas eu autant de chance que Peverley, tandis que l'ancien défenseur des Red Wings de Detroit, Jiri Fischer, s'en est tiré lui aussi en novembre 2005 après s'être affaissé au banc des Wings, au Joe Louis Arena.

L'événement a créé une onde de choc dans le monde du hockey, lundi soir, et les réactions sont évidemment vives depuis.

«J'étais à la soirée en hommage à Larry Pleau (en marge de la réunion des directeurs généraux de la LNH en Floride) quand la nouvelle a commencé à circuler, et c'était le branle-bas de combat dans la salle», racontait mardi soir Stéphane Quintal, qui oeuvre au sein du service pour la sécurité des joueurs de la Ligue nationale.

«C'était assez chaotique. Tout le monde cherchait à en savoir davantage, le directeur général des Stars, Jim Nill, multipliait les appels, de même que Gary Bettman et Bill Daly, qui ont quitté la salle en plein discours. C'était vraiment irréel.»

Quintal a lui-même été victime de problèmes cardiaques par le passé. Il avait manqué plusieurs matchs du Canadien, en novembre 2005, pour régler des problèmes d'arythmie.

«Ça m'a beaucoup touché et ça m'a attristé, même si nos cas sont différents puisque mes problèmes d'arythmie ne peuvent entraîner la mort.»

Les problèmes cardiaques congénitaux de Peverley, 31 ans, étaient connus. Il avait raté le camp d'entraînement des Stars pour subir une intervention chirurgicale afin de régler ses problèmes de battements irréguliers du coeur.

«Habituellement, une tachycardie comme la sienne peut entraîner chez les jeunes une baisse de pression et une perte de conscience, mais pas un arrêt cardiaque complet, mentionne le cardiologue Serge Doucet. Il a été chanceux. Généralement, il faut procéder à un massage cardiaque entre quatre et six minutes après l'accident, mais il faut éventuellement aussi le choc électrique pour repartir le coeur. Le fait d'être un athlète de haut niveau peut lui avoir nui comme l'avoir aidé. Une grande forme physique peut permettre à un athlète de supporter un rythme cardiaque très élevé, mais pratiquer un sport de haut niveau entraîne une décharge énergique et un stress qui favorisent l'arythmie.»

Serge Doucet estime que Peverley pourrait reprendre sa carrière, s'il n'y a pas de complications.

«Il n'est pas rare qu'il faille répéter une telle intervention chirurgicale pour réparer tous les circuits anormaux qui mènent au coeur, mais il n'a pas fait d'infarctus.»

Alerte rouge

L'accident cardiaque subi lundi par Peverley a donné des sueurs froides à tous ceux qui ont été témoins de la scène.

Quand il s'est affaissé, les joueurs des Stars ont tapé du bâton contre la bande pour prévenir les arbitres. Quand ils ont constaté que le match se poursuivait, ils ont bondi sur la patinoire pour forcer les officiels à interrompre la partie.

«C'était l'alerte rouge, a raconté l'entraîneur-chef Lindy Ruff aux journalistes mardi. On se foutait du match, on voulait trouver des médecins rapidement. Ils ont bien fait d'arrêter le match. Les joueurs n'avaient plus envie de continuer, et moi non plus.»

Les joueurs des Bruins de Boston n'avaient pas trop le coeur à la fête lundi soir à Montréal. Ils étaient tous ensemble au restaurant quand la nouvelle du malaise cardiaque de leur ancien coéquipier et ami Rich Peverley leur a été communiquée par l'entremise de Twitter.

Peverley a joué quatre ans pour Boston et gagné la Coupe Stanley avec les Bruins, avant d'être échangé l'été dernier aux Stars avec Tyler Seguin, en retour de Loui Eriksson et Reilly Smith.

«Nous avons d'abord su qu'il s'était effondré sur le banc des Stars de Dallas. Pendant un moment, nous ignorions son état, et tous les joueurs envoyaient des textos pour en savoir plus, a confié un Gregory Campbell encore très ébranlé mardi après-midi. Heureusement, nous avons appris rapidement qu'il était hors de danger.»

«J'ai joint Tyler Seguin après son match et il nous a tous rassurés, a dit Patrice Bergeron. Je lui ai envoyé un message, comme la plupart de mes coéquipiers, mais je ne veux pas de réponse de sa part, je tiens seulement à ce qu'il prenne du mieux.»

Il y a fort à parier que les Bruins joueront pour leur copain mercredi soir au Centre Bell...