«Un gardien répare bien des choses, il peut te mettre à lui seul du rouge à lèvres sur une organisation...»

Bob Hartley est le maître de l'allégorie sportive populaire.

Son ton, au bout du fil, trahit sa grande fébrilité.

L'entraîneur des Flames de Calgary espère avoir trouvé son sauveur. Il lui aura fallu un détour en Suisse pour dénicher celui qui pourrait éviter la catastrophe provoquée par la retraite de Miikka Kiprusoff.

Son nom: Reto Berra. Suisse, 26 ans, 6 pi 4 po et 196 lb.

À son premier départ dans la Ligue nationale de hockey, dimanche, Berra a réussi 42 arrêts et battu les puissants Blackhawks de Chicago, 3-2!

«Il y a longtemps que je crois en lui, il nous a volé tellement de matchs quand je coachais en Suisse, j'allais même le voir jouer à Zurich quand mon club était en congé!», lance Bob Hartley.

Ce gardien, inconnu en Amérique du Nord il y a quelques mois à peine, a été obtenu le printemps dernier par les Flames dans l'échange qui a envoyé le défenseur Jay Bouwmeester à St.Louis.

«Pendant les négociations avec les Blues, j'ai suggéré à Jay (Feaster, le DG des Flames) d'exiger Berra dans l'échange. Avec la présence de Halak, Elliott et Allen, je me disais qu'ils n'avaient probablement pas besoin d'un quatrième gardien. J'ai dit à Jay qu'il était dans mes coups de coeur pour le titre de MVP en Suisse cet hiver-là. En séries, son club perdait 3-0 et il a gagné les trois rencontres suivantes à lui seul!»

Pour Bouwmeester, les Flames ont obtenu un choix de première ronde (Émile Poirier), Mark Cundari, un joueur de Ligue américaine, et Berra.

Le plan initial allait permettre à Karri Ramo d'obtenir toutes les chances de se faire valoir comme gardien numéro un.

Ramo avait été obtenu du Canadien avec Mike Cammalleri contre Rene Bourque, un choix de deuxième ronde (Zachary Fucale) et Patrick Holland.

Le gardien finlandais avait une fiche de 2-3-1, une moyenne de 3,49 et un taux d'arrêts de ,888 lorsque Calgary a annoncé le rappel de Berra de la Ligue américaine, il y a cinq jours.

«On ne voulait pas lui imposer une surcharge de travail et on a choisi de lui permettre de s'acclimater au hockey nord-américain dans les mineures, explique Hartley. Mais je savais qu'il allait nous rejoindre tôt ou tard, car il a le talent pour devenir un très bon gardien dans la LNH.»

Les Flames, à qui plusieurs prédisaient la cave du classement, se retrouvent aujourd'hui avec une fiche de 6-6-2, à quatre points d'une place en séries.

Ils doivent aussi ce début de saison intéressant à une étonnante recrue de 19 ans, Sean Monahan, sixième choix au total en 2013, qui a 11 points, dont 7 buts, en 14 matchs.

«J'espère que tous les jeunes hockeyeurs québécois prendront des notes: Sean s'est présenté dans une forme physique exceptionnelle, dit Hartley. Et pas une forme physique de niveau junior, une forme physique de joueur de la LNH. Il a été dans notre top cinq dans la plupart des catégories à ce chapitre, d'ailleurs! Je n'avais jamais vu ça de la part d'un jeune de 18 ans au cours de ma carrière d'entraîneur. Un premier camp professionnel sert généralement d'investissement à long terme pour un jeune, et il repart souvent déçu, mais Sean nous a forcé la main et il n'a jamais ralenti le rythme.»

Le petit attaquant Jiri Hudler constitue l'autre grande surprise chez les Flames. Il a amassé 15 points en 14 matchs jusqu'ici et Hartley l'utilise presque 20 minutes par match. À l'époque où il jouait à Detroit, l'entraîneur Mike Babcock l'employait en moyenne 13 minutes en raison de ses carences en défense. Hudler a été obtenu sur le marché des joueurs autonomes en juillet 2012.

«C'est un autre qui s'est présenté dans une forme exceptionnelle, dit Hartley. Il a connu une saison plus difficile l'an dernier parce que son père est décédé pendant le camp d'entraînement, sans oublier la période d'adaptation avec nous, puisqu'il s'agissait de son premier changement d'équipe dans la LNH. Après 14 matchs, il constitue notre meilleur attaquant.»

Les Flames n'ont pas encore affronté leurs grands rivaux, les Oilers d'Edmonton, cette saison. On devine que lors de leur première rencontre, le 16 novembre, partisans et journalistes ne manqueront pas de rappeler aux Oilers qu'il n'est pas nécessaire de terminer dans la cave du classement pendant cinq ans pour reconstruire une équipe...