La lutte contre le dopage passera à la vitesse supérieure dans la Ligue nationale de hockey (LNH). Pour la première fois, le programme antidopage de la LNH s'attaquera aux hormones de croissance, fera davantage de contrôles inopinés et, surtout, allongera ses tentacules jusqu'aux séries éliminatoires et à la saison morte.

La nouvelle convention collective de la LNH n'est pas qu'une histoire de gros sous. Elle contient aussi des clauses sur la lutte contre dopage qui sont passées largement inaperçues. Selon un sommaire de la nouvelle convention - la LNH n'a pas encore rendu public le document complet -, les changements à la politique antidopage sont importants, même si les experts constatent qu'il reste beaucoup à faire.

«La LNH marche dans la bonne direction. Lentement, mais dans la bonne direction», a affirmé David Howman, directeur général de l'Agence mondiale antidopage, invité par La Presse à commenter la nouvelle convention collective. «Ils font davantage de progrès que bien d'autres sports dans le monde.»

Jusqu'à maintenant, les contrôles antidopage au hockey étaient menés exclusivement pendant la saison régulière. De une à trois fois par année, des inspecteurs se présentaient durant un entraînement et demandaient à tous les joueurs de l'équipe d'uriner dans un pot. «Ils sont venus durant mes trois saisons à Montréal et pareil avant, à Tampa Bay», se rappelle Mathieu Darche, ancien joueur du Canadien.

Mais joueurs et propriétaires se sont entendus pour étendre les contrôles. Désormais, ceux-ci auront lieu non seulement durant la saison régulière, mais aussi pendant les séries éliminatoires et la saison morte.

«Ce sont surtout les équipes qui ne voulaient pas en avoir pendant les séries. Elles disaient que ça allait déconcentrer les gars, explique Darche, qui a participé aux discussions sur le dopage à l'Association des joueurs. Mais cette fois-ci, tant les propriétaires que les joueurs étaient d'accord.»

Les contrôles durant l'été représentent peut-être la mesure la plus cruciale. La LNH imite le baseball, qui utilise les contrôles hors compétition depuis des années. «Si un gars triche, prend des stéroïdes, c'est l'été qu'il va le faire», croit Darche. Les experts s'entendent en effet pour dire que les athlètes utilisent surtout des stéroïdes hors compétition, pour augmenter leur masse musculaire en prévision du début de la campagne.

La nouvelle convention reste floue quant au cadre qui régira les contrôles hors compétition. Elle précise qu'un maximum de 60 joueurs feront l'objet d'un contôle durant l'été - un nombre relativement restreint. En guise de comparaison, 138 joueurs de baseball ont été soumis aux contrôles hors compétition lors de la saison 2010.

On ne sait pas non plus comment les inspecteurs pourront joindre les joueurs en plein été, aux quatre coins du monde - au Canada, en Suède, en Russie, etc. -, ni si les joueurs devront informer la Ligue de leurs déplacements. La nouvelle convention souligne seulement qu'un «protocole» sera mis sur pied et soumis à l'approbation des joueurs et de la Ligue.

Mais selon Mathieu Darche, les joueurs sont prêts à accueillir des inspecteurs en plein été. «Si t'as rien à cacher, le gars vient chez vous, tu fais ton pipi dans le pot, ça ne prend pas de temps», dit-il.

La dernière nouveauté touche les hormones de croissance, les amphétamines et les stimulants. À l'heure actuelle, ces substances ne sont pas testées dans la LNH. Elles représentent pourtant les plus susceptibles à être utilisées par des hockeyeurs délinquants. La Ligue envisage donc timidement de combler cette importante lacune. La nouvelle convention prévoit la mise sur pied d'un comité qui déterminera s'il faut ou non les contrôler.

Le test pour les hormones de croissance existe seulement depuis 2004 et nécessite la prise d'échantillons sanguins. Seuls des échantillons d'urine sont recueillis actuellement dans la LNH.

Le baseball majeur deviendra cette année le premier sport nord-américain d'importance à étendre les contrôles à cette substance. La NFL pourrait l'imiter dès l'année prochaine.

«La LNH semble être prête à regarder les hormones de croissance, se réjouit David Howman. On a des pourparlers avec la Ligue, parfois avec l'Association des joueurs, et nous allons continuer.»

Joueurs et propriétaires en accord

La LNH a longtemps été considérée comme la moins sévère en matière de dopage parmi les quatre grandes ligues nord-américaines. Les changements contenus dans la nouvelle convention - et surtout l'extension des contrôles aux séries éliminatoires et à la saison morte - lui permettront toutefois de se rapprocher à petits pas du baseball majeur (MLB), la ligue la plus agressive en matière de lutte contre le dopage.

«Ce que peuvent faire de mieux les ligues nord-américaines pour lutter contre le dopage, ce sont davantage de contrôles inopinés et hors compétition, explique le directeur de l'Agence mondiale antidopage. Parce que sinon, les joueurs savent quand les inspecteurs vont venir. Il s'agit donc d'un élément essentiel de tout programme.»

La question du dopage n'a pas été épineuse durant les négociations de la nouvelle convention, soutient Mathieu Darche. Tant joueurs que propriétaires étaient en faveur des nouvelles mesures, dit-il. «Les deux côtés étaient d'accord, lance le vétéran. Les gars n'en veulent pas, des stéroïdes, des choses comme ça, dans la Ligue. Tous les joueurs à qui je parle veulent des contrôles.»