Andrei Markov marchait la tête basse lorsqu'il a traversé la zone d'entrevues en direction du vestiaire du Vityaz de Chekov, son équipe d'adoption dans la KHL. Il a toutefois soulevé sa main gauche en passant à ma hauteur.

C'était bon signe.

«Markov se change et il sortira dans quelques minutes», nous a annoncé l'attaché de presse du Vityaz alors qu'Alexandre Pouliot-Roberge, qui me sert de guide et d'interprète, s'approchait pour réclamer une entrevue avec le défenseur du Canadien.

Le crâne fraîchement rasé encore ruisselant de sueur, Markov a vite tenu promesse. La poignée de main - tradition oblige - solide, le sourire sincère, Markov semblait même heureux de répondre aux questions après la victoire-surprise de son équipe - 3-2 en tirs de barrage - aux dépens du Barys d'Astana, un club qui lui est supérieur.

Lorsque je lui ai demandé de clarifier sa position quant à son retour avec le Canadien dans l'éventualité d'une reprise des activités dans la LNH, Markov ne m'a pas servi le «next question» qu'il affectionnait l'an dernier lorsque les questions qui lui étaient posées le chatouillaient.

«Je veux bien retourner à Montréal, mais il faudrait d'abord que le conflit se règle. Et pour le moment, le dossier ne semble pas progresser. Si la Ligue nous offre une solution juste, tout se réglera rapidement et je reviendrai avec plaisir», a plaidé Markov.

Comme plusieurs joueurs, le vétéran défenseur du Canadien refuse d'accepter que les contrats signés au cours des dernières années soient amputés.

«Je n'arrive pas à comprendre que les propriétaires prétendent aujourd'hui qu'ils ne peuvent plus payer des contrats qu'ils ont pourtant eux-mêmes accordés. Ça n'a simplement pas de bon sens. Ils n'avaient qu'à refuser de les signer», a indiqué Markov.

Menaces en l'air

Encore hier, les super-étoiles Alexander Ovechkin et Ilya Kovalchuk ont menacé de demeurer avec le Dynamo de Moscou et le SKA de Saint-Pétersbourg dans l'éventualité d'un règlement défavorable aux joueurs.

Si ces menaces, comme les autres du même genre entendues depuis le début du conflit, provoquent une onde de choc lorsqu'elles sont lancées, il n'y a que très peu de chance qu'elles soient mises à exécution.

Pourquoi?

Parce que la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF) interdit à tout joueur lié par un contrat valide à une ligue régie par la IIHF de le résilier pour en signer un nouveau avec une formation d'une autre ligue.

Appelez ça la clause Alexander Radulov.

«Le retour de Radulov dans la KHL alors qu'il était lié par contrat aux Predators de Nashville nous a placés dans l'embarras en 2008. Nous n'avions aucune règle sur laquelle nous appuyer pour prendre une décision dans ce dossier. Dès l'assemblée générale suivante, en 2009, à Berne, nous avons clarifié la situation en interdisant ce genre de transfert. À moins qu'il soit le résultat d'une entente entre les deux ligues», a confirmé Szymon Szemberg, directeur des communications de la IIHF que j'ai joint à Zurich hier.

Heureux de jouer

Mis à part les irritants reliés au conflit, Andrei Markov file le parfait bonheur à Chekov. «Je joue enfin au hockey. Qu'est-ce que je pourrais demander de mieux?»

Le genou droit tient le coup. Le coeur et le souffle aussi. Mais au dire du défenseur, il reste encore du travail à faire pour que tout soit au diapason.

«Le genou ne me préoccupe plus. Avec tout le travail accompli l'été dernier en gymnase - sous la direction de Scott Livingston, l'ancien préparateur physique du Canadien -, j'ai repris toute ma force. Mais après presque deux saisons complètes loin de la patinoire, je n'ai pas encore retrouvé tous mes atouts et tout mon synchronisme. D'où l'importance d'être venu ici. Le fait que la saison ne compte que 52 parties me permet de me donner à fond lors des matchs, tout en profitant des entraînements de qualité et du repos nécessaire. Le retour sur une patinoire de dimensions olympiques m'oblige à patiner davantage. C'est également un plus», a analysé Markov, qui n'affiche qu'une passe en sept rencontres. Il revendique toutefois 14 tirs au but et est utilisé près de 20 minutes par match.

Lors de sa dernière rencontre, Markov a remporté plusieurs batailles en zone défensive pour récupérer la rondelle. Il a aussi orchestré de belles sorties de zone, l'une de ses grandes qualités, en plus d'offrir des passes précises en zone offensive. Des points fort encourageants pour les fans du Canadien en attendant un éventuel règlement du conflit qui les prive de hockey.

Le numéro 27

Parce que son capitaine Alexei Troshchinsky portait le chandail 79, Andrei Markov endosse le 27 depuis son arrivée à Chekov. Pourquoi le 27? «Raison personnelle!» Il ne manquait que le «next question»...

Bien qu'il soit de retour chez lui, Markov habite toujours un hôtel situé non loin de l'amphithéâtre de son équipe. «Je vis de l'autre côté de Moscou. Crois-moi, tu ne voudrais pas effectuer ce trajet soir et matin.»

Qui eût cru que la circulation à Montréal pourrait un jour militer en faveur du Canadien!