Les propriétaires de la LNH disent que les joueurs gagnent trop cher. Les joueurs reprochent aux propriétaires de décharger sur eux le fardeau d'aider les équipes en difficulté.  Qui a raison? Qui a tort? Portrait financier de la LNH sous la dernière convention collective, échue à partir de minuit ce soir.

1. Les joueurs, gagnants de la dernière convention collective?

Oui, les revenus de la LNH sont passés de 2,2 à 3,3 milliards par année depuis le lock-out de 2004-2005. Mais ce sont les joueurs qui semblent avoir profité le plus de cette manne. Depuis le lock-out, le salaire moyen d'un joueur a augmenté de 57%, tandis que les profits moyens d'une équipe sont restés stables à 4,2 millions et que la valeur moyenne des équipes a augmenté de 33,1%, selon Forbes, dont la validité des chiffres n'est pas reconnue par la LNH. Les revenus des équipes ont augmenté de 36,2% - un chiffre important puisque les joueurs avaient droit à 57% des « revenus hockey » des équipes, peu importe leurs profits. « Il ne faut toutefois pas oublier que les joueurs ont accepté une baisse de salaire de 24% à la signature de la convention collective », nuance Philip Merrigan, professeur d'économie à l'UQAM. En comparant avec la saison 2003-2004 (la dernière avant la baisse salariale), le salaire moyen a tout de même augmenté de 24%.

Depuis le lock-out, le salaire moyen a augmenté de 57% (1,4 à 2,2 millions)

2. Des profits au neutre, voire à la baisse

Avec des lunettes roses, on peut conclure que les équipes de la LNH font autant de profits (moyenne de 4,2 millions par année) qu'avant le lock-out. Avec des lunettes grises, on constate qu'une équipe de la LNH perd généralement de l'argent. L'équipe médiane (la 15e équipe sur 30 sur le plan financier) perd 2,4 millions en 2010-11 alors qu'elle faisait des profits de 3,7 millions en 2005-06. En six ans, les pertes des équipes déficitaires sont passées de 34,5 millions (8 équipes) à 126 millions (18 équipes). Ces données ne tiennent toutefois pas compte du programme de partage des revenus, qui permet une certaine redistribution des richesses entre les équipes les plus et les moins fortunées.

Depuis le lock-out, les profits moyens d'une équipe sont restés stables (4,2 millions)

Depuis le lock-out, le nombre d'équipes déficitaires a augmenté de 8 à 18

3. La LNH, (presque) le meilleur investissement en ville

Les profits des équipes n'ont pas augmenté depuis le lock-out, mais leur valeur moyenne si (+33,1%). C'est mieux que les équipes de la NFL (+15,5%) et de la NBA (+4,4%). Si le baseball (+38,8%) a été un meilleur investissement que le hockey, c'est parce que ses équipes les plus riches (Yankees, Red Sox, Mets) ont augmenté de valeur davantage que les équipes les plus riches de la LNH (Maple Leafs, Rangers, Canadien). La valeur médiane (la valeur de la 15e équipe la plus riche sur 30) a augmenté de 37,8% au hockey, comparativement à 22,5% au baseball, 12,0% au football et 5,9% au basket. Le hockey et le basket sont les deux seuls sports où les équipes les moins riches ont davantage augmenté leur valeur, toutes proportions gardées, que les équipes les plus riches.

Depuis le lock-out, la valeur moyenne d'une équipe a augmenté de 33,1% (179,8 à 239,3 millions)

4. Ô Canada

Si la LNH génère plus d'argent qu'avant le lock-out, c'est beaucoup à cause des équipes canadiennes. Le Canada ne représente que 20% des équipes (6 équipes sur 30, en excluant les Jets de Winnipeg revenus au pays entre-temps), mais il génère 26% des revenus et de la valeur des équipes. Les clubs canadiens ont généré 174,2 millions de profits, tandis que les 24 équipes américaines présentent un bilan déficitaire de 47,7 millions. En 2005-06, les équipes canadiennes représentaient 22% des revenus et de la valeur des équipes, ainsi que 62% des profits. « Les succès de la LNH s'appuient beaucoup sur le dollar canadien, qui est très volatil et difficile à prédire à long terme, dit l'économiste Philip Merrigan. En enlevant les équipes canadiennes, on obtient un portrait complètement différent de la LNH. »

En 2010-11, les 6 équipes canadiennes ont généré 174,2 millions de profits, tandis que les 24 équipes américaines ont fait des pertes de 47,7 millions.

5. Les inégalités en hausse chez les joueurs...

Comme dans le reste de la société, les plus riches s'enrichissent plus rapidement dans la LNH. De 2005-06 à 2010-11, l'écart entre le salaire médian (le salaire du 345e joueur le mieux payé parmi les 690 joueurs réguliers) et le salaire moyen (la moyenne des salaires de tous les joueurs) est passé de 56% à 69%. Traduction : les grandes vedettes (dont le salaire gonfle le salaire moyen) accaparent plus d'argent qu'avant. « C'est assez classique après l'instauration d'un plafond salarial, dit l'économiste Philip Merrigan. C'est important pour les équipes de garder leurs gros noms et il y a moins d'argent pour les joueurs de soutien. » Avec le football, le hockey est l'un des deux sports professionnels majeurs en Amérique du Nord où l'écart entre les riches et les « pauvres » a augmenté depuis 2005-06. L'écart salaire moyen/salaire médian a été réduit de 248% à 154% au baseball, et de 70% à 53% au basket. Au football, l'écart est passé de 121% à 123%.

... et chez les proprios!

Depuis le lock-out, les 10 équipes les plus rentables sont devenues... deux fois plus rentables par rapport aux autres équipes de la LNH! En 2005-06, ces 10 équipes avaient généré essentiellement les profits de la LNH au complet (125,8 millions par rapport au total de 125,1 millions pour les 30 équipes). En 2010-11, les 10 équipes les plus rentables ont engrangé des profits de 223,1 millions, alors que les 20 autres équipes ont perdu 96,6 millions. Elles n'avaient perdu que 0,7 million l'année suivant le lock-out. Encore une fois, ces données excluent le programme de partage des revenus de la convention collective actuelle.

Les 10 équipes les plus riches génèrent 223,1 millions de profits. Les résultats combinés des 20 autres équipes donnent des pertes de 96,6 millions.

>>> Vous voulez connaître les profits du Canadien? La masse salariale des Maple Leafs? L'évolution des pertes financières des Coyotes de Phoenix au fil des saisons? Si les équipes canadiennes sont plus rentables que les équipes américaines? LaPresse.ca lance un graphique sur les finances des équipes du circuit Bettman.

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Moyenne : somme des données divisée par le nombre de données

Médiane : valeur de la donnée en plein milieu (ex : 15e équipe la plus riche sur 30)

Notes: Nous avons utilisé l'année 2010-2011 comme dernière année de référence, car il s'agit de la dernière année où Forbes publie des chiffres financiers sur les équipes de la LNH. Le salaire médian n'est pas exactement le salaire médian de tous les joueurs d'une ligue, mais plutôt le salaire médian des salaires médians de chaque équipe (c'est le salaire médian de la 15e équipe avec le salaire médian le plus élevé, au lieu du salaire médian du 345e joueur le mieux payé sur les 690 joueurs de la LNH). Les salaires de la NFL n'étant pas disponibles dans la base de données de USA Today pour l'année 2010-2011, nous avons plutôt utilisé les salaires de l'année 2009-2010 pour la dernière année de référence. Source: Forbes, USA Today