À en croire les joueurs du Canadien, le scandale qui éclabousse les Saints de La Nouvelle-Orléans ne saurait se produire au hockey. Personne ne semble concevoir qu'une équipe puisse offrir des récompenses pour avoir blessé un adversaire.

«N'est-ce pas ce dont il était question dans le film Slap Shot» a demandé l'entraîneur-chef Randy Cunneyworth.

«Au niveau de la LNH, le hockey ne s'est jamais rendu à cet extrême, a-t-il ajouté plus sérieusement. Je n'ai même jamais eu vent de rumeurs à cet effet.»

Les joueurs sont bien prêts à admettre que de l'argent est parfois mis au tableau lorsqu'un joueur veut gagner contre son ancienne équipe.

«Mais je n'ai jamais vu d'argent servant à mettre à prix la tête de certains adversaires», assure Chris Campoli.

Le commissaire de la NFL, Roger Goodell, a mentionné qu'en dépit du fait que le football était un sport de contacts, frapper pour blesser était à ses yeux inadmissible.

Or, le hockey est lui aussi un sport de contacts. Un sport où l'intimidation sert à augmenter l'espace pour manoeuvrer. Ne risque-t-on pas de voir une attitude semblable?

«Il y a un code sur la glace», prétend P.K. Subban.

«Les joueurs de hockey sont une espèce différente des autres sports, relance le colosse Brad Staubitz. La robustesse au hockey est plus réactive. Elle est là afin d'empêcher que des joueurs prennent des libertés aux dépens de vos coéquipiers.

«Mais c'est un sport qui doit se jouer dans le respect mutuel. Ça n'a rien de sportif de vouloir blesser délibérément. Tandis qu'intimider, effrayer, rendre timide... ça c'est autre chose.»

Aucun joueur n'est «de ce type-là»

Chris Campoli refuse de croire que Sidney Crosby, par exemple, pourrait devenir une cible sous prétexte tout le monde est au courant de ses blessures à la tête.

Par contre, il souscrit à l'opinion de Staubitz sur l'équilibre de la terreur.

«Quand il est question de compétition sportive, l'esprit «oeil pour oeil, dent pour dent» est très présent, dit-il. On nous l'inculque depuis qu'on est enfant.»

Il y a plus de 700 joueurs dans la ligue. Et aucun d'entre eux n'aurait comme visée de blesser l'adversaire?

«J'ai déjà fait partie d'équipes au sein desquelles il y a une eu de sévères suspensions», rappelle Campoli en évoquant les incartades de Chris Simon avec les Islanders de New York.

En mars 2007, Simon avait asséné un violent coup de bâton au visage de Ryan Hollweg, des Rangers, ce qui avait entraîné une suspension record de 25 matchs.

Puis, quelques mois plus, Simon avait été sanctionné pour 30 matchs après avoir piétiné Jarkko Ruutu avec son patin.

«Dans l'oeil du public, l'intention de blesser était là, a dit Campoli. Mais je connais Simon personnellement et ce n'est pas le genre de geste qu'il cherche à commettre.»

Au hockey, on identifie plus facilement les gestes violents instinctifs que ceux ayant eu réelle préméditation, comme le fameux incident Moore-Bertuzzi.

«Comment peut-on prouver une intention de blesser? » demande Campoli.

Cette décision d'interprétation revient au préfet de discipline Brendan Shanahan. Car visiblement, aucun joueur de la ligue n'est «ce genre de joueur».

«Il y a des gars plus durs qui sont là pour nous rendre la vie plus difficile, mais ils n'ont pas dans la tête de blesser quelqu'un en disant «je vais le sortir pour six semaines», soutient David Desharnais.

«Ils sont juste là pour faire leur travail et aider leur équipe à gagner.»

Divulguer ou non les blessures?

Une différence fondamentale entre la NFL et la LNH, c'est que le circuit Goodell rend publique, à chaque semaine, une liste exhaustive sur l'état de santé des joueurs blessés.

Instaurée en 1947, cette liste visait à maintenir une distance entre les joueurs et les parieurs qui cherchaient à obtenir de l'information privilégiée. Aujourd'hui, elle ressemble davantage à un outil pour faciliter la vie des parieurs.

Depuis le lock-out de 2004-05, la LNH est pour sa part de plus en plus discrète quant à la nature des blessures. Les infâmes «haut du corps» et «bas du corps» sont saupoudrés généreusement dans les médias.

Pour quelle raison, si ce n'est pour protéger les joueurs de leurs adversaires?

«Si j'ai une blessure au haut du corps à la veille des séries, je ne veux pas que les autres équipes sachent que j'ai une épaule amochée, décrit P.K. Subban. Car si moi je sais qu'un adversaire est blessé, sans pour autant le cibler, je ne le ménagerai pas car je voudrai le décourager d'aller dans les coins de patinoire.»

Randy Cunneyworth ne croit pas que les joueurs visent consciemment à blesser. Mais en jouant de façon agressive, il y a certainement un plus grand risque que quelque chose se produise, surtout si l'adversaire joue blessé.

«Si l'on est au courant de sa blessure, ça devient une partie du jeu», estime Cunneyworth.