La pépinière de talent au Québec est devenue tellement pauvre que les équipes de la LHJMQ seront désormais tenues de repêcher au moins deux joueurs de la Nouvelle-Angleterre à compter de cette année!

Cet état de choses n'est pas sans multiplier les responsabilités du dépisteur des Screaming Eagles du Cap-Breton, Simon Boisvert, qui a obtenu son poste l'an dernier en se faisant connaître avec des commentaires percutants, mais très justes, sur le blogue Rondelle libre, sur lapresse.ca.

«Je couvre le territoire de la Nouvelle-Angleterre depuis mon arrivée avec l'équipe, dit-il. Je crois que cette initiative vise à encourager les équipes à repêcher des joueurs américains et ainsi rehausser le niveau de jeu de la Ligue.»

Simon Boisvert travaille à temps partiel pour les Screaming Eagles et son directeur du personnel Richard Liboiron, mais il n'est pas le seul.

«La plupart sont à temps partiel et ceux qui font le métier à temps plein doivent toucher des salaires modestes», dit celui qui préfère respecter la politique de son club en ne dévoilant pas les détails de son contrat.

«Tous ceux à qui j'ai parlé ont un autre emploi ou encore sont à la retraite.»

Simon Boisvert, qui possède sa boîte de traduction et qui oeuvre aussi dans le domaine du cinéma, se déplace une dizaine de fois par saison, mais il regarde beaucoup de matchs par le truchement de l'internet.

«Le gros du travail se fait entre septembre et décembre. Je me commande plusieurs matchs sur l'internet de façon à éliminer les joueurs les moins intéressants. Ma liste passe de 50 à une vingtaine de noms au cours des 3 premiers mois de la saison. Puis je commence à me déplacer et je réduis ce nombre à une dizaine.»

Comment procède-t-il lorsqu'il veut analyser le talent d'un joueur?

«Je ne regarde jamais plus de deux joueurs à la fois parce que je veux pouvoir voir ce qu'ils peuvent faire sans la rondelle. Et je ne fais pas une blague. Le jeu sans la rondelle permet de voir l'intelligence et le sens d'anticipation du joueur. Si on suit plus d'un ou deux joueurs, on ne fait que fixer le porteur de la rondelle et on ne fait pas notre travail.»

Les recruteurs d'équipes de niveau junior ont des commandes bien précises de la part de leurs patrons.

«Le potentiel du joueur en fonction d'une éventuelle carrière dans la LNH nous importe très peu. Les patrons nous demandent plutôt de mesurer ce que le joueur pourra nous apporter lorsqu'il aura 19 ans. Sera-t-il un joueur défensif ou offensif, sur quel trio pourra-t-il jouer?

«Par contre, ajoute-t-il, les équipes recueillent des sommes d'argent pour les joueurs de leur organisation qui sont repêchés dans la LNH. Pour un choix de première ronde, c'est une somme importante (dans les six chiffres). Ce sont des revenus de plus. Si on est capable de repêcher des gars qui pourraient intéresser la LNH, tant mieux pour nous!»

Simon Boisvert n'apporte jamais de crayon à l'aréna.

«Ni crayon ni papiers. Je consigne mes rapports directement sur RinkNet à l'aide de mon iPad, entre les périodes, à l'aréna. Je dirais qu'environ 12 équipes sur 18 sont sur RinkNet. On essaie de convaincre les autres parce que ça coûterait moins cher si tout le monde embarquait.»

Et oui, Simon Boisvert rêve encore qu'on lui donne les rênes d'un club junior. Un jour, peut-être...