Parfois, faire preuve de patience avec les jeunes joueurs peut s'avérer payant. Lorsque le Canadien a choisi de se débarrasser de Mikhail Grabovski, en juillet 2008, il croyait se défaire d'un joueur à problèmes. D'un athlète immature qui, on s'en souviendra, avait déserté l'équipe en décidant de ne pas prendre le vol menant le Canadien vers Los Angeles après un match à Phoenix.

D'autres épisodes ont suivi une fois Grabovski fut devenu un Maple Leafs. Qu'on se souvienne de ces matchs au Centre Bell où il cherchait constamment à s'en prendre à son ancien coéquipier Sergei Kostitsyn. Ou encore de cette arrestation après une bagarre dans un bar de Vancouver pendant les Jeux olympiques.

Pourtant, Grabovski a atteint des sommets personnels l'an dernier avec 29 buts et 58 points, des chiffres qu'il surpassera cette année s'il maintient le rythme actuel. Compétiteur féroce, il est devenu avec les années un joueur aussi fiable dans sa zone que dangereux à l'attaque.

Et à en croire l'entraîneur-chef des Leafs, Grabovski a pris beaucoup de maturité.

«Il est mentalement, si ce n'est physiquement, le joueur le plus dur de notre équipe», a soutenu Ron Wilson lors d'une entrevue à TSN.

«Si je suis différent aujourd'hui, c'est que j'ai maintenant une famille, soutient Grabovski, père de deux très jeunes enfants.

«Je pense en fonction de l'avenir et non du passé.»

Un autre Bulldogs échangé

Que s'est-il donc passé pour que le jeune joueur impétueux qui ne cadrait plus dans les plans du Canadien devienne à Toronto un centre capable d'amasser 60 points et de faire le boulot tant dans sa zone qu'en territoire adverse ?

«Guy Carbonneau le faisait jouer sur le quatrième trio et voulait en faire un centre défensif», se souvient l'agent Gary Greenstin, chez qui Grabovski s'était réfugié la nuit où il avait fait faux bond à l'équipe.

«Mikhail ne cadrait pas dans ce système-là. Alors au mois de mai, je suis allé voir le DG Bob Gainey et je l'ai averti qu'il ne signerait pas de nouveau contrat avec le Canadien.»

Grabovski était convaincu d'avoir fait bonne impression, la saison précédente, en aidant les Bulldogs de Hamilton à remporter le championnat.

«J'avais connu une excellente saison à Hamilton et nous avions gagné la Coupe Calder. Plusieurs joueurs d'ailleurs de ce club pourraient jouer à Montréal, mais le Canadien a décidé de les échanger. Ils ont bâti une toute autre équipe.»

Bien vu. Outre Carey Price et Andrei Kostitsyn, tous les joueurs qui sont passés par Hamilton en 2006-07 ont quitté l'organisation !

Les Leafs ont pris une chance

Pendant ce temps, à Toronto, la formation dont avait hérité le DG par intérim Cliff Fletcher était en lambeaux.

«Nous ne formions pas une bonne équipe de hockey à l'époque», se rappelle Fletcher, qui était revenu remplacer par intérim John Ferguson Jr. en janvier 2008.

«J'avais vu jouer Grabovski et il était extraordinaire au niveau de la Ligue américaine. Il avait des habiletés évidentes et notre équipe manquait cruellement de joueurs habiles. Nous manquions de joueurs de centre, mais il n'y en avait aucun autre disponible.

«Si nous avions été une très bonne équipe, nous n'aurions probablement pas pris de chance avec lui. Mais ça a valu la peine de céder un choix de deuxième ronde pour mettre la main sur lui.»

Le Tricolore, lui, a ensuite échangé ce choix au repêchage pour mettre la main sur Robert Lang, dont le séjour à Montréal a été bref. Il a également obtenu dans la transaction le défenseur Greg Pateryn, qui n'a pas terminé ses classes à l'Université du Michigan.

À Toronto pour combien de temps ?

À Toronto, sans devenir une vedette, le rapide centre de 28 ans a su s'établir comme un bon centre de deuxième trio.

«Dès ma première saison, on m'a donné beaucoup de temps de glace qui m'ont permis de devenir un meilleur joueur, raconte-t-il. La même chose aurait pu se produire à Montréal, mais il y a des gens là-bas qui ne croyaient pas en moi.»

Mais aujourd'hui, la question qui se pose est la suivante : Brian Burke croit-il suffisamment en Grabovski pour lui offrir un nouveau contrat?

Le DG des Leafs pourrait être tenté de l'échanger d'ici le 27 févier, sauf que Grabovski, pour la deuxième saison de suite, a sérieusement élevé son jeu en deuxième moitié de calendrier. Depuis le 23 décembre, soit lors des 21 dernières rencontres, Grabovski a inscrit 10 buts et 24 points.

«C'est l'un des centres les plus rapides et les plus agiles de la ligue, explique son compagnon de trio Clarke MacArthur. Cela fait un an que je suis à Toronto, à jouer à ses côtés, et c'est très plaisant.

«Il a été l'un de nos meilleurs joueurs dans les dix derniers matchs, non seulement offensivement, mais aussi au plan défensif. C'est toujours agréable de jouer avec un joueur qui prend ses responsabilités dans son territoire. Ça facilite la tâche de Nikolai Kulemin et moi.»

L'agent Gary Greenstin est à Toronto présentement, mais il refuse de commenter l'état des négociations avec les Leafs.

Et Grabovski a appris la leçon : il évite désormais de mettre une pression indue sur ses patrons...