Le hockey de la LNH a bien changé. Le sport, autrefois une chasse gardée canadienne, s'est internationalisé au point où les joueurs canadiens ne comptent plus que pour la moitié des effectifs dans la LNH. Mais pendant que la place du Canada déclinait, celle du Québec rapetissait carrément comme peau de chagrin.

Lentement mais sûrement, la courbe des joueurs québécois évoluant dans la Ligue nationale suit une trajectoire descendante. Avec 64 représentants cette année, le Québec présente son plus faible total depuis l'année de la première vague d'expansion, en 1967-1968.

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Pire encore, les Québécois ne constituent que 13% de tous les joueurs canadiens, contre 18% au début des années 90, et seulement 7,2% de l'ensemble des joueurs, toutes nationalités confondues, une proportion deux fois moins élevée qu'il y a deux décennies.

Le portrait géopolitique a, il est vrai, énormément changé en 20 ans. La concurrence, autrefois limitée de l'Atlantique au Pacifique, s'étire désormais à toute l'Europe, autant nordique que des pays de l'Est.

«Jusque dans les années 60 et 70, la majorité des joueurs étaient canadiens et il y avait quelques Américains dans le lot, rappelle Michel Vigneault, historien du sport et chargé de cours à l'UQAM. Mais après la chute du mur de Berlin, les frontières se sont ouvertes avec les arrivées de Russes ou de Tchèques. Puisque la LNH est la meilleure ligue du monde, elle se doit d'attirer les meilleurs joueurs.»

Ce constat est particulièrement flagrant entre 1991 et 2001. La proportion de tous les joueurs canadiens a chuté de près de 17 points de pourcentage, passant de 70,8% à 54,1%. Les éléments issus des cinq principaux pays européens comptaient, quant à eux, pour 28% des effectifs de la ligue.

La mode était donc aux joueurs russes ou tchèques avant l'avènement de la Ligue continentale russe (KHL), qui a contribué à diviser par deux leur représentation depuis le début du siècle. Mais les acteurs du hockey québécois ont-ils tout fait pour briser cette mode européenne? se demande Vigneault.

«Le Canadien n'est pas très bien installé pour recruter des joueurs du Québec. Même chose pour de nombreuses équipes qui ne viennent pas du tout dans la province. Peut-être que la LHJMQ devrait voir pour mieux «vendre» ses joueurs», croit-il.

Mieux encadrer

Les choses ont pourtant évolué au cours des dernières années. Devant ce déclin, Hockey Québec a lancé une vaste consultation auprès d'anciens joueurs et de dépisteurs, il y a trois ans.

«Nous n'avons pas de contrôle sur le repêchage, mais nous pouvons innover et offrir un encadrement de meilleure qualité, explique le directeur technique de Hockey Québec, Yves Archambault.

«Le Championnat mondial junior est important dans l'optique du repêchage et il faut placer plus de joueurs québécois. Préparer davantage nos joueurs à faire partie de cette équipe- là serait un bon pas vers une meilleure représentativité au repêchage.»

Les objectifs étant connus, il restait à trouver les bons outils afin d'obtenir quelques gains à court terme, mais surtout des résultats durables. En plus de favoriser la participation aux programmes sport-études dès le Bantam AA, Hockey Québec surveille désormais les joueurs dès l'âge de 12 ans grâce à un camp de perfectionnement printanier et à différents tournois.

Les 15 nouvelles structures intégrées permettent également d'offrir un parcours plus harmonieux aux joueurs. «Du midget AAA au pee-wee AA, nous essayons de faire travailler tous les entraîneurs ensemble, ajoute Archambault. Nous voulons passer le même message pour qu'ils travaillent sur du long terme avec chaque groupe d'âge.»

La LHJMQ a emboîté le pas, même si, comme l'explique son commissaire Gilles Courteau, elle ne fait pas de distinction de nationalités. «À la suite du sommet du hockey québécois, nous avons mis en place un programme de développement individualisé. On veut travailler avec nos joueurs élites, peu importe leurs origines, pour leur permettre d'atteindre la LNH.»

S'il semble difficile de voir le Québec retrouver sa place, ces initiatives pourraient néanmoins permettre de freiner le retard qui se creuse par rapport aux provinces de l'ouest du Canada. Depuis la saison 2002-2003, les Albertains sont plus nombreux que les Québécois tandis que la Colombie-Britannique fait des pas de géants.

Courteau a souvent discuté de ce constat avec ses homologues des ligues de l'Ontario et de l'Ouest.

«Il est impressionnant de voir qu'elles produisent une telle quantité de joueurs avec un bassin de population restreint.

«La situation fait en sorte que les jeunes jouent au hockey et qu'ils n'ont pas d'autres options sportives aussi développées qu'au Québec. Car lorsque l'on regarde l'origine de ces joueurs de l'Ouest, on voit qu'ils viennent de petites villes.»

Seulement trois gardiens de la Colombie-Britannique, dont Carey Price, ont disputé au moins un match cette saison.