L'ancien défenseur des Jets Jim Kyte se réjouit du retour de la LNH à Winnipeg. Mais l'ex-hockeyeur devenu professeur d'administration ne se fait pas d'illusions: l'équipe devra être concurrentielle sur la glace afin d'assurer sa survie à long terme dans le plus petit marché de la LNH.

«La lune de miel durera de cinq à sept ans, dit Jim Kyte, directeur du programme d'administration du sport au collège Algonquin, à Ottawa. Après cette période, l'équipe devra faire les séries, sinon ce sera un défi (sur le plan financier). À Winnipeg comme à Calgary ou à Edmonton, il faut une équipe concurrentielle pour être rentable.»

«Il faut une équipe qui peut faire un bout de chemin en séries, ce que les Jets n'ont jamais pu réussir», dit le professeur d'administration Robert Warren, directeur du Centre d'entrepreneuriat de l'Université du Manitoba.

Même optimisme prudent du côté de Mario Lefebvre, un économiste du Conference Board du Canada qui a publié une série d'études sur le retour de la LNH à Winnipeg et à Québec. «C'est viable à long terme, mais Winnipeg va toujours rester un marché limité pour la LNH, dit-il. Il va y avoir une frénésie pour les billets les premières années, mais les gens de marketing vont ensuite devoir travailler très fort.»

La nouvelle équipe de Winnipeg aura plusieurs avantages dont les Jets ne bénéficiaient pas dans les années 80 et 90. Tout d'abord, la vigueur du dollar canadien, actuellement à 1,03$US. Quand les Jets ont déménagé à Phoenix en mai 1996, le huard valait 73 cents US. «Il faut que le dollar canadien tienne le coup, même s'il n'est pas obligé de rester à parité, dit l'économiste Mario Lefebvre. Heureusement, aucun économiste ne prévoit un effondrement du dollar canadien, qui dépend beaucoup de la demande pour ses matières premières. Or, la demande semble assurée au cours des prochaines années à cause de la Chine et de l'Inde.»

Les propriétaires de True North Sports&Entertainment, particulièrement l'actionnaire minoritaire David Thomson, ont aussi les reins plus solides que l'ancien propriétaire des Jets Barry Shenkarow. Selon Forbes, la famille Thomson vaut 23 milliards, la plus importante fortune du pays et la 17e fortune mondiale. «M. Thompson est un homme d'affaires aguerri et il ne fait pas d'investissements émotifs, dit Jim Kyte, un premier choix des Jets en 1982 qui a joué 11 saisons dans la LNH. L'arrivée d'une équipe de la LNH augmentera la valeur de ses investissements immobiliers au centre-ville, près du MTS Center.» L'économiste Mario Lefebvre est aussi rassuré par la présence de David Thomson. «Il faut un propriétaire capable d'absorber des pertes en cours de route, comme Eugene Melnyk à Ottawa», dit-il.

Avec 753 555 personnes dans sa région métropolitaine, Winnipeg est de loin le plus petit marché économique des 30 équipes de la LNH, derrière Edmonton (1,17 million de personnes), Buffalo (1,12 million), Calgary (1,24 million), Ottawa (1,24 million de personnes), Nashville (1,67 million) et Raleigh, en Caroline-du-Nord (1,74 million). Le revenu moyen après impôts est moins élevé à Winnipeg (29 302$) que dans les autres petits marchés canadiens comme Calgary (42 293$), Edmonton (34 754$) et Ottawa (32 042$). «Il y a une grande différence entre la passion pour le hockey et la décision de piger dans son portefeuille pour acheter des billets aux prix de la LNH», rappelle Jim Kyte, qui croit que l'arrivée de la LNH aura des conséquences pour les Blue Bombers de la Ligue canadienne de football.

Pour vendre ses loges d'affaires, Winnipeg abrite 30 des 800 sièges sociaux les plus importants du pays, contre 26 à Edmonton et 19 à Ottawa, deux autres petits marchés de la LNH. «La communauté des affaires va se rallier derrière l'équipe. Beaucoup d'entreprises se mettront à trois ou à quatre pour acheter une loge», dit le professeur Robert Warren.

WINNIPEG / EDMONTON / OTTAWA / QUÉBEC

POPULATION / 753 555 / 1 176 307 / 1239 140 / 754 358

REVENU MOYEN APRÈS IMPÔTS 29 302$ / 34 754$ / 32 042$ / 28 159$

SIÈGES SOCIAUX 30 / 26 / 19 / 17

Notes : Population en 2010, revenu moyen disponible après impôts par personne en 2009, sièges sociaux parmi les 800 plus importantes entreprises canadiennes en matière de revenus en 2009. Ottawa comprend aussi la région de Gatineau au Québec.

Sources : Statistique Canada, Conference Board du Canada, National Post.