On savait Jeremy Roenick spectaculaire, mais peut-être pas à ce point.

Celui que l'on surnomme simplement «J.R.» a ajouté à sa propre réputation, dimanche soir, en qualifiant l'attaquant Patrick Marleau, un ancien coéquipier, de la pire insulte qui soit pour un joueur de hockey: «Gutless». Ce qui veut dire «sans coeur», bien sûr. Roenick faisait référence au cinquième match présenté à San Jose dimanche soir, dans lequel le joueur vedette des Sharks avait des allures de passager, pour rester dans le jargon du milieu.

Les commentaires de Roenick, livrés à chaud devant les caméras de la chaîne américaine Versus, n'ont pas manqué de provoquer quelques vives réactions. Roenick a-t-il dépassé les limites du bon goût? Mais surtout, un ancien joueur peut-il se permettre de critiquer un joueur de la sorte?

C'est souvent le problème pour les anciens qui tentent leur coup sur les ondes une fois la carrière terminée. Il y a des amis dans les vestiaires, des bonnes connaissances aussi, alors on se retient. On ne veut pas trop froisser. Bref, on ne veut pas trop critiquer.

Aaron Ward, un ancien défenseur qui a fait le saut devant les caméras de TSN cette année, avoue que la transition n'est pas facile.

«C'est le bout le plus difficile, reconnaît-il au téléphone. On ne veut pas passer pour le méchant aux yeux des joueurs. Il faut toujours trouver les bons mots quand on veut dire quelque chose de négatif.»

Ward affirme que son portable a vibré souvent cette saison après un commentaire foudroyant livré sur les ondes.

«Souvent, quand je me permettais de critiquer un gars, je recevais par la suite un message texte de la part de ce gars-là... ou de la part de son agent, ou un membre de son entourage. Et c'était toujours pour des détails, des critiques qui n'étaient pas particulièrement sévères.»

L'ancien gardien Marc Denis, lui, avoue qu'il ne cherche pas à régler des comptes quand il est en ondes à RDS.

«Je suis un analyste de ce qui se passe sur la patinoire... Ce que je ne veux jamais faire, c'est de prêter des intentions à quelqu'un. Quand on dit qu'un joueur était mal préparé, est-ce qu'on lui a parlé la veille du match pour pouvoir dire ça?»

On dit souvent que ce qui se passe à Vegas reste à Vegas. C'est la même chose au hockey. «Y'a des choses qui se passent dans les vestiaires, et qui doivent rester dans les vestiaires», a ajouté Marc Denis.

Et c'est précisément pourquoi les propos de Jeremy Roenick ont provoqué des secousses sur la planète LNH. Parce qu'on a un peu l'impression que l'ancien joueur a dévoilé un secret de vestiaire. Les mots de Roenick laissent croire que Patrick Marleau n'est pas le plus brave chez les Sharks, ni le plus intense.

Roenick ne sera certes pas invité au prochain BBQ de Patrick Marleau, mais rappelons ici qu'il est payé par Versus pour dire des choses que le commun ignore. Voilà.

À l'inverse, pas besoin d'avoir joué dans la Ligue nationale pour savoir que le premier but, ce soir à Detroit, sera important. Ça, tout le monde le sait, incluant le type qui fait griller les hot-dogs derrière la section 117. Quand un ex-patineur de la LNH prend le micro, forcément, on s'attend à plus que des clichés et des banalités. Parce qu'il est censé en savoir plus que nous, simples mortels.

Enfin, «l'affaire Roenick» vient confirmer ce dont on se doutait déjà: quand un joueur affirme qu'il ne sait pas ce qu'on dit de lui parce qu'il ne lit pas les journaux et n'écoute pas la télé, il ment.

Aaron Ward éclate de rire quand je lui en parle.

«Les joueurs sont très au courant, ce n'est pas vrai qu'ils ne savent rien de ce qui se dit ou s'écrit sur eux... c'est juste qu'ils ne veulent pas le montrer.»

C'est bon à savoir.