À bientôt 36 ans, Martin St-Louis ne montre aucun signe d'essoufflement. Petit portrait d'un type qui n'aime pas perdre.

Vincent Lecavalier sursaute un peu quand on lui fait remarquer que Martin St-Louis vient de s'offrir une excellente saison sur les glaces de la Ligue nationale. «Oui, mais Martin, il connaît toujours de bonnes saisons...», répond le capitaine du Lightning, comme pour nous montrer que notre affirmation est à classer dans le grand tiroir des évidences.

Message bien reçu.

Martin St-Louis, c'est vrai, connaît toujours de bonnes saisons. Ou presque. Depuis son arrivée à Tampa, il y a déjà 11 ans, l'attaquant de 35 ans s'est payé 6 saisons de 80 points et plus, incluant la plus récente, une récolte de 99 points en 82 matchs.

À son âge, on pourrait croire qu'il serait un brin plus lent en séries, mais ce n'est pas vraiment le cas. Depuis le début de la «vraie saison», St-Louis a récolté 13 points en 11 rencontres. Si son club a déjà une place en finale d'association, c'est en grande partie grâce à lui.

On connaît bien son histoire. Hockeyeur issu du milieu collégial américain. Jamais repêché. Arrivé dans la LNH en 1998, à Calgary, chez des Flames qui n'ont pas cru en lui et qui lui ont montré la porte à peine deux ans plus tard. Débarqué à Tampa en 2000, là où il a enfin explosé, s'offrant une saison de 70 points en 2002-03...

On allait oublier: il a aussi gagné le trophée Hart en 2004, année de conquête de la Coupe Stanley chez le Lightning. Cette année, il est de nouveau en nomination pour le même trophée, à un âge où la majorité des joueurs sont sur le déclin. Mais lui ne semble pas prêt pour la maison de retraite. Pas du tout.

Comment fait-il, au juste?

«Il est un gars intense et déterminé, poursuit Lecavalier. Il a toujours été comme ça. J'ai su qu'il était comme ça aussi au hockey collégial, quand il jouait au niveau bantam... Il n'a pas changé sa façon de jouer.»

L'entraîneur du Lightning, Guy Boucher, pourrait parler de Martin St-Louis pendant des heures.

«À son âge, ce qu'il accomplit est exceptionnel, dit le coach. Il fallait qu'il soit en nomination pour le trophée Hart, il a trop d'impact sur notre équipe. Martin, ce n'est pas compliqué, plus il y a de la pression, plus il en veut et plus il fonce. Il ne recule jamais. Il y a peu de gens qui sont comme ça.»

La défaite? Non merci!

Martin St-Louis n'a certes pas changé sur la glace. Hors des patinoires? Alors là, oui, on pourrait dire que le numéro 26 est un peu différent. Le joueur parfois timide et à la mèche courte que l'on croisait jadis dans le vestiaire du Lightning est devenu plus ouvert avec les années, plus volubile aussi, et il se permet même quelques blagues à l'occasion.

Mais il y a une chose qu'il déteste encore aujourd'hui, même après 12 saisons dans la Ligue nationale: la défaite.

Parfois, ça lui joue des tours. L'an dernier, par exemple. Un peu découragé après une autre saison de misère du Lightning, St-Louis a laissé savoir publiquement qu'il désirait avant tout jouer pour une équipe gagnante... ce qui, évidemment, n'avait pas manqué d'alimenter la machine à rumeurs. Rapidement, on en avait conclu qu'il cherchait à se sortir de Tampa.

Mais il n'a pas exigé d'être échangé. Et quand il a vu la nouvelle direction du club à l'été, quand il a vu Steve Yzerman et Guy Boucher s'installer dans les bureaux du St. Pete Times Forum, il a vite compris que le vent allait tourner.

«C'est difficile de jouer ton meilleur hockey dans des conditions comme celles de l'an passé, reconnaît-il. On ne savait pas trop ce qui allait arriver, il y avait toutes ces rumeurs du côté de la direction du club... Est-ce que la nouvelle direction a fait une différence? Absolument. Maintenant, on a un bel environnement de travail.»

Pour expliquer la soudaine renaissance du Lightning, Guy Boucher préfère ne pas parler de son propre travail. En fait, il préfère parler de Martin St-Louis. «C'est lui qui a pris Steven Stamkos sous son aile, et grâce à son leadership, notre équipe a pu évoluer plus rapidement que prévu», d'expliquer l'entraîneur.

Ce qui nous ramène un peu à la question de départ: à 35 ans - bientôt 36 -, le joueur québécois serait-il en train de nous offrir le meilleur hockey de sa vie?

«Je joue avec de très bons joueurs, et le succès, souvent, ça part de ça, répond-il. C'est comme la nomination au trophée Hart; je suis fier de ça, mais pour moi, c'est une nomination collective, parce que ça vient souligner le travail de toute l'équipe. Ça illustre un peu d'où on est partis, parce qu'on est partis de loin.»

Venant d'un joueur qui est lui-même parti de loin, ça ne pouvait mieux tomber.