En ce temps-là, le Canadien traversait le désert. Les bannières suspendues au plafond du Centre Molson évoquaient une gloire intangible, insaisissable. Les plus jeunes amateurs n'en saisissaient plus la signification et les plus vieux, ceux qui n'avaient pas déserté le nouveau domicile du Tricolore, avaient été forcés de revoir leurs attentes à la baisse.

Puis est venue la saison 2001-02. Une saison entamée dans le choc de l'annonce du cancer de Saku Koivu et des événements du 11 septembre, quelques jours plus tard. Méchant début de campagne.

Le DG André Savard avait attiré le vieux Doug Gilmour pour insuffler du leadership au sein d'un groupe sans véritable identité. L'entraîneur-chef Michel Therrien, lui, se préparait à découvrir quel genre d'allié il aurait en José Théodore, lauréat au terme de cette saison-là du trophée Hart remis au joueur par excellence dans la LNH.

Ça a été l'année du cancer de Koivu, l'année de feu de Théo, mais aussi l'année du bras sectionné de Donald Audette, arrivé en cours de saison. L'ailier lavallois avait donné plus de sang que de buts cette année-là.

Arrive avril 2002. Propulsée par le retour de Koivu et Audette en toute fin de calendrier, l'équipe se faufile en séries. Les Bruins de Boston se dressent sur son chemin en première ronde et n'entendent pas lésiner. Sur papier, l'affaire est classée: avec un premier trio formé de Gilmour, Oleg Petrov et Gino Odjick, comment espérer vaincre les champions de l'Association Est?

Mais le scénario attendu n'est pas celui qui s'écrit.

Certes, José Théodore ne joue pas selon les standards établis en saison régulière. Sans compter qu'au quatrième match, l'ailier Richard Zednik, qui joue du hockey inspiré, est victime d'un assaut de Kyle McLaren. Il quitte le match - et la série - sur une civière.

Mais Koivu et Audette prennent le contrôle de la situation et maintiennent le Tricolore dans le coup. La série se déplace à Boston pour le cinquième match. Les favoris sont prêts à envoyer le Tricolore en vacances, mais Théo devient intraitable. Deux petits buts sur 79 tirs dans les deux dernières parties!

Le Canadien élimine les Bruins en six rencontres, remportant ainsi sa première série en quatre ans.

Évidemment, la suite ne sera pas rose. Elle sera jaune moutarde, comme l'infâme complet de Michel Therrien ce fameux soir où il écope d'une punition de banc qui remettra les Hurricanes de Caroline sur les rails.

Cette série-là n'aura pas été la «promenade dans le parc» annoncée. Mais sans l'une de ses plus grandes victoires en séries à titre de négligé, le Canadien ne se serait même pas rendu à l'orée du bois.