Carey Price a été ovationné 50, 100, 1000 fois cette saison par les partisans du Canadien, qui l'ont couronné joueur de l'année pour la deuxième fois déjà de sa jeune carrière.

Ils ont scandé son prénom pour saluer l'un ou l'autre des 1982 arrêts qu'il a réalisés devant les 2147 tirs qu'il a affrontés au fil des 4206 minutes passées devant la cage du Canadien, qu'il a défendue 72 fois cette année. Un record d'équipe en 101 ans d'histoire.

Ce n'est pas rien.

En fait, c'est énorme. Énorme si l'on considère la profondeur du trou que Price a creusé avec ses performances quelconques l'an dernier. Un trou dans lequel il a ensuite sauté les pieds joints et lestés de jambières de plomb avec une attitude suffisante qui l'a relégué loin derrière Jaroslav Halak dans la faveur populaire... et de certains coéquipiers. Un trou duquel Price est non seulement ressorti, mais qu'il a pris soin de remplir pour éviter d'y retomber.

Dire que Carey Price revient de loin est un euphémisme. Les tribunes n'ont pas dérougi l'été dernier pour maudire le Canadien et son directeur général Pierre Gauthier qui l'a préféré à Halak, l'enfant chéri des dernières séries.

Déclaration périlleuse

Elles se sont enflammées le 22 septembre dernier, lors du tout premier match préparatoire, un match au cours duquel Carey Price a accordé 4 buts en 16 tirs, dont le 1er après 93 secondes seulement de jeu. Quatre buts et de trop rares arrêts qui ont ouvert la voie à une longue et dérisoire ovation accordée lorsqu'il est rentré au banc à la mi-match pour faire place à Curtis Sanford.

Cette dure soirée lançait plutôt mal le retour de l'enfant prodigue devant la cage du Canadien. Même qu'elle aurait pu le compromettre.

Car non seulement partait-il avec deux prises contre lui, mais Price s'est permis d'épingler les partisans et ses détracteurs en les invitant à se calmer les nerfs deux secondes. «Chill out!» avait alors scandé Price dans le vestiaire, en ajoutant qu'il ne s'agissait que d'un match préparatoire. Du premier de surcroît.

Samedi à Toronto, après sa 38e victoire et plusieurs vagues de questions liées à sa brillante saison, Price n'a pas hésité une seconde pour confirmer qu'il savait très bien ce qu'il faisait lorsqu'il s'est permis ce «Chill out!» périlleux à l'endroit des partisans.

«Après la saison que j'avais passée et un été qui n'avait rien fait pour aider, je ne pouvais tomber plus bas. Je devais m'imposer. Je suis pas mal fier de ce que j'ai réalisé. Mais je ne l'ai pas faite seul, cette remontée. J'ai profité de l'appui de mes coéquipiers, qui ont toujours été derrière moi», a souligné Price samedi soir.

De Price à Wisniewski

Carey Price est le joueur le plus utile du Canadien cette saison. Prétendre le contraire serait farfelu. Comme le soulignait le collègue Mathias Brunet dans La Presse samedi, le gardien du Canadien doit même être considéré parmi les favoris dans la course au trophée Hart remis au joueur le plus utile de la LNH.

Mais aussi brillantes soient-elles, les performances de Price n'auraient pas suffi si le directeur général du Canadien n'avait pas conclu la transaction ô combien nécessaire qui a permis de mettre la main sur James Wisniewski à la fin du mois de décembre.

Le Canadien était déjà privé d'Andrei Markov. Gauthier savait qu'il était sur le point de perdre Josh Gorges. Mais il ne savait pas encore que Jaroslav Spacek tomberait aussi au combat.

Cette transaction a renfloué la défense. Mais elle a surtout redonné au Canadien l'arme qui lui manquait pour garder ses adversaires en joue avec une attaque massive de premier plan.

L'éclosion de P.K. Subban suit tout près parmi les raisons qui ont permis au Canadien de récolter 96 points cette saison. La 2e récolte des 16 dernières années. Une récolte surprenante étant donné les blessures et surtout l'anémique attaque d'une équipe qui s'en est souvent (trop?) remise à son gardien.

Comme quoi le système imposé par Jacques Martin ne doit pas être aussi mauvais que certains le prétendent. Et que l'entraîneur-chef du Canadien, qui vient de devenir le 9e de l'histoire à atteindre le plateau des 600 victoires, ne doit pas être aussi mauvais que d'autres mettent autant d'efforts à le faire croire.

Mais au-delà de tout ce qu'ils ont accompli au cours des 82 derniers matchs, Carey Price, James Wisniewski, P.K. Subban, leurs coéquipiers et leur entraîneur-chef ne peuvent s'écraser en première ronde. Ils ne peuvent s'écraser, point. Car c'est de cet échec qu'une majorité de partisans se souviendra et non de l'exploit d'avoir terminé l'année au sixième rang.