Saku Koivu n'a pas mis les pieds à Montréal depuis l'élimination du Tricolore en séries éliminatoires, il y a deux ans. L'ancien capitaine a été aspiré par sa nouvelle vie, celle d'un vétéran qui soutient les jeunes vedettes des Ducks d'Anaheim.

Or, le jour du retour approche.

Si Hanna et les enfants attendront l'été, Koivu, lui, mettra le cap sur Montréal après avoir affronté les Maple Leafs, ce soir à Toronto. Mais le compte à rebours est amorcé vers des retrouvailles qui s'annoncent émotives.

«J'espère que ce sera aussi sobre que possible. Je ne veux pas que l'on fasse un grand plat avec mon retour. Le Canadien a déjà tout fait pour moi, je n'ai plus rien à attendre de lui.»

Koivu est au moins en droit de s'attendre à un accueil chaleureux!

Dix-huit mois se sont écoulés depuis son départ et la poussière est retombée. C'était le temps que cela prenait, d'un côté comme de l'autre, pour évacuer tout ressentiment.

Au final, il ne devrait subsister que le souvenir d'un battant dont la longévité comme capitaine reflète l'engagement qu'il a eu envers l'équipe.

«La relation que j'ai tissée avec les amateurs de Montréal est spéciale, évoque le centre de 36 ans. Avec tout ce qui s'est passé en dehors de la patinoire, ce à travers quoi je suis passé ainsi que les blessures, ce n'est pas le genre de lien que l'on voit souvent.

«Les fans de Montréal sont des connaisseurs et je crois qu'ils respectent et apprécient les gars qui donnent tout ce qu'ils ont et qui ne lâchent pas.»

Plus respecté qu'aimé

Ce sont des connaisseurs, certes, mais aussi des passionnés. Des gens qui s'entichent de la flamboyance, du style et du spectacle.

Est-ce la raison pour laquelle on a cette impression que Koivu a davantage été respecté qu'aimé? «Je ne me suis jamais considéré comme un joueur spectaculaire, répond-il. Je ne suis pas un grand manieur de rondelle, je dois bûcher pour arriver à mes fins.

«C'est comme ça que je me perçois, et je pense que les fans du Canadien me voyaient comme ça aussi. En définitive, obtenir leur respect, c'est ce que j'ai cherché à faire.»

Koivu n'oubliera jamais l'accueil que le public lui a réservé au retour de sa victoire contre le cancer, en avril 2002. Ni de la ville qui s'est enflammée à chaque fois qu'il a haussé son niveau de jeu à chaque présence en séries.

«Mon seul regret, c'est de ne pas être allé plus loin en séries éliminatoires et d'avoir eu une chance de gagner la Coupe, confie d'ailleurs le Finlandais. Ce n'est pas injuste, ça vient avec le sport. Mais c'est dommage que nous n'ayons pas eu une équipe compétitive durant les années où j'ai été là...»

Des remises en question

Si «Capitaine Courage» avait pu changer le cours de l'histoire, obtenir plus de succès en séries n'est pas la seule chose qu'il aurait faite différemment.

«Peut-être que je parlerais couramment le français, lance Koivu avec un sourire gêné.

«J'ai toujours dit que je comprenais ce qui motivait les gens (à réclamer qu'il apprenne le français) et je sais aussi que j'ai été suffisamment longtemps à Montréal pour apprendre. Mais tout cela est derrière moi maintenant et nous n'avons plus à y revenir.»

La question du français est revenue tout au long de son règne de capitaine. Comme la mise en doute périodique de son leadership, d'ailleurs.

«Dans un gros marché comme Montréal, lorsque l'équipe connaît du succès, on te considère automatiquement comme un bon leader. Quand tu gagnes, c'est plaisant de se promener au centre-ville et de sourire à tout le monde.

«Or, c'est un sport d'équipe. Ce ne sont pas juste un ou deux joueurs qui font gagner ou perdre...»

Le legs

S'il juge avoir fourni une contribution sur la patinoire par son honnêteté au travail et sa constance, c'est la mise sur pied de sa fondation dont Koivu se dit le plus fier.

«Le hockey n'est qu'un jeu, rappelle-t-il. Les buts et les mentions d'aide sont là, mais ils finissent par disparaître de ta vie. Tandis que marcher dans un hôpital où ton nom est affiché, voir des gens utiliser le Tep-scan, ce sont des choses qui resteront beaucoup plus longtemps.

«Il n'y a pas que moi qui en bénéficie, mais aussi plusieurs personnes que je n'ai jamais vues et à qui je n'ai jamais parlé de ma vie.»

Nerveux dans l'ombre

Koivu attend le match de samedi depuis longtemps. Il a hâte de revoir l'édifice, les gens qui y travaillent, les visages connus au sein du Canadien...

Et il sait déjà quand il aura le plus de fourmis dans les patins.

«Ce sera durant les hymnes nationaux et que les lumières auront été tamisées. Quand je jouais pour le Canadien, c'est à ce moment-là que je rentrais vraiment dans mon match. C'est là qu'on sent la tension monter jusqu'au plafond.

«Un tas de choses vont me passer par la tête.»

Les yeux levés vers des bannières qu'il a longtemps contemplées mais qu'il n'a jamais hissées, Koivu pourra quand même se dire qu'il revendique quelques «fleurons glorieux».