On pourra toujours accuser Jacques Martin d'avoir un système de jeu éteignoir qui ne valorise pas la créativité. Or, en première moitié de saison, c'est lorsque les joueurs en sont sortis que tout s'est écroulé.

Un joueur comme Michael Cammalleri, qui n'est pourtant pas un as de la défense, prétend être vendu à ce système dans lequel une défense efficace permet de générer de l'attaque. Même si ça ne donne pas le jeu le plus excitant à regarder, il est difficile de le contredire.

En début de saison, l'équipe était étanche en défense, elle était la plus productive à forces égales. Avant le match du 12 décembre à Detroit, Carey Price affichait une moyenne de 1,92 et un taux d'efficacité de ,936. Devant lui, l'équipe avait marqué 14 buts de plus à cinq contre cinq qu'elle n'en avait accordé.

Dans les 12 matchs qui ont suivi, le Tricolore a marqué 13 buts à cinq contre cinq et en a permis 27. Du coup, depuis le 12 décembre, Price affiche une moyenne de 3,55 et un taux d'efficacité de ,870...

Quelque part, le respect du système a fait défaut.

Le système de jeu de Jacques Martin mise sur la vitesse, la transition rapide et la pression exercée sur l'adversaire qui est en possession de la rondelle afin de créer des revirements et de générer de l'attaque.

Mais dans ce jeu basé sur la contre-attaque, le moment le plus dangereux est le passage de l'attaque à la défense. Et c'est là que le Canadien s'est montré le plus vulnérable. Les revirements et les surnombres lui ont coûté cher.

Pour que ce système exigeant soit efficace, les joueurs doivent demeurer fringants de façon à exercer, d'un côté, un bon échec-avant et, de l'autre, une bonne pression arrière.

Il y a manifestement eu des problèmes d'exécution sur ce plan.

L'oeuf ou la poule

Ce que le récent voyage du Tricolore a aussi mis en lumière, ce sont les problèmes causés par l'indiscipline.

Heureusement que le Canadien présente la meilleure unité d'infériorité numérique de la Ligue, car il vient au troisième rang du circuit pour le plus grand nombre de supériorités numériques offertes à l'adversaire. Personne n'a semblé remarquer, par exemple, que Roman Hamrlik occupe le sixième rang de la Ligue pour le nombre de pénalités mineures...

La fatigue et l'indiscipline, c'est un peu l'oeuf ou la poule: on est pris en défaut parce qu'on est fatigué, et on se fatigue à force de se défendre!

Le Tricolore a gaspillé des énergies de cette façon et tout le monde en a payé le prix.

La fatigue touche les petits attaquants de l'équipe, à commencer par Tomas Plekanec, qui gagnerait à voir des joueurs de second plan lui prêter main-forte en infériorité numérique.

Le trio de Plekanec a perdu de son mordant alors même que celui de Scott Gomez commence à trouver ses repères. L'inaptitude du Canadien à avoir deux trios productifs en même temps réduit d'autant ses chances de victoire, surtout à l'étranger, où l'adversaire a droit au dernier changement de joueurs.

Soit dit en passant, les ennuis offensifs à l'étranger sont un problème de plus que devra résoudre Jacques Martin en deuxième moitié de saison. Un cas d'espèce: le capitaine Brian Gionta, qui a pourtant offert une production semblable sur les patinoire adverses et au Centre Bell l'an dernier. À l'étranger cette saison, il n'a que quatre buts et six points en 20 matchs...

Vivement l'arrivée de Wisniewski

La fatigue, on la constate aussi à la ligne bleue, où Roman Hamrlik, Jaroslav Spacek et Hal Gill ne rajeunissent pas. L'arrivée de James Wisniewski n'aidera pas seulement l'avantage numérique, mais permettra aussi de confier d'importantes minutes d'utilisation à des jambes plus fraîches.

Devant le filet, la fatigue commence aussi à rattraper Carey Price. Le gardien n'a pas fait dans le dernier mois le genre d'arrêt qui change le cours d'une rencontre. On peut évidemment regarder le rendement des joueurs devant lui pour expliquer sa fiche, mais il faut aussi se tourner vers la direction.

Si elle avait embauché un gardien substitut en qui elle aurait vraiment eu confiance, on n'aurait pas surtaxé Price de la sorte.

Certes, le système de jeu de Martin ne favorise peut-être pas la créativité des Cammalleri, Gomez, Andrei Kostitsyn et P.K. Subban. Mais les résultats du début de saison suggèrent qu'ils feraient bien de s'y conformer.

En même temps, c'est aussi à l'entraîneur de s'ajuster en fonction des effectifs qu'il a sous la main. Martin est reconnu comme un entraîneur qui fait d'abord et avant tout confiance à ses vétérans. Mais si l'équipe a manqué d'énergie dans le dernier mois, Martin doit trouver un équilibre afin de ne pas surtaxer ces mêmes vétérans qu'il veut garder de son bord.

Chose certaine, les fans qui réclament son départ devraient en faire leur deuil.

Le Tricolore a beau vivre un creux de vague, on est très loin de l'épisode du bowling sous Guy Carbonneau...