N'eut été de l'ambiance bon enfant qui régnait dans le vestiaire du Canadien après sa victoire de 7-2 aux dépens des Hurricanes de la Caroline, n'eut été du large sourire qu'arborait P.K. Subban, on aurait juré qu'une violente bagarre était sur le point d'éclater.

«Tu es un véritable pourri», s'est exclamé Subban, qui revenait couvert de sueur du gymnase comme s'il avait des comptes à régler. Il en avait: «Tu es pourri jusqu'à la moelle. Va vite te laver, car tu sens jusqu'ici», que Subban a rajouté en regardant Carey Price droit dans les yeux.

Sauf qu'au lieu d'avoir les poings fermés, Subban enlaçait affectueusement son gardien en lui tripotant le «bas du dos» tout en disant à quel point il avait les fesses bénies des dieux.

Ce débordement d'affection était relié à un arrêt qui pourrait confirmer la place de Price parmi les étoiles de la dernière semaine dans la LNH. Un arrêt qui pourrait se hisser parmi les plus beaux de la saison tant il fut magistral. Un arrêt du désespoir que Price a réalisé aux dépens de Chad LaRose, qui venait de tirer dans une cage déserte que Price a remplie soudainement en déployant sa grosse mitaine et en captant la rondelle qui s'apprêtait à franchir la ligne rouge.

«Un arrêt chanceux», s'est contenté de dire Price.

Tout un contraste

Devant le débordement d'affection de son nouveau complice, Price s'est permis un sourire. Un sourire déformé par la motte de tabac à chiquer qu'il venait de glisser dans sa bouche. Mais un sourire quand même.

On était loin, très loin, du retour tumultueux au vestiaire qui avait suivi une défaite de 4-3 en prolongation aux mains des Blues de St.Louis.

Vous avez oublié? C'était le 20 janvier. Le Canadien venait de perdre pour la septième fois en neuf matchs. Une erreur d'Andrei Markov avait offert aux Blues le but égalisateur.

Les deux coéquipiers se sont pris aux cheveux. Derrière le mutisme normal qui suit toujours une prise de bec dans le vestiaire, seul un tableau fracassé, à une distance de bâton du casier de Carey Price, témoignait de la tension qui étouffait alors le Canadien. De la perte de confiance évidente que les joueurs affichaient alors à l'endroit de Carey Price. Après ce rififi, Price n'a d'ailleurs disputé que sept des 31 derniers matchs de la saison régulière. Et c'est du banc qu'il a aussi suivi les exploits de Jaroslav Halak en séries.

Chanceux ou non, l'arrêt qui a soulevé des partisans déjà gavés de buts au Centre Bell samedi - et transformé P.K. Subban en meneuse de claques - n'a fait que couronner une autre soirée remarquable de Price, sans qui le Canadien ne serait jamais sorti de la première période avec une avance de 2-0. Un arrêt qui ne fait que confirmer la tenue brillante du gardien à qui on promettait l'enfer bien plus que le paradis à l'aube de la saison.

Markov retourne en enfer

L'enfer promis à Price, c'est Andrei Markov qui s'apprête à y retourner. En fait, il y est peut-être déjà. L'as défenseur s'est blessé au genou droit samedi après une collision avec le capitaine des Hurricanes, Eric Staal. Eh oui! Le même genou qui avait cédé en séries le printemps dernier contre Pittsburgh. Le même genou que Markov s'est fait «reconstruire» et qui a retardé de 10 matchs son début de saison. Un genou qu'il faudra peut-être faire reconstruire à nouveau.

Rien n'est confirmé pour l'instant. Les résultats des examens effectués hier seront analysés, révisés, soumis à d'autres yeux afin de déterminer l'étendue des dégâts, les moyens à prendre pour les réparer et la durée de son absence.

Mais en quittant le Centre Bell samedi, escorté qu'il était d'Andrei Kostitsyn qui l'a reconduit à la maison, Andrei Markov a indiqué à un collègue qui l'attendait qu'il aurait bien du temps libre au cours des prochains mois pour répondre à toutes ses questions.

Le Canadien s'est bien tiré d'affaire sans Markov en début d'année. Mais s'il doit se passer de lui pour longtemps, voire très longtemps, P.K. Subban n'aurait pas dû envoyer Price aux douches après le match de samedi...