Andrei Kostitsyn ne sera jamais canonisé. Cela n'a rien à voir avec sa foi. Mais bien plus avec le fait qu'il a été un brin timide côté miracles en comparaison avec le vrai frère André que le pape Benoît XVI a élevé au rang de saint, hier matin à Rome.

Kostitsyn ne sera donc jamais un saint. Et à moins qu'il ne se mette à multiplier les miracles, son chandail ne flottera jamais dans les hauteurs du temple du Canadien non plus.

Mais à défaut de donner à ses disciples la force intérieure nécessaire pour grimper, une à une, et sur les genoux, les marches menant à l'oratoire Saint-Joseph, l'autre frère André pourra, s'il continue à jouer comme il le fait depuis le début de la saison, faire grimper, deux par deux, les marches des gradins du Centre Bell par des partisans qui ne voudront rien manquer de ses prouesses.

S'il maintient le rythme, Kostitsyn pourrait même finalement être acclamé au lieu d'être maudit par ceux, et ils sont nombreux, qui en veulent encore au Canadien de l'avoir préféré aux Jeff Carter, Dustin Brown, Zach Parise, Ryan Getzlaf, Patrice Bergeron et autres attaquants de premier plan repêchés après lui en 2003. Sans oublier les défenseurs Brent Seabrook et Shae Weber qui auraient aussi pu le devancer à Montréal.

L'un des grands responsables de la victoire de 4-3 aux dépens des Sénateurs d'Ottawa, samedi, Kostitsyn a été élu première étoile du match.

Habituellement renfrogné, le frère André est alors sorti de sa bulle. Il ne s'est pas contenté de donner deux coups de patin avant de retraiter au vestiaire. Que non! Il a traversé la glace pour aller lancer une rondelle dans un groupe de partisans survoltés de l'autre côté de la baie vitrée.

Une sortie à l'image de la partie qu'il venait de disputer.

Son but, celui qui créait l'égalité 3-3 en fin de deuxième valait, à lui seul, une place au sein des étoiles. Avec sa force, sa vitesse et la précision de son tir, Kostitsyn a foncé dans l'enclave d'où il a projeté la rondelle dans la lucarne.

Et s'il est évident que Jacques Martin, ses joueurs et les partisans du Canadien voudraient tous voir Kostitsyn tirer plus souvent, le frère André se rend utile de plusieurs façons après cinq matchs cette saison. Il frappe, il gagne des batailles pour des rondelles perdues, il fonce au filet et crée des jeux qui sourient à ses partenaires.

C'est sur un retour accordé après une de ses nombreuses poussées vers Brian Elliott que Tomas Plekanec a marqué le but de la victoire.

Quête de contrat et de nouveaux amis

Affichant un sens de l'humour qu'il camoufle habituellement très bien, Jacques Martin n'avait sans doute pas tout à fait tort lorsqu'il a indiqué, après le match, que le fait que Kostitsyn en était à sa dernière année de contrat servait de source de motivation.

Mais ses compagnons de trio ont montré du doigt le départ de son petit frère Sergei comme autre élément favorisant l'épanouissement de l'aîné.

«Il a changé. Il est plus engagé. Je reçois même des textos de sa part de temps en temps. Dans un anglais très correct. Maintenant qu'il est seul, il n'a pas le choix. Il doit s'ouvrir. C'est bon pour lui. Et ce qui est bon pour lui l'est aussi pour l'équipe, car ce gars a tout le talent du monde. Il est fort comme un ours, il est rapide, il a l'un des meilleurs tirs de la Ligue. J'aimerais qu'il réalise à quel point il est bon et à quel point il pourrait aider cette équipe à se rendre où elle veut aller», a témoigné Michael Cammalleri après la victoire.

«Même s'il est très solide physiquement, Andrei affiche une confiance fragile. Il a besoin de sentir qu'il profite de l'appui de tout le monde. À commencer par celui des entraîneurs. On le sent détendu depuis le début de l'année. Ça paraît dans sa façon d'être. Ça se reflète dans sa façon de jouer», a ajouté Tomas Plekanec.

Cinq matchs ne font pas une saison. Mais après cinq parties, le frère André affiche deux buts, quatre points et 16 tirs au filet. Ses compagnons de trio et lui totalisent six buts, 12 points et 36 tirs.

On est encore loin de la canonisation, mais on se rapproche de l'état de grâce...