Jacques Martin était le moins tendu des hommes quand je l'ai retrouvé un peu avant 16h hier.

Il venait de faire un petit somme d'une trentaine de minutes et il se sentait prêt à attaquer le match. «C'est le fun, c'est excitant. C'est le meilleur moment de la saison», a-t-il lancé en souriant au détour d'une question.

Excitante mais agréable, cette journée de match déterminant, parce que le gros du travail avait déjà été fait la veille. «En réalité, j'ai commencé à travailler dès la fin du match de samedi à Pittsburgh. Dimanche matin, j'étais au bureau vers 7h pour visionner le match avec Mario Leblanc et le découper pour les réunions avec mes assistants et les joueurs», a dit Martin.

La réunion a eu lieu vers 11h. Les unités spéciales, les points spécifiques, tout ce qu'il faut savoir avant un match. Ce travail s'est poursuivi jusqu'en fin d'après-midi. «Et en soirée, pour me détendre, j'ai regardé le match entre Chicago et Vancouver», a ajouté l'entraîneur en souriant.

«J'ai très bien dormi. Ce matin (hier matin), c'était plus détendu. J'ai préparé les réunions, puis on a regardé la pratique des Penguins. Ça nous donne une idée pas mal exacte de ce que sera leur alignement pour la soirée. De notre côté, on a rappelé aux joueurs ce qu'ils devaient respecter pour qu'on ait de meilleures chances de victoire», a dit Martin.

Du respect

Quand j'ai rencontré Jacques Martin, il était en short et en t-shirt. Le temps qu'on jase un peu, Geoff Molson est passé dans le corridor, trempé à l'os, revenant de son entraînement.

- Va falloir sortir des millions pour garder Halak, lui ai-je lancé en riant.

- Demande à Jacques, c'est lui le boss, a-t-il répondu... sans s'attarder.

Deux minutes plus tard, tout aussi trempé, c'était au tour de Pierre Boivin de passer dans le couloir. Dans les deux cas, j'ai senti le même respect pour Jacques Martin. Quand un coach amène une bande de négligés à deux victoires d'une finale d'association, on est poli.

Martin était en short et en t-shirt, mais le travail n'était pas terminé. «Vers 17h30, je vais réunir les entraîneurs puis les joueurs pour la dernière réunion. À la fois tactique et de motivation. Il faut toujours rappeler aux joueurs ce qu'ils doivent faire. Le gros du travail, c'est de les convaincre qu'ils peuvent gagner s'ils font ce qu'on leur demande», a dit Martin.

À 17h30, le coach aura deux alignements de départ pour le match. Un avec Hal Gill et un autre sans son grand défenseur. «Je ne saurai pas avant la période de réchauffement quel alignement on aura. Si Gill peut jouer ou s'il ne peut jouer, tout le monde s'ajustera», a-t-il fait savoir.

Jacques Martin aura rempli sa mission: il a pris des joueurs qui ne se connaissaient pas et il les a convaincus de se souder en une équipe homogène. Il aura eu besoin d'une soixantaine de matchs pour y parvenir. Il hoche la tête en acquiesçant. «Le hockey, c'est une business de personnes, d'êtres humains. Plus tu as de belles personnes dans ton groupe, plus tu peux atteindre le succès».

Il était bien tranquille en énonçant cette vérité qu'on oublie trop souvent. Une équipe, ce sont des hommes qui doivent s'oublier pour favoriser le groupe. Et c'est extrêmement difficile dans une industrie qui verse des dizaines de millions aux vedettes individuelles.

Mais Jacques Martin a déjà été prof, il ne faudrait pas l'oublier.