Il régnait un silence d'enterrement hier matin dans le vestiaire des Devils du New Jersey lorsque le directeur général Lou Lamoriello a annoncé aux joueurs que l'entraîneur Jacques Lemaire démissionnait.

«Tout le monde se regardait, personne ne parlait, c'était surprenant, a raconté hier au bout du fil l'attaquant Pierre-Luc Létourneau-Leblond. Il y a certaines rumeurs qui couraient dans l'équipe depuis quelques jours, mais j'étais convaincu qu'il avait un contrat de deux ans et qu'il resterait.»

Lemaire, 64 ans, a expliqué hier aux journalistes du New Jersey que l'élimination hâtive de l'équipe, dès la première ronde contre les Flyers de Philadelphie, n'avait pas eu d'incidence sur sa décision. Il affirme plutôt qu'il n'avait plus l'énergie nécessaire pour un horaire aussi rigoureux.

«J'ai commencé à songer à la retraite à ma dernière année au Minnesota (l'an dernier), a mentionné Lemaire aux collègues de la région de New York. Puis, Lou est venu me rencontrer chez moi à Montréal l'été dernier pour me demander si je voulais diriger de nouveau une équipe. J'ai regardé le club, l'organisation, et je me suis mis à m'emballer parce que je suis un passionné du hockey et de mon métier. En plus, j'avais déjà travaillé avec Lou, j'étais familier avec ses méthodes. Je croyais que nous avions de bonnes chances de faire un bon bout de chemin en séries éliminatoires.»

Lemaire a admis qu'il avait eu des pannes d'énergie à certains moments depuis deux hivers. «J'ai recommencé à m'entraîner cette année pour la première fois en 10 ans et je me sentais beaucoup mieux, mais je rentrais de voyage, parfois de courts voyages dans l'Est, et j'étais fatigué quand même. Je devais me coucher plus tôt pour être à mon maximum le lendemain. Mais dans l'ensemble, je me sentais plus en forme cette saison qu'à ma dernière au Minnesota.»

Létourneau-Leblond affirme qu'il n'a jamais senti d'exaspération ou de lassitude de la part de son coach pendant la saison. «Je cherche encore à comprendre. Après 40 ans dans le hockey, avec toute sa passion, j'imagine qu'il était rendu là dans sa vie. L'élimination rapide a peut-être été l'élément déclencheur. C'est dommage parce que j'aurais voulu qu'il soit là un an de plus.

« J'en avais encore beaucoup à apprendre de lui. C'est le meilleur enseignant que j'ai eu. On lui a reproché d'avoir utilisé la trappe, il l'a peut-être fait il y a plusieurs années quand les Devils ont gagné la Coupe Stanley, mais on ne jouait pas la trappe cette année. On avait une équipe excitante. Avec la fin de l'accrochage, on ne peut plus jouer la trappe. Jacques est toute une tête de hockey et il évoluait constamment.»

Lemaire n'a pu annoncer la nouvelle directement à ses joueurs. «J'ai essayé d'en parler à mes adjoints et je suis devenu émotif, a raconté l'entraîneur. Alors, Lou l'a fait pour moi avec les joueurs.»

C'était devenu de notoriété publique au New Jersey que la relation entre Lemaire et son capitaine Jamie Langenbrunner s'était refroidie. Lamoriello a aussi senti le besoin pendant la série contre les Flyers de mettre son nez dans le vestiaire et d'enguirlander ses joueurs. Faut-il y voir des facteurs supplémentaires pour expliquer la décision de Lemaire?

«Il en aurait fallu plus pour qu'il lâche l'équipe, a dit Létourneau-Leblond. Les Devils, c'est une grande famille. Si quelque chose ne fonctionnait pas, ils se seraient assis pour régler le problème.»

Lamoriello a annoncé vendredi le retour de Lemaire, mais a appris que celui-ci allait démissionner en le rencontrant pendant le week-end. Lemaire continuera à travailler pour les Devils dans un rôle à déterminer. Le DG des Devils se cherchera donc un entraîneur pour la cinquième fois depuis le lock-out en 2005 après Larry Robinson, Claude Julien, Brent Sutter et Lemaire.

Lemaire a mené les Devils à une fiche de 48-27-7 en saison régulière, mais l'équipe n'a plus affiché la même constance en deuxième portion du calendrier.