Le jeune gardien Cédrick Desjardins fait tourner bien des têtes à Hamilton. Ignoré au repêchage de la LNH il y a quelques années avant d'être embauché par le Canadien à titre de joueur autonome en juillet 2006, l'ancien gardien de l'Océanic de Rimouski, puis des Remparts de Québec, offre des performances extraordinaires depuis quelques semaines dans la Ligue américaine.

Desjardins a accordé un maigre but à ses quatre derniers départs, et seulement deux à ses cinq derniers. Il est venu à un but de battre le record de la Ligue américaine de 1957 appartenant à Johnny Bower pour le plus grand nombre de minutes consécutives sans accorder de but.

Ses statistiques parlent d'elles-mêmes: fiche de 8-4-1-4, moyenne de buts alloués de 1,45 et taux d'arrêts de 94,4%, ce qui lui confère le deuxième rang chez les gardiens de la Ligue américaine derrière Brent Krahn, un choix de première ronde des Flames de Calgary en 2000. L'espoir des Kings de Los Angeles, Jonathan Bernier, n'est pas très loin derrière avec une moyenne de 1,96.

Les exploits de Desjardins, 24 ans, sont remarquables puisque ce gardien originaire d'Edmundston, au Nouveau-Brunswick, a souvent eu à combattre les préjugés.

«Partout où il est passé, Cédrick était d'abord le gars qui n'est pas supposé réussir, le gars à qui on donne une chance par défaut, a confié hier l'entraîneur des Bulldogs, Guy Boucher. Avec l'Océanic de Rimouski, il était notre troisième gardien au début. Puis, il est devenu notre deuxième et ensuite notre premier. Mais on ne croyait pas pouvoir gagner avec lui comme premier gardien et on en a acquis un de 20 ans. Sauf qu'il a été meilleur que lui et on a gagné la Coupe du Président et atteint la finale de la Coupe Memorial. C'était l'année de Crosby et Cédrick avait été incroyable dans les séries éliminatoires.»

Ça n'allait pas être son dernier championnat...

«L'année suivante, nous étions en reconstruction et Québec avait besoin de lui, poursuit Boucher. Il a gagné la Coupe Memorial. Puis quand il est passé chez les pros, il a gagné le Championnat dans la Ligue de la Côte Est.»

Pourquoi alors Cédrick Desjardins n'a-t-il jamais eu la reconnaissance qu'il méritait? «Ce n'est pas un gardien imposant ou grand qui a des habiletés naturelles. Mais il a du chien. Il est extraordinaire sur le deuxième ou le troisième tir. Il sort des lapins de son chapeau. À un moment donné, tu es sûr qu'il est battu et il l'arrête. Et ce n'est pas de la chance. Il est extrêmement rapide et athlétique.»

Boucher et ses adjoints ont cependant eu à peaufiner le jeu de Desjardins. «C'est moi qui m'occupais de son approche psychologique à Rimouski (à titre d'adjoint à l'entraîneur). Alors, comme je le connaissais déjà, nous avons gagné du temps. On a travaillé sur sa patience. La grande différence entre le pro et le junior ou la Ligue de la Côte Est, c'est que le premier lancer devient beaucoup plus important. Dans le junior, le premier lancer est plus facile à arrêter parce qu'il est moins fort. Dans le pro, il est décoché sans avertissement. Les gardiens qui ont plus de difficulté chez les pros sont ceux justement qui ont de la difficulté à arrêter le premier tir. Ce que Cédrick a dû apprendre, c'est de penser au premier tir avant de penser à celui qui allait suivre parce que lui, il avait tendance à prévoir ce qu'il aurait à faire sur les retours. Il est maintenant bien concentré sur le premier lancer et tout aussi agressif sur le deuxième et le troisième.»

Même si Desjardins a disputé la majorité des matchs des Bulldogs récemment, Guy Boucher ne veut pas identifier de gardien numéro un au sein de son équipe. «Je ne veux pas parler de ça parce que (le vétéran) Curtis Sandford a toute une année lui aussi. Sauf qu'il a eu un bébé récemment, il a manqué quelques entraînements et ça été un peu plus dur pour lui. On a deux gardiens de premier plan. On n'a pas séparé le temps de glace de façon égale dernièrement parce que Desjardins était sur une lancée qu'on ne voulait pas interrompre, mais on va reprendre le système d'alternance.»

Boucher préfère ne pas juger les chances de voir Desjardins dans l'uniforme du Canadien à court, moyen ou long terme pour ne pas nuire à la concentration de celui-ci. «Il doit continuer à penser uniquement au match suivant, pas à ce qui arrivera dans deux semaines, dans six mois ou encore qui sera le numéro un à Hamilton. Notre but est évident, on veut voir nos joueurs atteindre la Ligue nationale. Mais Cédrick a toujours fait les choses par étape. Pour l'instant, il doit démontrer qu'il a la constance pour être un gardien numéro un dans la Ligue américaine.»