Rares sont les événements historiques, découvertes et autres innovations dont l'attribution n'a pas été contestée.

Ainsi, le père du télescope est-il Galilée, l'Anglais Thomas Harriot, Marin Marsenne ou quelqu'un d'autre? George Mallory avait-il précédé Sir Edmund Hillary et le sherpa Tensing Norgay de trois décennies au sommet de l'Everest? Et que dire des aviateurs français Charles Nungesser et François Coli, à qui plusieurs attribuent la première traversée de l'Atlantique sans escale avant Charles Lindbergh (ils sont disparus avant d'arriver à destination).

Dans le cas de Jacques Plante, personne ne contestera que son geste du 1er novembre 1959 a ouvert une nouvelle ère dans l'histoire du hockey nord-américain. Mais des prédécesseurs portant le masque, Jacques Plante en a eus. Dont une femme!

 

Elizabeth Graham

Elizabeth Graham était gardienne de but de l'équipe féminine de hockey de l'Université Queen's de Toronto, lorsqu'elle s'est présentée avec un masque à un match en février 1927. L'histoire dit qu'elle venait de recevoir des traitements dentaires et que son père insistait pour qu'elle porte un masque d'escrime afin de se protéger.

Clint Benedict

Évidemment, le précurseur le plus connu de Plante est Clint Benedict, ce gardien de but des Maroons de Montréal qui a porté un très curieux masque de cuir durant quelques matchs en février et mars 1930.

Comme dans le cas de Plante, la décision de Benedict faisait suite à une blessure. Le 7 janvier 1930, alors que les Maroons disputaient la victoire au Canadien, le gardien a reçu un lancer du célèbre Howie Morenz en plein visage. Résultat: nez cassé. Il est revenu au jeu le 20 février portant un masque de cuir. Son but était de protéger son nez, le temps que guérisse sa blessure.

À l'époque, le geste a fait son effet. Lorsque les Maroons ont joué au Forum contre Chicago, le 25 février 1930, Benedict était masqué. La Presse en a fait part dans la livraison du lendemain, affirmant qu'il «portait un masque de cuir dans la figure».

Mais dans un autre match disputé le 4 mars contre Ottawa, il a été à nouveau blessé au visage en dépit de son masque. La saison 1929-1930 a été sa dernière dans la LNH. Il a joué une saison de plus avec les Bulldogs de Windsor (IHL) avant de prendre sa retraite. Cette année-là, il a joué sans masque, estimant que le protecteur nasal lui obstruait la vision.

Teiji Honma

Aux IVes Jeux olympiques d'hiver à Garmisch-Partenkirchen, en Allemagne (1936), le gardien de but de l'équipe de hockey du Japon, Teiji Honma s'est présenté avec un masque afin de protéger ses larges lunettes rondes.

Une photo d'époque montre que son masque ressemble à celui d'un receveur du baseball majeur. Il est fait d'une espèce de cage cerclant la tête et d'un grillage métallique devant le visage.

Le Japonais n'était cependant pas le premier car quatre ans plus tôt, aux Jeux d'hiver de Lake Placid dans l'État de New York, le gardien de but de l'équipe américaine, Franklin Farrell, a porté un masque très rudimentaire fait d'épais fils de broche, pour protéger ses lunettes. Les États-Unis ont remporté la médaille d'argent du tournoi de hockey. Il faut dire qu'il n'y avait que quatre équipes, dont le Canada, qui a décroché la médaille d'or.

Un autre gardien originaire de Winnipeg, Roy Musgrove, portait un masque semblable à celui de Farell alors qu'il jouait avec les Lions de Wembley de la British National Hockey League, à la fin des années 30.