Le Québec éprouve un sérieux problème à développer des jeunes joueurs d'élite pour la Ligue nationale de hockey, a reconnu jeudi le président du Canadien de Montréal, Pierre Boivin, en refusant toutefois d'attribuer une partie du blâme à son organisation.

«La diminution du nombre de joueurs québécois dans la Ligue nationale soulève plusieurs questions légitimes quant aux efforts que nous devons tous faire pour développer nos jeunes joueurs», a déclaré M. Boivin dans un discours prononcé à un colloque organisé par la Fédération des chambres de commerce du Québec.

«Je pense que le problème est un peu plus large que les efforts du Canadien», a-t-il ajouté.

«Au Québec, on a un problème dans le développement de joueurs de hockey élite (...). Et ça, ça se voit dans le déclin du nombre de joueurs québécois qui ont accédé à la Ligue nationale dans les 20 dernières années, que ce soit en absolu ou en pourcentage.»

Pour trouver des solutions, M. Boivin a tout bonnement proposé de tenir un «symposium» qui regrouperait les intervenants du monde du hockey au Québec, dont le Canadien.

Il a rappelé qu'il y a plusieurs années, dans la foulée des nombreux revers de l'équipe nationale, tant aux Jeux olympiques qu'aux Championnats du monde, les bonzes du hockey canadien, dont Wayne Gretzky et Ken Dryden, avaient tenu à Toronto un important symposium. Il en était ressorti un plan de développement qui a donné des résultats probants.

Pour le retour des Nordiques

Pierre Boivin a soutenu que le retour éventuel d'une équipe de la LNH à Québec permettrait de régler le problème en bonne partie, puisqu'il encouragerait plus de jeunes à jouer au hockey.

Le Canadien ne s'oppose pas au rêve du maire Régis Labeaume, a par ailleurs indiqué M. Boivin. Si l'Alberta peut faire vivre deux clubs de la LNH, le Québec le peut tout autant, a-t-il relevé, en précisant toutefois que le projet n'avait pas encore été «prouvé économiquement».

Armé de statistiques, le président du Canadien a d'autre part qualifié de «mythe» l'idée selon laquelle l'équipe montréalaise «serait insensible» au talent des Québécois francophones.

«Il n'y a aucun esprit de ne pas repêcher des joueurs francophones au Canadien de Montréal et ceux qui véhiculent ça sont des menteurs, des tricheurs et ils ont d'autres «agendas» que de rapporter ce qui se passe dans le vrai monde du sport», a-t-il lâché.

«Il n'y a pas une équipe qui étudie le potentiel des joueurs francophones autant que le Canadien. Il n'y en n'a pas une qui en a autant sous contrat que nous (14 en tout).»

Pierre Boivin a pris à témoin le plus récent repêchage, en juin.

«Il y a probablement bien des équipes qui auraient passé par dessus Louis Leblanc en première ronde», a-t-il fait remarquer.

Reste le problème du faible nombre de Québécois qui se trouvent actuellement dans l'alignement du Canadien, soit quatre.

«Est-ce qu'on est heureux avec trois ou quatre? Non. Est-ce qu'on est satisfaits avec une moyenne de sept sur cinq ans, alors que la moyenne de la ligue est inférieure à deux? Je dirais (que ce n'est) pas mauvais. Est-ce qu'on serait plus heureux avec huit ou neuf, si on gagne? Absolument.»

Le dirigeant a même soutenu qu'il était peu réaliste d'affirmer, comme l'ex-directeur général Serge Savard à une autre époque, qu'on privilégie un francophone «à talent égal».

«Dire ça publiquement, c'est un beau «statement» politique, parce que ce n'est jamais le cas. Ce n'est jamais à talent égal et ce n'est jamais un choix entre un francophone et un anglophone ou un Russe à talent égal. (Il faut tenir compte de) la position, de la taille, de l'expérience et du talent.»

Bob Sirois

En réaction au livre de Bob Sirois, Le Québec mis en échec, M. Boivin a de plus soutenu que les francophones n'étaient pas victimes de discrimination dans la LNH.

«Il n'y a pas un joueur francophone qui a le potentiel de jouer dans la Ligue nationale et qui n'y est pas. La compétition est tellement forte qu'aucun joueur apte à aider l'une des 30 équipes n'est ignoré. C'est absolument impossible.»

Sur la patinoire, Pierre Boivin a répété que les nombreux changements apportés cet été avaient été pour le mieux.

«Il n'y a pas personne ici qui n'est pas convaincu que l'équipe de cette année, avant la blessure (d'Andrei) Markov, est une meilleure équipe que celle de l'année dernière, a-t-il dit. Prenez les huit joueurs qui sont arrivés et comparez-les aux huit joueurs qu'ils ont remplacés: il n'y a pas personne qui n'est pas convaincu qu'au total, on est meilleurs. Après ça, quand tu perds ton meilleur joueur, il faut que tu te réajustes. Il faut que tous ces gens-là apprennent à joueur ensemble.»

Enfin, M. Boivin a assuré que la transaction de vente de l'équipe au consortium dirigé par les frères Molson allait bientôt se conclure.

«C'est dans les mains de la ligue, mais tout va très, très bien et normalement ça devrait arriver à une clôture dans les prochaines semaines», a-t-il expliqué.