La façon dont le Canadien gère le dossier Carey Price suscite la curiosité de trois psychologues du sport à qui nous avons parlé.

D'abord il y a les attentes qui sont énormes. Des attentes qui proviennent de son rang, de la décision d'échanger Cristobal Huet pour lui laisser tout le plancher, et des comparaisons injustes de ceux qui mettaient Price et Patrick Roy dans la même phrase, le printemps dernier.

«Le fait que Price joue un tel rôle à cet âge-là est pressurisant pour lui. C'est tôt dans une carrière», explique Robert Vallerand, professeur de psychologie à l'UQAM.

«On peut faire un parallèle avec Tom Barrasso, qui était arrivé très jeune dans la ligue. Il avait été laissé à lui-même à Buffalo et ça lui avait pris des années à s'en remettre.

«C'est lorsqu'il est devenu plus mature qu'il a eu une deuxième carrière avec les Penguins.»

Nous n'en sommes pas là avec Price, mais le Tricolore se doit de ménager celui qui est considéré comme le joyau de son organisation.

«Ce n'était peut-être pas la meilleure chose de laisser un jeune sans confiance devant le filet pour sept buts, car Price est un athlète en développement», estime Bruno Ouellette, un psychologue sportif ayant beaucoup oeuvré dans le milieu olympique.

«Mais parfois, un coach pose des gestes pour tester l'engagement de ses joueurs et pour leur montrer que, pour aller jusqu'au bout, il va falloir que ça chauffe...»

Un partage d'expérience Price n'a remporté que deux de ses neuf départs depuis qu'il est remis d'une blessure à la cheville. Au cours de cette séquence, il a concédé pas moins de 36 buts.

Le fait que l'alternative se nomme Jaroslav Halak n'est pas une situation idéale, autant pour Price que pour le Tricolore.

«Le Canadien n'est pas coupable d'en avoir fait son numéro un, mais il est coupable de ne pas avoir gardé un adjoint d'expérience pour le seconder», note Gordon Bloom, professeur au département de kinésiologie de l'Université McGill.

«Vous savez, un gardien qui dirait à Price:"je ne suis pas là pour te voler ton job de numéro un, mais ne t'inquiète pas: je vais prendre le flambeau pendant que tu corriges certaines choses".

«Halak ne dira pas ce genre de chose, car il est jeune et il a faim, poursuit Gordon Bloom. Or, Halak n'a jamais vécu la pression d'un gardien numéro un ni celles des séries.» Le départ de Huet a fait mal au Canadien, conviennent les trois psychologues.

«Price profiterait d'avoir quelqu'un qui lui partage sa manière de faire face au stress, convient Robert Vallerand. Et sur le plan technique, un gardien d'expérience pourrait faciliter son apprentissage du «livre» sur les tendances des joueurs adverses.»

Sur le plan psychologique, Bruno Ouellette soupçonne que le récent match des Étoiles a également eu des effets pervers sur Carey Price.

«La confiance se mérite par tes actions, rappelle M. Ouellette. Si on t'a élu sans que tu n'aies d'affaire là, ça peut jouer contre toi. Price peut le ressentir et les autres peuvent aussi lui faire ressentir. Le hockey est un milieu tellement compétitif...»

Melanson est le bon homme

Plusieurs amateurs critiquent l'entraîneur Roland Melanson, sous prétexte qu'il n'a jamais fait progresser les gardiens qu'il avait sous la main.

Or, c'est Melanson qui a bâti de toutes pièces la technique de Huet lorsque ce dernier est arrivé des Kings de Los Angeles. Cela a contribué à répandre sa bonne réputation à travers la LNH.

Sans oublier qu'un certain José Théodore a déjà décroché quelques trophées sous sa tutelle...

«J'ai rencontré Melanson en quelques occasions et il m'a impressionné par ses connaissances et ses aptitudes de mentor, raconte Gordon Bloom. Je crois vraiment qu'il est la bonne personne pour aider Price.»