Ainsi donc, le jeune choix de première ronde des Rangers de New York, Alexei Cherepanov, 183 livres, pratiquait le dopage sanguin.

La nouvelle a fait les manchettes partout, mais elle est disparue aussi rapidement qu'elle est apparue. Le retard des ambulanciers le soir où Cherepanov a subi une crise cardiaque fatale, le 13 octobre dans un aréna de la région de Moscou, a d'ailleurs fait beaucoup plus de boucan.

 

La question de la sécurité dans les amphithéâtres est cruciale - la vie d'un hockeyeur de 19 ans aurait peut-être pu être sauvée ce soir-là -, mais la problématique du dopage l'est au moins autant.

Toute cette histoire m'a fait penser à la publication en 2005 des Mémoires d'un dur à cuire, de l'ancien joueur du Canadien, Dave Morissette.

Je me souviens trop bien des réactions à l'époque. Dave Morissette avait consommé des stéroïdes, mais il constituait un cas isolé. Seuls quelques bagarreurs en faisaient usage puisqu'ils avaient besoin de développer leur musculature.

Dans son témoignage au Congrès, le commissaire de la Ligue nationale, Gary Bettman, avait déclaré que le cas de Morissette n'était pas représentatif de sa ligue puisqu'il avait disputé seulement 11 matchs dans la LNH.

La plupart des joueurs de la LNH ont répondu qu'il n'y avait pas de dopage au hockey parce que ce n'était pas dans la culture de ce sport et que la plupart des joueurs n'avaient pas la carrure des culturistes.

C'est d'ailleurs l'un des arguments utilisés par le Canadien lorsqu'il a défendu son gardien de l'époque, José Théodore, qui avait pris du Propecia, un produit masquant placé sur la liste des substances interdites dont des traces ont été décelées dans l'urine du gardien. Je me souviens encore des sourires à cette conférence de presse: Théodore n'était pas très costaud, donc il n'avait pas du tout le profil du dopé.

Théodore a été disculpé.

Par la suite, d'autres joueurs ont continué à utiliser l'excuse du gabarit plus frêle pour écarter les soupçons. Et on a tout gobé malgré le fait que de nombreux cyclistes, tennismen et joueurs de soccer chétifs ont été convaincus de dopage.

Puis, le défenseur Bryan Berard, d'abord reconnu pour sa finesse et ses prouesses en attaque, s'est fait pincer pour usage de stéroïdes. Cas isolé. Un autre défenseur, Sean Hill, a subi le même sort. Cas isolé.

Nous avons aussi tenté dans Mémoires d'un dur à cuire de mettre en lumière la consommation répandue de stimulants dans le hockey et de ses effets parfois pervers. Coup d'épée dans l'eau.

Rien n'a permis d'établir que les joueurs aux prises avec des problèmes cardiaques ont eu recours au dopage, comme on vient de le faire avec Cherepanov. Mais il y a lieu de s'inquiéter aussi du nombre grandissant de problèmes d'arythmie chez les joueurs de hockey.

La mort de Stéphane Morin sur le banc des joueurs en Allemagne? Cas isolé. La mort de Sergei Zholtok sur le banc des joueurs en Lettonie? Cas isolé. La crise cardiaque presque fatale subie par Jiri Fischer sur le banc des Red Wings de Detroit? Cas isolé.

Le nombre de ces cas aurait au moins dû être assez important pour que la LNH et l'Association des joueurs fassent enquête pour la propre sécurité des joueurs. L'ancien défenseur du Canadien, Stéphane Quintal, est le seul à avoir eu le courage de faire un lien entre sa consommation de stimulants (tels le Sudafed) et ses problèmes d'arythmie.

La LNH a instauré un programme antidopage, mais le système mis sur pied comporte trop de failles pour démasquer les fautifs.

Peut-être Gary Bettman et son entourage veulent-ils éviter d'ouvrir une boîte de Pandore. Ce qu'ils pourraient y trouver ne leur plairait peut-être pas.

Le scandale du dopage au baseball a sali le sport national des Américains. Le Tour de France cycliste a failli mourir à la suite de scandales répétés.

Geneviève Jeanson s'est dopée dèes l'âge de 16 ans pour gagner des courses cyclistes, s'auréoler de gloire et aussi gagner un peu plus de 200 000$ annuellement.

Un hockeyeur allemand, qui n'a aucune chance de percer dans la LNH, s'est mis dans l'eau chaude lors du Championnat mondial en refusant de se soumettre à un test antidopage.

Combien de cas de dopage dans d'obscurs circuits mineurs de hockey, ou même dans nos centres de conditionnement physique?

Et il n'y aurait pas de dopage dans la LNH, alors que des millions de dollars, parfois des dizaines de millions, sont en jeu parce que ce n'est pas dans la culture du hockey?

L'excuse est trop facile. Il est maintenant temps d'agir. Et prière de ne pas parler d'un cas isolé en Russie...