Même s'il refuse de « crier au scandale », le grand chef de la nation atikamekw déplore que les Cataractes de Shawinigan n'aient pas travaillé de concert avec des autochtones au moment de concevoir leur nouvelle image de marque.

« C'est désolant. Peut-être qu'à l'avenir, les gens pourraient travailler avec des autochtones pour mieux comprendre ce que ces symboles signifient », a expliqué Constant Awashish en entrevue avec La Presse. Les communautés atikamekw sont situées en Mauricie, au nord de Shawinigan.

La campagne lancée cette semaine par l'équipe de hockey junior majeur a suscité bien des réactions, les plus virulentes au Canada anglais. On y voit trois joueurs vedettes des Cataractes habillés de ce qui semble être des vêtements traditionnels autochtones, le visage maquillé et la tête ornée de plumes. La nouvelle devise de l'équipe - « Notre histoire, nos couleurs » - est inscrite dans le bas de l'affiche.

La campagne vise à « faire ressortir les racines et les couleurs du club », a expliqué l'équipe mercredi. « Avec un nouveau slogan et des nouvelles images de marque, la saison 2015-2016 des Cataractes ne passera pas inaperçue ! »

Elle n'est, en effet, pas passée inaperçue.

Un texte virulent, moitié article d'information, moitié éditorial, a d'abord été publié sur le site Yahoo ! Sports. La journaliste dénonçait un cas « d'appropriation culturelle ».

La Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ) s'est immédiatement dissociée de la campagne des Cataractes, assurant qu'elle « n'était pas au courant ». L'équipe a défendu son choix, parlant d'un hommage aux autochtones et d'un clin d'oeil à son logo, une tête d'Indien.

Le grand chef atikamekw, lui, comprend la grogne mais ne veut pas en faire tout un plat. Il ne demande pas formellement à l'équipe de retirer ses affiches.

« Leur utilisation du folklore autochtone peut en offusquer certains. Moi, personnellement, je ne suis pas offusqué par ça. Mais ça peut offusquer d'autres gens. »

« La peinture, les couleurs dans le visage, c'était pour la guerre ou des cérémonies. Toutes les peintures ont des significations. Certains, plus traditionalistes, sont encore proches de ces symboles. Ils savent ce qu'ils veulent dire. Ce sont plus eux qui sont heurtés par des choses comme ça, explique le jeune chef. Parce que ça ne représente pas la réalité. C'est hollywoodien. C'est l'image que les gens ont vue à la télé, avec des plumes... »

UNE ÉQUIPE SANS AUTOCHTONE

Plus que tout, Constant Awashish déplore que l'équipe ne compte pas de joueur autochtone. De mémoire, selon lui, le dernier Atikamekw à avoir joué pour le club junior de Shawinigan a été Maxime Quoquochi. C'était en 1970. Ce fait historique n'a pu être confirmé auprès de l'équipe, puisque le responsable des communications n'a pas rappelé La Presse.

Cette année, Kevin Flamand, un Atikamekw de 17 ans originaire de La Tuque, juste au nord de Shawinigan, a été invité au camp du Drakkar de Baie-Comeau dans la LHJMQ. « Il y a un potentiel énorme pour les joueurs autochtones au hockey, dit M. Awashish. Il suffit de faire un effort. »

D'autres équipes donnent une chance aux joueurs autochtones. Les Foreurs de Val-d'Or ont par exemple acquis le Cri Adam Cheezo au troisième tour du dernier repêchage de la LHJMQ.

Constant Awashish espère que tout le bruit autour de cette affaire pourra inciter l'équipe à se rapprocher des communautés autochtones de la Mauricie. « Il y a un côté positif : au moins, on parle de nous autres, dit-il. Des fois, c'est comme si l'Indien n'existait plus. »