Ce fut un des samedis les plus excitants depuis très, très longtemps à Augusta. Après une farandole d'oiselets, bogueys et aigles, Lee Westwood (-12) mène le Tournoi des Maîtres par un seul petit coup sur Phil Mickelson. Tiger Woods et K. J. Choi suivent à quatre coups derrière.

Vendredi soir, Fred Couples et Phil Mickelson se narguaient par texto. Ils ont poursuivi sur le terrain samedi. «Allez, fait quelque chose de bon», lui lançait Couples en le croisant au 14e trou.

Le gaucher venait pourtant de caler un aigle au 13e. Il a quand même obéi à son ami. Deux minutes plus tard, Mickelson calait son approche de 141 verges pour un deuxième aigle consécutif.

À quoi pensait-il alors? «À en faire un troisième», répond-il.

Il a presque réussi. Son approche de 87 verges a dansé autour de la coupe du 15e avant de s'arrêter à deux pieds. Un autre oiselet. Cinq sous la normale en trois trous.

Les cris résonnaient bruyamment entre les pins jusqu'au fond du parcours. Lee Westwood les a entendus. «Non, je n'ai pas regardé sur le tableau pour comprendre. Je me doutais bien de ce qui se passait», justifie l'Anglais.

Peut être déstabilisé par ces cris, il inscrivait au 12e son premier boguey de la journée. Ce fut finalement son seul. Il a tenu bon, signant une carte de 68, sa troisième consécutive sous 70. C'est un bon début. Personne n'a déjà aligné quatre rondes consécutives dans les 60 à Augusta.

À 2h40 dimanche, Westwood entamera donc sa ronde finale en tant que meneur. «Je vais très bien dormir ce soir, assure-t-il. Tout comme j'ai très bien dormi vendredi soir. C'est très agréable d'être meneur. Notre départ est tard, on n'a pas besoin de réveille-matin».

Ce n'est pas la première fois que Westwood est dans le dernier groupe dans la ronde finale d'un majeur. Il jouait avec Tiger Woods dimanche à l'Omnium des États-Unis en 2008 à Torrey Pines.

«Ce n'est pas comparable. Je me sentais beaucoup, beaucoup plus calme qu'à l'Omnium des États-Unis. J'ai pris de l'expérience. Je m'isole dans mon petit monde, où rien ne me dérange. Et mon cadet m'aide aussi à me détendre.»

Tiger s'impatiente 

Tiger, lui, s'impatientait. De son propre aveu, son élan lui déplaisait dans sa période d'échauffement. Ça augurait mal.

Malgré tout, il a bien commencé sa journée, avec deux bombes de 30 pieds pour l'oiselet au 1er et au 3e. Mais il a enchaîné avec un boguey au 4e, puis trois autres au 6e, 7e et 10e trou.

Lundi, il annonçait qu'il serait plus tempéré sur le parcours. Il rageait quand même un peu devant les caméras au 6e. «Tiger Woods, ah you suck!», s'exaspérait-il. On le comprend. Nombre de verts de trois roulés aujourd'hui : trois. Plutôt horrible.

Il peinait à juger la vitesse des verts. Son élan paraissait aussi plus rapide qu'à l'habitude. Pendant ce temps, il voyait ses adversaires accumuler les oiselets. Le soleil brillait, le vent était faible et les verts réceptifs compensaient pour les fanions parfois capricieux.

Après sa ronde, il est retourné dans le terrain d'exercice avec son entraîneur Hank Haney. Il a ensuite pris le temps de signer des autographes à de jeunes partisans.

«C'était une journée très difficile pour moi. Je me suis battu sans arrêt. À un certain point, j'étais sept coups en retard. Mais je n'ai pas lâché, et j'ai ramené l'écart à quatre coups. Avec une bonne ronde demain, on ne sait jamais.»

La tâche sera toutefois difficile. Tiger n'a jamais gagné un tournoi majeur lorsqu'il ne menait pas après 54 trous. Même s'il échoue, il peut se consoler en se disant qu'il a au moins déjà réussi à détourner l'attention de ses histoires personnelles pour qu'on parle de Tiger Woods le golfeur.

Mickelson, lui, parlait avec plaisir de sa famille après sa ronde. Elle l'a rejoint mardi à sa maison louée à Augusta.

«C'est la première fois en 11 mois que mes enfants et ma femme (atteinte du cancer du sein) voyagent avec moi, indiquait-il. Ça me fait beaucoup de bien.»

Photo: AFP