N’ajustez pas votre appareil. Comme le lynx du Biodôme, on croyait lui avoir vu le bout du nez au dernier Tournoi des Maîtres, mais cette fois, il est là pour de bon. Le Brooks Koepka de 2019 est officiellement de retour.

Il n’est pas ressuscité, parce qu’il ne s’était pas vraiment éteint. Il était plutôt en déclin.

Après son impressionnante épopée pendant laquelle il a gagné deux fois le Championnat de la PGA et deux fois les Internationaux des États-Unis entre 2017 et 2019, Koepka est parti en croisade.

Son attitude, confiante, mais arrogante à certains égards, a commencé à déplaire. La fameuse phrase « je m’entraîne seulement pour les tournois majeurs » est devenue célèbre et a contribué à ternir quelque peu son image.

Ont suivi de nombreuses blessures, dont d’importantes au genou, un relâchement sur le plan des victoires, un épisode de la série Full Swing sur Netflix dans lequel il paraît odieux et de commerce fort peu agréable, et, ultimement, cet exode vers la série LIV Golf.

Or, la motivation de Koepka, elle, est demeurée débordante. Son but ? Gagner les tournois les plus prestigieux.

À une certaine époque, il était le golfeur le plus dangereux et menaçant dans les tournois du Grand Chelem.

Entre 2012 et 2021, Koepka a pris part à 30 tournois majeurs. Il en a gagné quatre, a terminé 16 fois dans le top 10 et a raté seulement trois coupures.

Son triomphe en 2019 au Bethpage State Park, l’un des parcours les plus complexes et éreintants des États-Unis, est encore cité parmi les victoires les plus impressionnantes des dernières années.

Le parcours sur lequel est disputé l’actuel Championnat de la PGA, l’Oak Hill, à Rochester dans l’État de New York, a des similarités avec l’autre parcours new-yorkais. Les deux sont ardus, notamment à cause de l’herbe longue, et les erreurs sont impardonnables.

Au terme de la troisième ronde, le joueur de 33 ans pointe au premier rang. « J’aime quand c’est difficile », a-t-il dit, sourire en coin, après sa ronde de samedi.

Comme à l’Augusta National il y a quelques semaines, où il a terminé deuxième, il a le vent dans les voiles après 54 trous. Aux sens propre et figuré.

Tout comme au premier majeur de la saison, dame Nature a fait des siennes. C’était encore pire cette fois. La pluie était abondante et les gouttes étaient lourdes.

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Brooks Koepka attend son tour sous la pluie.

Au cours de la journée, les joueurs ont changé de tenue au moins quatre fois. Lorsqu’il ne pleuvait pas, il ventait. Lorsqu’il ne ventait pas, il faisait froid. Le soleil s’est pointé le bout du nez en milieu d’après-midi, mais une autre cellule de pluie s’est abattue sur les joueurs.

Reste que ceux qui ont pris les derniers départs ont été fortement avantagés et plus épargnés.

Casquettes à l’envers, manteaux de pluie amples, polos, chandails à manches longues. Cette troisième ronde avait des allures de Met Gala.

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Les responsables du terrain s’efforçaient de repousser l’eau des verts à Oak Hill, samedi.

À travers toute cette pagaille météorologique, Koepka a su tirer son épingle du jeu. Hué au premier trou avec son partenaire de jeu Bryson DeChambeau, le meneur a livré une performance sans faille.

Il a été constant sur les verts, comme en ont témoigné ses deux oiselets consécutifs au quatrième et au cinquième trou. Pareil au 17e, où malgré un vert détrempé, il a fait ramper sa balle jusque dans l’objectif, en ligne droite.

Il a finalement remis une carte de 66 pour la deuxième journée de suite pour prendre les devants à - 6.

Dans de telles circonstances, et s’il continue de jouer sans forcer le jeu, Koepka est en excellente position pour ramener chez lui un troisième trophée Wanamaker.

La revanche des bons garçons

Tout allait comme sur des roulettes pour Corey Conners et Viktor Hovland en début de ronde.

Les deux assaillants ont été dans le haut du tableau pour l’entièreté de la journée. Ils n’ont pas commis trop d’erreurs. Cependant, celles qui ont été commises ont été fatales.

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Le Canadien Corey Conners

Le Canadien Corey Conners jouait une ronde sans tache. Ses coups de départs, comme d’habitude, étaient longs et divinement précis. Il a enfilé les normales. Jusqu’à ce que son deuxième coup au 16e, depuis la fosse de sable, fasse à peine dix verges avant de cogner de plein fouet la lèvre de la trappe.

La balle est entrée profondément dans l’herbe longue. Il a dû rejouer un coup et ce double boguey a brisé son élan. Cette erreur de parcours suivait à peine le 15e, où il avait effectué un long roulé pour s’emparer seul de la tête.

Trajectoire similaire pour Hovland. Le jeune Norvégien a connu une ronde en dents de scie, mais il a toujours été en mesure de limiter les dégâts.

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Le Norvégien Viktor Hovland

Après des bogueys au quatrième et au cinquième trou, il a enchaîné avec trois oiselets lors des sept trous suivants. Son jeu court, sa faiblesse d’antan, a à la fois été névralgique en début de ronde, avant d’être misérable à partir du 15trou.

Dans les deux cas, une victoire en tournoi majeur serait méritée et soulignée.

D’un côté, Conners roule sa bosse depuis un bout sur le circuit PGA Tour et il rôde toujours autour des titres, mais il en a seulement deux en carrière. Il a terminé trois fois au sein du top 10 lors des quatre dernières éditions du Tournoi des Maîtres. Personne ne peut parler en mal de ce Canadien calme et peu exubérant.

De l’autre, Hovland est un jeune joueur aux allures de vétéran. Il a terminé dans le top 10 lors de ses deux derniers départs en tournoi majeur. Il est l’un des joueurs les plus appréciés sur le circuit. Néanmoins, même s’il sait tirer son épingle du jeu, son manque de cran, d’aplomb et de constance l’éloigne habituellement du titre lors des dernières rondes. Malgré tout, il garde le sourire.

Les deux joueurs ont remis une carte de 70 et se positionnent à égalité au deuxième rang, à un coup de Koepka.