En une fraction de seconde, Arthur Brault a failli perdre la vue. Il n’avait que 8 ans. Un bête accident qui aurait pu anéantir tous ses rêves. Son regard est maintenant porté vers l’avenir et il sait déjà qu’il veut consacrer le reste de sa vie au golf.

C’est d’abord la pelouse qui l’a charmé. La précision de la coupe. L’odeur de l’herbe fraîchement taillée. C’était en Arizona, lors d’un séjour pendant lequel il accompagnait ses parents, il y a quelques années à peine. C’est là qu’il a touché à ses premières balles. C’est là que sa passion est née.

Arthur s’est présenté au bureau de La Presse, avec sa mère Catherine, un jeudi après-midi, juste après l’école. Il arborait un polo rouge du club de golf Owl’s Head, situé en Estrie, où il évolue.

Arthur a conservé quelques cicatrices de son accident qui sont apparentes au-dessus de son œil gauche. Timide, mais éloquent, le jeune homme de 10 ans se souvient en détail de tout ce qui est arrivé avant l’accident survenu au mois d’août 2020. Quelques jours avant d’entrer en troisième année.

Après être rentré du chalet, il a rejoint ses amis pour jouer aux chevaliers dans la cour arrière. Une clôture séparait les terrains et elle était fréquemment empruntée par ses voisins et lui pour se retrouver. Cette journée-là, dans l’excitation d’un été qui tirait à sa fin, Arthur suivait son ami et en passant la clôture, ce dernier lui a refermé la porte en plein visage. Le crochet de métal qui sert à verrouiller la clôture a terminé son chemin dans l’œil d’Arthur. Il est tombé sur le dos et a été victime d’une commotion cérébrale sur le coup.

« J’avais peur. Surtout à cause de la réaction de mon ami qui est resté figé », explique Arthur. Néanmoins, malgré la gravité de la situation, sa mère l’a trouvé impressionnant : « Je l’ai trouvé très calme, fidèle à lui-même. Il a gardé son sang-froid. »

Son ami est allé chercher ses parents. Ceux-ci sont allés chercher les parents d’Arthur. Entre-temps, un couple de jeunes médecins habitant le quartier est aussi venu rejoindre l’enfant, immobile et impuissant. Ça aura pris 45 minutes avant que les ambulanciers arrivent sur place. Pourtant, la famille réside à cinq minutes de l’hôpital.

« La paupière et le haut de l’œil pendaient, il y avait beaucoup de sang. Ce n’était vraiment pas beau », se souvient Catherine.

À l’hôpital, deux chirurgiens plastiques ont pris soin de la victime. Arthur a aussi dû passer quatre tests contre la COVID-19. Comme il vomissait énormément, le prendre en charge n’a pas été de tout repos.

Une longue convalescence

Quelques jours plus tard, Arthur a obtenu son congé de l’hôpital.

À sa sortie, il continuait de vomir sans arrêt, il avait de la difficulté à marcher et, surtout, il voyait en double. Ses parents étaient obligés de le nourrir à la paille. Il a raté les quatre premières semaines de la nouvelle année scolaire.

De septembre 2020 à juin 2021, la vision d’Arthur a été lourdement touchée.

Avant la fin des classes, Arthur s’est fait opérer une autre fois, ce qui lui a fait manquer la fin de son année scolaire. Ses amis prenaient quand même bien soin de lui apporter ses devoirs… et des toutous.

Aujourd’hui, sa vision est encore réduite lorsqu’il regarde vers le bas et sur la gauche. Ça ne l’empêche toutefois pas de tirer son épingle du jeu sur les verts.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Arthur Brault

Sur la route de la victoire

Peu de temps après sa seconde opération, Arthur a commencé à prendre part à des tournois, à l’été 2021. Au départ, sa mère trouvait qu’il était trop jeune pour participer à des compétitions. La réponse d’Arthur : « Le fils de Tiger Woods a deux ans de plus que moi et il fait des tournois. Je ne vois pas pourquoi moi, je ne pourrais pas en faire. »

Son flair ne lui a pas joué de tour. Le gamin a remporté le premier tournoi auquel il a participé.

Il joue maintenant 12 mois sur 12 et il veut que ce soit ainsi pour le reste de sa vie.

D’autant plus qu’Arthur est non seulement passionné, mais aussi doué. En septembre dernier, il a gagné le dernier tournoi de la saison lors de la finale du circuit CRJ Junior au Golf Château Bromont, alors qu’il a remis une carte de 65 sur 14 trous.

Entre cette victoire et l’accident qui a failli lui faire perdre un œil, une tonne de choses se sont passées.

Après avoir raconté son histoire, Arthur a quitté la mezzanine de La Presse. Sa tête pivotait de tous les côtés, de curiosité. Sa mère, admirative, le suivait.

À son avis, il était important de raconter l’histoire de fiston : « Arthur a eu la force d’avancer. Il ne s’est pas limité. C’est un bel exemple de persévérance scolaire et sportive. Les grands sportifs sont capables de se relever les manches. Je pense que ç’aura été un gros défi dans la vie d’Arthur. »