La météo aura été la grande vedette de l’édition 2022 du Championnat des joueurs.

Pluie, tempête et retards auront considérablement influencé le cours des évènements. Contre vents et marées, c’est finalement Cameron Smith qui a triomphé au TPC Sawgrass, lundi, grâce à une ronde finale presque parfaite.

L’homme à la coupe Longueuil et à la moustache blonde met ainsi la main sur la coquette somme de 3,6 millions de dollars américains, le tournoi offrant une bourse totale de 20 millions de dollars cette année, un record.

Ce qui est certain, c’est que Smith ne l’a pas volée. Sa qualité de jeu extraordinaire sur les verts aura fait la différence.

À deux coups de la tête et en sixième position à l’issue de la troisième ronde, l’Australien était visiblement en mission.

Toute la semaine, il avait été régulier sur ses coups d’approche et fidèle à ses habitudes avec ses coups roulés. Smith a élevé son jeu d’un cran lundi après-midi. Les conditions étaient sublimes et propices, contrairement aux quatre journées précédentes, et Smith a fait parler son talent.

Le 10joueur au classement mondial a commencé sa ronde finale avec quatre oiselets à ses quatre premiers trous. Les meneurs à ce moment, Anirban Lahiri, Sam Burns, Sebastian Munoz et Doug Him, ont été incapables de suivre la cadence imposée par Smith.

Le feu dans les yeux, Smith a réussi la normale au cinquième et a ajouté un oiselet au sixième. Il a toutefois montré qu’il était humain en échappant les trois derniers trous avec un boguey sur chacun d’entre eux. Il a remis une carte de 34 (-2), au premier neuf. À ce moment, Paul Casey, Keegan Bradley et Lahiri soufflaient encore dans le cou de l’Australien de 28 ans.

Le début du neuf de retour a été un copier-coller du neuf d’aller. Quatre premiers trous, quatre oiselets. La différence est que ses coups d’approche étaient encore plus précis qu’au début de la ronde. La distance entre la balle et le trou a été réduite et la tâche s’est allégée.

PHOTO LYNNE SLADKY, ASSOCIATED PRESS

Cameron Smith regarde son coup de départ au 15e tertre.

Sur 11 des 15 premiers trous, Smith n’a eu besoin que d’un seul roulé.

Au 16e, Smith a eu une petite frayeur en envoyant son coup de départ complètement à gauche. Toutefois, comme il était en pleine possession de ses moyens, il a ramené sa balle calmement dans l’allée et a effectué deux coups de fer efficaces. Il s’en est tiré avec la normale.

Au même trou, Casey a envoyé son coup de départ directement dans la marque d’une balle préalablement créée par un autre joueur, dans l’allée. Malchanceux, Casey a finalement joué la normale, mais il a dû perdre un coup pour se sortir de cette fâcheuse position.

Au fameux 17trou, qui a donné plus de fil à retordre que jamais aux golfeurs depuis cinq jours, le meneur y est allé d’audace. Avec un fanion positionné à l’extrême droite et avec deux coups d’avance, Smith a été agressif. Au lieu de placer sa balle en lieu sûr au milieu du vert avec son wedge, il a attaqué le drapeau. La trajectoire de la balle n’indiquait rien de bon. Elle est finalement tombée à quatre pieds du trou. Près de l’eau, mais sur le vert. Le sort du tournoi était pratiquement scellé, avec trois coups d’avance. Casey et Lahiri étaient impuissants face à l’excellence de Smith.

Smith était là pour jouer et il l’a prouvé au 18trou en utilisant son bois de départ à la place d’utiliser un simple bois d’allée pour assurer un coup au centre du terrain. Sa frappe est allée dans les arbres, à droite, et il a dû jouer dans les brindilles de bois, sous les arbres. Il a complètement raté son coup de replacement, sa balle a traversé l’allée de droite à gauche et a terminé son chemin dans l’obstacle d’eau.

Au même moment, sur le 17e, Lahiri a réussi un oiselet. L’Indien n’était plus qu’à deux coups. En plus, son coup de départ au 18e a été parfait. Avec toute la pression du monde, Smith, fidèle à ce qu’il avait démontré tout au long de la journée, a été époustouflant avec ses fers et a envoyé la balle à seulement trois pieds de l’objectif.

L’Australien a terminé avec son seul boguey du deuxième neuf. Il a remis une carte de 66 (-6) en réussissant pas moins de 10 oiselets. Son pointage total était à -13.

Cependant, avec un oiselet sur le dernier trou, Lahiri forçait une prolongation. Il a raté son approche et a été à court du vert.

En direct du chalet, en train de faire valider sa carte de pointage, Cameron Smith a pu savourer la victoire la plus importante de sa carrière.

Enfin !

À 28 ans, Smith était toujours à la recherche de son grand moment. Il avait déjà remporté quatre tournois auparavant, certes, mais trop de fois, il était passé à côté d’une grande victoire comme celle-ci.

Le Championnat des joueurs est considéré comme le cinquième tournoi majeur dans le monde du golf.

Smith avait terminé deuxième au tournoi des Maîtres en 2020 et cinquième en 2018, ainsi que quatrième à l’Omnium des États-Unis en 2015. Cette fois-ci, il a été en mesure de soulever le trophée.

Devant les siens

Smith vit tout près du TPC Sawgrass, à Ponte Vedra Beach. Il demeure à environ huit kilomètres du terrain. Même s’il n’y joue pas souvent, c’était un peu comme gagner à la maison. D’autant plus que l’Australien a eu la chance de serrer dans ses bras sa sœur et sa mère, venues expressément pour sa victoire. En raison de la pandémie, ça faisait deux ans et demi qu’ils ne les avaient pas vues.

Habituellement de glace, Smith a été émotif lorsqu’il en a été question en conférence de presse. Il est évident que de les savoir près de lui a été un facteur important dans sa manière de jouer et dans l’importance et la signification de cette victoire.

Toujours en conférence de presse, lorsqu’il a été questionné sur son coup de maître au 17e, Smith a été bien franc : « Ce n’est pas là du tout que je visais ! » Il a expliqué qu’il visait davantage le centre du vert, derrière la fosse de sable, d’où il espérait un roulement favorable.

Il est aussi revenu sur son erreur au 18trou. D’où, sous les arbres, il a envoyé sa balle dans l’eau, ce qui l’a mis momentanément en position précaire. « Je pensais que la balle se serait arrêtée bien avant, parce que je pensais pouvoir bien la frapper. J’ai essayé de la faire arrêter environ 30 verges plus tôt, mais elle a commencé à bondir et à prendre de la vitesse dans l’allée. »

Smith ne s’est jamais mis de pression. Celui qui pointera au sixième rang du classement mondial dès ce mardi est conscient d’avoir souvent cogné à la porte lors des plus gros évènements du circuit, mais ça n’a jamais modifié sa manière de jouer ou son approche.

Je n’ai jamais eu de grandes attentes. Mon seul objectif en me levant le matin est d’aller au gymnase, m’exercer le plus possible et avoir du plaisir sur le terrain.

Cameron Smith

C’est possiblement cette simplicité qui a permis au golfeur de 28 ans de passer à travers cette semaine ardue. Il en sort vainqueur, grandi, mais surtout plus confiant.

Maintenant, que va-t-il faire avec la cagnotte de 3,6 millions ?

« Je ne sais pas », a-t-il dit en riant. Un peu gêné. Venant de parents issus de la classe ouvrière et qui ont travaillé toute leur vie à la sueur de leur front pour avoir de quoi vivre, obtenir une telle somme, d’un coup, est pratiquement irréel : « Je ne sais pas… Je ne le sais vraiment pas… Je n’ai pas vraiment de bonne réponse… Je ne sais pas comment je vais utiliser tout ça. »