Le golf est le sport présidentiel par excellence. Quatorze des 17 derniers présidents y jouaient, raconte dans son livre Don Van Natta fils, journaliste du New York Times et double lauréat du prix Pullitzer. Seules exceptions: Herbert Hoover, Harry Truman et Jimmy Carter.

Les plus assidus? Woodrow Wilson et Dwight Eisenhower. Wilson jouait au golf sur recommandation de son médecin. Chaque jour sauf le dimanche, y compris l'hiver. Le Services secret peinturait même sa belle en rouge pour qu'il la retrouve dans la neige. Malgré toutes ces rondes, il n'aurait jamais brisé 100.

Eisenhower était meilleur. Ce maniaque a joué 800 parties durant sa présidence. Soit 100 parties par année, en pleine guerre froide. Ike aurait joué dans les 70 une dizaine de fois. C'est lui qui a fait construire un vert d'exercice à la Maison-Blanche par le réputé architecte Robert Trent Jones.

Cette passion ne plaisait pas à tous. Les démocrates exploitaient ce mécontentement, le qualifiant de Duffer in chief. En réaction, John F. Kennedy a toujours caché son amour du golf. Il refusait qu'on le photographie sur le parcours. Pourtant, il fut le meilleur. Time raconte qu'en 1960, JFK a frappé son coup de départ directement vers la coupe du 15e de Cypress Point, une normale trois. «Non, non!» criait-il, par crainte de réussir un trou d'un coup. Un exploit qui l'aurait trahi.

Le porte-parole du président, Pierre Salinger, a finalement commencé à parler en public des rondes que jouait JFK. Une façon de dissiper les rumeurs sur d'autres activités qui se pratiquent en quatuor, mais plus souvent en couple.

Expéditifs, les Bush

George W. Bush est un autre président gêné par le golf. Cet été, 43 a annoncé qu'il abandonnait le golf pour le reste de sa présidence. Jouer au golf en temps de guerre envoie le mauvais message, a-t-il expliqué.

L'image dont il voulait se débarrasser, c'est celle donnée dans son premier mandat. «Il faut chasser ces terroristes», avait-il lancé aux journalistes en direct d'un tertre de départ, avant d'ajouter avec la même conviction: «Maintenant regardez-moi frapper ce coup de départ.»

Mais Bush fils reprendra sûrement le golf. C'est une tradition familiale. Son grand-père, George Herbert Walker, présidait la USGA. La Walker Cup, trophée remis au gagnant du plus prestigieux tournoi amateur par équipe au monde, est nommée en son honneur. Double V détient un handicap d'environ 15. Sa principale caractéristique: sa rapidité. Il prend très peu de temps pour se concentrer avant de frapper. Ses rondes sont très rapides, moins de trois heures, rapporte Van Natta.

Et les moins honnêtes? Van Natta leur consacre un chapitre, Hail to the cheats. Bill Clinton en est la vedette avec 35 pages, devant Nixon (23 pages) et Lyndon B. Johnson (12 pages). Les histoires abondent sur les fameux mulligans de Clinton. L'auteur en a eu la confirmation lors de leur ronde en 2000 à Chappaqua, New York. Au terrain d'exercice, le président a annoncé qu'il lui offrirait des mulligans. Clinton frappait souvent deux ou trois coups de départ. Il lui a fallu quelque 200 coups pour jouer 82, ironise l'auteur.

La petite balle qui intimide

Même si les présidents américains menaient des guerres et contrôlaient un arsenal nucléaire, leurs genoux cognaient à l'idée de tapocher une petite balle blanche devant des curieux. Une anecdote parmi tant d'autres de leurs méfaits en public se déroule en 1995, à un pro-am de la PGA. Ford jouait avec Bush père et Clinton. Ford atteint un spectateur. Bush frappe un arbre, sa balle rebondit, brise les lunettes d'une dame de 70 ans puis frappe la cuisse de son voisin. Clinton a quant à lui failli frapper une maison adjacente.

Les présidents n'étaient peut être pas toujours bons, mais ils n'en adoraient pas moins le golf. Parfois plus que la politique. William Taft et ses 350 livres de confiance en fournissent un exemple éloquent. Certains ont tenté de le dissuader de jouer, estimant qu'il paraissait ridicule. Mais il a continué. Il a déjà refusé la visite d'un diplomate chilien. Son excuse? «Je serai maudit si je dois laisser tomber ma partie de golf pour rencontrer cet homme.»