Bill Belichick a donné des directives claires à sa défensive: laissez marquer le porteur de ballon.

Décidant de jouer les probabilités et laissant, par le fait même, toute la place à la critique, le calculateur entraîneur-chef des Patriots de la Nouvelle-Angleterre a dit à ses joueurs de s'enlever du chemin, d'ouvrir un large corridor pour Ahmad Bradshaw et de donner la chance à Tom Brady de remporter le Super Bowl avec 57 secondes à faire.

Inhabituel? Absolument.

Un peu fou? Pas du tout.

La stratégie a échoué et les Giants de New York l'ont emporté 21-17. Mais Belichick est certain que cette décision a donné la meilleure chance aux Pats de gagner.

Ils menaient 17-15 avec 1:04 à faire, mais ne disposait que d'un temps d'arrêts alors que les Giants faisaient face à un deuxième essai et les buts à la ligne de 6 des Pats.

Si les Patriots arrêtent Bradshaw, les secondes continuent de s'écouler s'ils n'utilisent pas leur temps d'arrêt. S'ils l'utilisent, les Giants peuvent laisser le temps s'écouler après le jeu suivant, laissant bien peu de temps aux Pats avec Lawrence Tynes prêt à effectuer un placement sur une courte distance.

Un placement, a dit Belichick lundi, avec un taux de réussite «bien au-dessus de 90 pour cent» de cette distance.

Et cette stratégie a été utilisée - avec le même résultat - dans le Super Bowl de 1988 par l'entraîneur des Packers de Green Bay Mike Holmgren contre les Broncos de Denver.

Malgré tout, elle vient en opposition directe à la nature compétitive des joueurs en défensive, dont le travail consiste à empêcher les joueurs adverses d'atteindre leur zone des buts. Et aux demis offensifs, dont le travail est de s'y rendre.

«Ça m'a anéanti», a dit le secondeur Brandon Spikes, qui s'est simplement enlevé du chemin. «Quand la décision nous a été transmise de les laisser marquer, j'ai dit: «Quoi? Je suis ici pour faire mon boulot et je dois les laisser marquer?'. Ça a été difficile. Très difficile.»

Bradshaw a aussi dû se battre contre nature: à l'approche de la ligne des buts, il a tenté de s'arrêter, comme quelqu'un tentant de retrouver son équilibre. Mais son élan l'a poussé au-dessus de la ligne, même si son quart Eli Manning lui criait de se laisser tomber.

«J'ai essayé, mais je n'ai pas été capable», a dit Bradshaw.

Le pointage est donc passé à 21-17 - les Giants ont raté la transformation de deux points - et Brady disposait de 57 secondes pour marquer un touché. Un fait d'armes réussi de nombreuses fois.

Amorçant la série offensive à sa ligne de 20, Brady a lancé deux passes incomplètes avant d'être rejoint derrière sa ligne de mêlée. Mais sur ce quatrième essai, il a rejoint Deion Branch sur 19 verges pour un premier jeu à la ligne de 33. Il a ensuite rejoint Aaron Hernandez sur 11 verges pour se retrouver à la ligne de 44 et jeter le ballon au sol. Les Giants ont alors écopé d'une pénalité de cinq verges et les Pats se sont retrouvés à leur ligne de 49.

Ils avaient toujours une chance, quoique mince.

Avec neuf secondes à faire, Brady a lancé une passe incomplète vers Branch.

Avec cinq secondes à faire, il ne restait plus qu'une seule solution: une passe désespérée avec tous les receveurs dans la zone des buts. La passe s'est rendue, mais avec les ailiers rapprochés Hernandez et Rob Gronkowski tout près, le ballon est tombé au sol alors que la dernière seconde s'écoulait, anéantissant les les chances de championnat des Patriots.

La stratégie de Belichick, aussi sûre qu'elle pouvait sembler, n'aura pas fonctionné.

«Il a pris une bonne décision, a dit Brady. Ça nous a laissé un peu de temps.»

Plus tôt cette saison, les Patriots ont perdu 34-31 aux mains des Bills de Buffalo quand ils n'ont pas pu reprendre le ballon en fin de match.

Les Bills semblaient avoir marqué sur une passe de 39 verges de Ryan Fitzpatrick à Fred Jackson. Mais la décision rendue sur le terrain a été renversée et les Bills ont repris le ballon à la ligne de 1. Fitzpatrick a mis le genou au sol sur tous les jeux jusqu'à ce que Rian Lindell ne botte un placement de 28 verges sur le dernier jeu du match.

Cette décision sera longuement discutée et remise en question en raison de l'enjeu. Au moins une personne directement concernée, le demi offensif des Giants Brandon Jacobs, a dit savoir que ça ne fonctionnerait pas.

«J'ai beaucoup de respect pour Tom Brady et les Patriots, a-t-il dit. Il fait tout un travail avec les joueurs dont il dispose. Mais si ça avait été Drew Brees ou Aaron Rodgers de l'autre côté du terrain, ces 57 secondes auraient été suffisantes.»

Mais comme l'attaque des Pats utilise des passes plus courtes, elle a besoin de plus de temps.

«Ils ont besoin de bien plus que 57 secondes pour pouvoir gagner ce match, alors je n'étais pas inquiet du tout.»

Quel choix leur restait-il?

«C'était mieux que de ne pas avoir de chance du tout», a conclu Brady.