L'automne dernier, Jean-Philippe Darche a reçu un coup de fil de St. Louis. C'était Josh Brown, un botteur qu'il avait bien connu chez les Seahawks de Seattle. Le coup de fil de Brown, ce n'était pas pour prendre des nouvelles, mais bien pour annoncer une bonne nouvelle: les Rams se cherchaient un spécialiste des longues remises, et Brown allait placer un bon mot pour Darche auprès des patrons des Rams.

Puis, plus rien.C'est peut-être là que Jean-Philippe Darche a compris. Compris que les offres n'allaient plus venir, et compris que le moment était venu de passer à autre chose. Après neuf belles saisons dans la NFL à faire des longues remises, Darche, bientôt 35 ans, a choisi de tout arrêter d'un seul coup. «J'ai toujours dit que je n'allais pas m'accrocher pour rien, mon idée était faite, explique-t-il au téléphone depuis son domicile de Kansas City. J'ai tourné la page.»

Des regrets? Pas vraiment, non. Combien de Québécois ont eu la chance de jouer dans la NFL, et pendant neuf saisons en plus? Jean-Philippe Darche a vécu le rêve. Joueur non repêché, issu de l'Université McGill, il a saisi la perche que les Seahawks lui ont tendue en 2000. C'est tout ce qu'il demandait: une chance, une seule. Il ne l'a pas ratée.

Le rêve est venu par la suite. Les stades en folie. Les foules de 80 000 spectateurs. Un Super Bowl, le 40e, dans l'uniforme des Seahawks. «Probablement mon plus beau souvenir, ça et la fois où mon garçon de sept ans était sur un terrain avec moi et son équipe de football», se rappelle-t-il.

La seule chose qui tracasse Jean-Philippe Darche, c'est la manière. La façon dont sa carrière s'est terminée, suite à une grave blessure au genou gauche. Après deux saisons à Kansas City, les Chiefs ont tout simplement choisi de le libérer après la saison 2008.

«Ça s'est un peu fini en queue de poisson... Ce n'est pas comme ça que je voyais ça. J'aurais aimé partir à ma manière, au moment où je l'aurais voulu. Mais en même temps, des joueurs qui décident du moment de leur retraite, c'est rare. À cause de mon âge, je me doutais bien que ce serait difficile de trouver une autre équipe.»

Le monde de la NFL a bien traité Jean-Philippe Darche. «En vertu d'une clause dans la convention collective, les Chiefs ont dû payer la moitié de mon salaire cette saison (un peu moins de 400 000 $ US), et dans 10 ans, je vais pouvoir commencer à toucher des gros montants pour mes années de service dans la ligue. Le plan de pension de la NFL est le meilleur de toutes les ligues. Je ne suis pas mal pris.»

En effet. Darche va maintenant poursuivre ses études en médecine, interrompues pour l'amour du football en 1999. Un choix déchirant: continuer à McGill et rentrer au bercail, ou bien rester à Kansas City et poursuivre là-bas. «Pour nos enfants, Kansas City, c'est la maison, alors je ne sais pas trop», dit-il.

Le football est peut-être terminé, mais les souvenirs vont rester. Pas pour rien que Jean-Philippe Darche hésite quand on lui demande de nommer ses favoris dans la NFL, de raconter une ou deux histoires sur ceux qui l'ont marqué. Parce que les bons souvenirs se bousculent dans sa tête.

«Je me suis fait de bons amis en jouant au football américain, j'ai rencontré du bon monde... Je vais toujours me souvenir de Jerry Rice. Il est arrivé avec les Seahawks en fin de carrière, il n'était plus le joueur qu'il était plus jeune, mais il travaillait toujours aussi fort. C'est lui qui arrivait le premier aux entraînements. Quand tu vois aller des gars comme lui, tu comprends pourquoi ils ont eu autant de succès dans cette ligue.»

En attendant de reprendre les études, Jean-Philippe Darche s'adonne à son autre passion: regarder les matchs du Canadien sur la télé à la carte. Parce qu'il y a un certain Mathieu Darche avec le bleu blanc rouge...

«Mon frère, je suis super content pour lui. Il a été blessé à l'épaule à Hamilton, mais je m'attendais à ce qu'il soit rappelé par le Canadien. C'est juste que je ne pensais pas que ça allait arriver aussi vite! C'est un joueur qui ne néglige aucun détail sur la glace. Il a une chance et il va en profiter.»

C'est de famille, il faut croire.