Pauvre Tony Romo. Vraiment. En plus de devoir composer quotidiennement avec deux divas (Jessica Simpson et Terrell Owens), en plus d'avoir le job le plus difficile du sport professionnel en Amérique du Nord, voilà que le quart des Cowboys doit en plus composer avec ces «experts» qui le disent incapable de gagner le match important.

Y en aura pas de facile, comme le disait Jean-Paul Sartre.

Romo et ses Cowboys ont échappé un match important la semaine dernière à Pittsburgh. Après la rencontre, ce qu'on a retenu, c'est ce chiffre: trois. Comme dans trois interceptions, le nombre d'interceptions offertes aux Steelers par Romo.

 

Jason Witten s'est lui-même montré du doigt pour l'une de ces interceptions, la dernière. Ceux qui connaissent un peu le football ont aussi remarqué que les deux premières n'étaient pas la faute de Romo, mais bien celle du grand Owens, qui a «coupé» son tracé sur la première, et qui ne s'est pas trop forcé sur la deuxième.

Mais les «experts» ont quand même tranché: pour eux, ces gaffes étaient signées Romo. Point final. Certains ont même dit que les Cowboys n'allaient jamais rien gagner avec lui...

Bon. Et maintenant, si on respirait un peu par le nez?

Tony Romo en est à sa deuxième saison complète à titre de partant. Demain soir contre les Giants, il n'en sera qu'à son 35e départ. Son match le plus important à ce jour, c'est la finale de division contre les Giants en janvier dernier.

On sait comment ça s'est passé, n'est-ce pas? Les Giants sont allés surprendre les Cowboys chez eux, et après le match, les «experts» ont encore dit que c'était la faute à Romo. Même si le receveur Patrick Crayton avait cessé de courir sur le jeu qui aurait pu donner la victoire aux Cowboys en fin de match. Et même si ce Crayton avait précédemment échappé une passe qui aurait pu provoquer un jeu important pour les Cowboys.

Mais c'était la faute à Romo...

Lors de la semaine du 40e Super Bowl à Detroit, j'ai eu une intéressante discussion avec Phil Simms, l'ancien quart émérite des Giants. Avec sa franchise habituelle, Simms m'avait raconté combien les «experts» sont souvent dans le champ. Il m'avait rappelé qu'au cours des années 80 et 90, Dan Marino et John Elway avaient la réputation de quarts qui ne gagnent jamais quand ça compte.

«C'était n'importe quoi, m'avait dit Simms. Le gars qui a inventé l'expression «pas capable de gagner le gros match» mériterait qu'on lui sacre une volée...»

J'imagine qu'on est comme ça. On aime les gagnants. On aime leurs bagues. En Amérique, la bague, c'est tout ce qui compte. Sauf que l'histoire récente du Super Bowl regorge de quarts ordinaires qui ont une bague de championnat. Trent Dilfer et Brad Johnson viennent immédiatement en tête. Ben Roethlisberger, 23e au classement des quarts de la NFL cette saison, a une bague lui aussi.

Le lien entre ces hommes? Dans les trois cas, on parle de quarts qui ont bénéficié d'une défense exceptionnelle pour leur permettre d'atteindre le zénith. Fait à noter: aucun de ces hommes n'a remporté le titre de joueur par excellence au Super Bowl, un honneur qui est souvent remis au quart de l'équipe championne.

Romo arrive au troisième rang des quarts du football américain cette saison, avec un taux d'efficacité de 96,9. C'est mieux qu'Eli (90,1), Peyton (88,8), Brett Favre (88,2) et gros Ben (80,1), tous des quarts qui ont une bague au doigt.

John Elway a mis 15 saisons avant de remporter le Super Bowl. Phil Simms a dû attendre huit saisons. Peyton Manning, un autre qui avait la réputation d'un gars qui s'écrase quand ça compte, a mis neuf saisons avant de pouvoir faire la bise au trophée Lombardi. On pourrait ajouter à cette liste le nom de Steve Young, qui a gagné le Super Bowl en janvier 1995 avec les 49ers, 10 ans après avoir lancé sa première passe dans la NFL.

Je ne veux pas comparer Romo à tous ces grands; je veux seulement rappeler que dans cette ligue, l'attente est parfois longue, même pour les meilleurs.

Romo est l'âme des Cowboys. Il suffit de se rappeler de quoi avait l'air cette équipe sans lui il y a un mois... Donnons-lui le luxe du temps. S'il se plante encore dans 10 ans, alors là, on pourra dire qu'il est le Danny White de sa génération. D'ici là, Tony Romo demeure l'un des cinq meilleurs quarts de cette ligue.

En attendant, les Cowboys pourraient l'aider en lui offrant une défense qui domine chaque semaine. Ils pourraient aussi songer à se départir d'un certain numéro 81, qui prend pas mal de place pour un gars en perte de vitesse...