Au palmarès des belles surprises de cette saison 2008, on retrouve évidemment les Falcons d'Atlanta, les Dolphins de Miami et les Titans du Tennessee. Il y a une autre équipe qui a complètement déjoué les experts, une dont on parle moins souvent.

S'il est moins question des Ravens de Baltimore que certains autres clubs, c'est peut-être parce que ce n'est pas si étonnant que les vieux Corbeaux soient de retour dans le coup. Les piliers de la défense sont demeurés en place, ce qui est déjà suffisant en soi pour assurer un certain niveau de compétitivité.

 

Mais sans la contribution de Joe Flacco, les efforts de la défense risqueraient d'être vains, comme ils l'ont été si souvent depuis une dizaine d'années. Les statistiques restent modestes, mais Flacco a cet air de gagneur. Et comme c'est habituellement le cas avec leurs joueurs clés, c'est au repêchage que les Ravens ont trouvé Flacco.

Même s'il aura permis aux Ravens de mettre la main sur de bons vétérans comme Derrick Mason et Trevor Pryce, par exemple, le marché des joueurs autonomes ne leur a pas toujours été salutaire. Steve McNair semblait au bout du rouleau au milieu de sa première saison à Baltimore; Elvis Grbac a été un flop monumental au début de la décennie; ça reste mitigé dans le cas de Willis McGahee et, bien qu'il n'était techniquement pas un joueur autonome, Terrell Owens a refusé de se joindre aux Ravens après qu'ils l'eurent obtenu des 49ers de San Francisco.

Règle générale, c'est au repêchage que ça se passe. Ray Lewis, Ed Reed, Chris McAllister, Terrell Suggs, Jamal Lewis, Jonathan Ogden, la liste de joueurs étoiles repêchés par les Ravens est longue.

La défense continue d'exceller alors qu'une légère baisse de régime aurait été tout à fait dans l'ordre des choses. Reed, McAllister, Pryce et Samari Rolle sont tous au début de la trentaine et à 33 ans, Ray Lewis est le plus vieux du groupe. Ça ne l'empêche pas d'occuper le sommet de l'équipe avec 77 plaqués, 25 de plus que Bart Scott, qui est deuxième. Lewis est également efficace contre la passe comme en attestent ses trois interceptions et ses huit passes rabattues.

Sauf qu'il aura beau être un joueur légendaire et le plus grand leader de sa génération, le très religieux Lewis ne fera jamais l'unanimité. En raison, surtout, de cette nébuleuse histoire survenue dans les heures qui ont suivi le Super Bowl à l'hiver 2000. Deux types qui accompagnaient Lewis à une fête auraient tué deux autres individus, une histoire pas très jolie. Lewis s'est toujours défendu de ne pas avoir participé aux sauvages agressions et n'a été accusé que pour avoir menti aux autorités. Mais le malaise est là pour rester.

Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, Lewis a sa place aux côtés des Lawrence Taylor, Jack Lambert et autres grands secondeurs de ligne de l'histoire du football américain.

La présence de Flacco permet enfin aux Ravens de bénéficier d'un certain équilibre entre la défense et l'attaque, mais ce serait injuste de passer le jeu des demis sous silence. McGahee mène l'équipe avec 489 verges, Le'Ron (vous avez bien lu, Le'Ron) McClain est un dur de 260 livres qui a 459 verges et six touchés au compteur, et la recrue Ray Rice a 382 verges et la meilleure moyenne du groupe (4,1).

Autre facteur d'une grande importance, l'arrivée de John Harbaugh. C'est plutôt rare qu'une équipe embauche un gars d'unités spéciales afin d'occuper un poste d'entraîneur-chef, mais c'est ce qu'ont fait les Ravens en optant pour Harbaugh, qui pilotait les unités spéciales des Eagles de Philadelphie précédemment. Harbaugh ne manque visiblement pas de confiance et semble avoir la poigne nécessaire afin de se faire entendre au sein d'une équipe où il y a déjà un autre coach à bord en la personne de Ray Lewis.

J'ai lu un bouquin qui s'intitule Next Man Up l'année dernière. Le journaliste John Feinstein a eu accès à tout ce qui se déroulait chez les Ravens pendant la saison de 2004. La lecture a confirmé que Brian Billick était le parfait player's coach. À la lumière de ce qu'a rapporté Feinstein, ça frôlait le country club - et ça, c'était lorsque Billick durcissait le ton.

Billick est un bon coach et pourrait connaître du succès à nouveau (chez les Vikings du Minnesota?). Mais c'était assez clair que son message ne passait plus à Baltimore. De là, peut-être, l'alternance entre les bonnes et les mauvaises saisons depuis leur conquête du Super Bowl, il y a huit ans.

On parle bien peu d'eux, mais s'ils se frayent un chemin en séries, personne ne voudra croiser les Corbeaux sur son chemin. Lewis et sa bande, un quart qui semble déjà toujours trouver le moyen de gagner, un coach qui a insufflé une nouvelle énergie, et le sentiment de n'avoir absolument rien à perdre. Dangereux.