Seuls les grands peuvent se lever dans les moments importants. C’est la différence entre l’exceptionnel et l’ordinaire. Entre l’historique et l’anecdotique.

Patrick Mahomes fait maintenant partie des plus grands. Il est dans une classe à part. Non seulement parce qu’il ne fait les choses comme quiconque avant lui, mais aussi parce qu’il est le catalyseur d’une équipe prenant de plus en plus l’apparence d’une dynastie, en vertu de la victoire de 38-35 des Chiefs de Kansas City face aux Eagles de Philadelphie, dimanche, au Super Bowl.

On a une forte tendance à louanger les négligés. C’est instinctif. À favoriser et à encourager les diminués. Ça crée de plus beaux récits. C’est pourquoi on se range tous derrière Cendrillon plutôt que derrière le prince charmant. Il faudrait toutefois commencer à s’y intéresser.

Tout le monde se régale des histoires de ceux qui ne devaient pas gagner. Mais qu’en est-il de ceux qui ne pouvaient pas perdre ?

John F. Kennedy a défini le courage par la capacité d’être « gracieux sous la pression ». En tel cas, Patrick Mahomes a été hautement courageux.

Le joueur par excellence de la dernière saison pilotait l’offensive la plus productive du circuit. Il était épaulé par l’un des meilleurs ailiers rapprochés de l’histoire. Il était guidé par l’un des plus grands entraîneurs. Il devait briller.

La pression, elle était sur lui. L’homme aux 450 millions de dollars. Aux commandes d’une équipe finaliste pour la troisième fois en quatre saisons.

Mahomes n’a pas seulement été gracieux. Il a été efficace, résilient et, ultimement, à la hauteur. « C’est le joueur le plus utile de la ligue. C’est tout ce qu’il y a à dire », a déclaré l’entraîneur-chef Andy Reid après la partie.

En dépit d’un déficit de 10 points à la mi-temps, d’une blessure aggravée à une cheville et d’un homologue ayant offert une performance historique, le quart-arrière des Chiefs peut donner à sa ville un deuxième défilé.

Je ne dirai pas qu’on est une dynastie, parce qu’on n’a pas fini !

Patrick Mahomes

La domination des Eagles était telle que l’offensive des Chiefs a été sur le terrain près de 12 minutes de moins. À la mi-temps, l’écart était encore plus monstrueux. Philadelphie menait par plus du double pour le nombre de jeux, de verges et de temps de possession.

Mahomes a eu peu de temps, mais il a fait de l’or avec du sel. Il a profité de chacune des secondes qui lui étaient offertes. L’athlète de 27 ans a terminé le match avec 3 passes de touché, 182 verges aériennes, 21 passes réussies sur 27 tentatives et le trophée du joueur par excellence du Super Bowl. Sa course de 26 verges en fin de quatrième quart, la plus longue de la soirée pour les Chiefs, a été déterminante. Il est devenu seulement le 13quart de l’histoire à gagner plus d’un titre.

C’est après la mi-temps que la machine s’est mise en marche. Et comme un vrai capitaine, Mahomes a dû faire confiance à tout son équipage pour arriver à bon port. « Ce n’était pas une seule personne. Tout le monde a dit qu’il fallait mieux jouer. La défense s’est fendu le c*l. Je remercie tout le monde. »

Le secondeur Nick Bolton a recouvré un échappé sur 36 verges jusque dans la zone des buts au deuxième quart pour garder l’espoir bien vivant. Au quatrième quart, Kadarius Toney s’est fait un nom en inscrivant le touché donnant les devants aux Chiefs pour la première fois de la rencontre. Deux minutes plus tard, il a effectué un retour de botté de 65 verges, profitant d’une brèche sur la droite, pour installer les blancs en territoire offensif. « J’ai anticipé la course comme n’importe quelle course, a-t-il expliqué après la rencontre. Je voulais juste effectuer mon travail. J’ai vu l’ouverture et j’ai foncé. Je ne le réalise pas encore. »

Ce jeu a mené au touché de Skyy Moore sur une passe de quatre verges de Mahomes, sa troisième du match, pour donner les devants 35-27 aux futurs gagnants.

Jalen Hurts est parvenu non seulement à remonter le terrain, mais aussi à inscrire son troisième touché au sol, un record pour un quart-arrière au Super Bowl, et la transformation de deux points permettait à son équipe de créer l’égalité.

Une pénalité controversée contre James Bradberry pour avoir retenu, très légèrement, Juju Smith-Schuster dans les derniers instants du match a ruiné les chances des Eagles de répliquer. « C’était une pénalité pour avoir retenu, j’ai tiré son chandail, a toutefois reconnu Bradberry. J’espérais qu’ils le laissent passer. »

Mahomes a mis son genou au sol pour permettre à Harrison Butker de procurer la victoire à son équipe avec un placement de 27 verges.

N’en demeure pas moins que les Chiefs de Kansas City ont accompli un exploit immense. Celui de ne pas décevoir. Ils avaient sans doute l’une des formations les plus complètes de la NFL. Malgré les départs de Tyreek Hill et de Tyrann Mathieu pendant l’entre-saison, ils ont gardé le cap. Ça relevait presque de la folie de croire qu’ils pouvaient encore se rendre jusqu’au bout cette année, avec une Association américaine encore plus relevée.

Mahomes, Kelce, Reid et compagnie ont quand même remporté un cinquième titre d’association consécutif. Et surtout un autre Super Bowl. « On l’a dit tout le long. La prochaine fois qu’on dira qu’on va faire quelque chose, écoutez-nous », a crié Kelce, qui a inscrit le premier touché des siens, dans le micro de l’intervieweuse, avec sa casquette des champions sur la tête.

Jalen Hurts repart bredouille

Même si c’est Mahomes qui célébrait sous les confettis du State Farm Stadium de Glendale, en Arizona, Jalen Hurts peut rentrer à Philly avec le sentiment du devoir accompli.

À son premier Super Bowl, il a offert une performance d’anthologie : 304 verges et 1 touché par la passe, en plus de 70 verges et 3 touchés par la course. Le quart de 24 ans a été fumant. Il a lui aussi été grand, à sa manière.

Il a prouvé de façon magistrale que les quarts-arrières mobiles, préférant plus souvent courir que passer, ont leur place sur la plus grande scène du monde.

PHOTO MATT SLOCUM, ASSOCIATED PRESS

Jalen Hurts

Le pivot des Eagles était tellement en contrôle que son entraîneur Nick Sirianni lui a donné le feu vert en quatrième essai et cinq à la ligne de 44 verges des Chiefs, en milieu de rencontre. Hurts a répondu en portant le ballon sur 26 verges.

Mais Hurts a aussi montré qu’il savait lancer. Sa passe à A.J. Brown sur 45 verges en entame de deuxième quart, alors qu’il a incliné son dos à la manière d’Aaron Rodgers, tournerait en boucle sur les chaînes d’informations si les Eagles l’avaient emporté.

DeVonta Smith a été parfait dans son rôle. Il a donné confiance à son quart tôt dans le match. Dans l’ombre de son opposant Travis Kelce, Dallas Goedert a été une cible de prédilection pour Hurts. L’ailier rapproché a fait des attrapés sublimes à des moments cruciaux.

Hurts et les Eagles ont failli renverser un monstre. La meilleure offensive de la NFL aura finalement eu raison de la meilleure défense. Même si dans cette confrontation, la meilleure défense aura été l’attaque.

Mahomes a inscrit son nom dans la légende, tandis que Hurts a prouvé qu’il en était peut-être une en devenir.

Ce qu’ils ont dit

La retraite ? Non. Je vais savourer ce titre-là. Philly, vous avez bien joué, et c’était un excellent match.

Andy Reid

En tant que compétiteur, on travaille pour être sur ce terrain depuis toujours. Je savais que j’allais m’en tirer ce soir, malgré mon entorse à une cheville. C’est un problème que je vais régler pendant la saison morte. […] Ils avaient l’une des meilleures lignes défensives et l’une des meilleures lignes offensives de tous les temps et il fallait les respecter.

Patrick Mahomes

On n’aurait pas pu le faire sans l’un des meilleurs coachs de l’histoire de la NFL, Andy Reid. Et quelle performance de Patrick Mahomes et de ses coéquipiers.

Clark Hunt

Pourquoi tu es le meilleur ? J’ai Andy Reid et Pat Mahomes ! Personne ne pensait qu’on allait gagner et regardez-nous aujourd’hui !

Travis Kelce

Je savais que Pat allait l’avoir. Je savais qu’Andy Reid avait un bon plan. Je savais que Kelce allait faire en sorte que ça fonctionne. Dans une séquence où la victoire et la défaite sont à l’enjeu, je sais qu’on ne perdra jamais.

Chris Jones

Je vais vous dire ceci : j’ai côtoyé plusieurs grands quarts-arrières, mais Pat est tellement calme. Même si tout va mal, il va finir par faire un jeu. Il est tellement constant, et c’est ce que j’aime le plus chez lui. Il ne va jamais changer qui il est.

Juju Smith-Schuster

On a perdu. Mais je sais que c’est quelque chose qui me motivera. J’ai déjà été dans cette position auparavant. C’est ce qui est merveilleux. Je vais prendre le temps de réfléchir à tout ça.

Jalen Hurts

Je l’ai retenu. Je me suis accroché à son maillot. J’espérais qu’ils [les arbitres] laissent passer.

James Bradberry

Tu ne peux absolument pas faire cet appel ici.

Julian Edelman

La main sur son dos n’a eu aucune incidence sur son tracé ! Ce match était trop bon pour laisser l’appel d’un officiel en dicter le sort. Merde ! En passant, je n’avais pas de préférence. C’est juste mon opinion.

LeBron James

Avec Guillaume Lefrançois