L’équipe de football montréalaise était bien représentée lors de la manifestation de dimanche. « Notre ADN est construit autour de la diversité, a dit le président Mario Cecchini. On s’est dit que c’était le temps de faire un geste concret. »

Reculons de quatre ans et écoutons ce qu’avait à dire Colin Kaepernick, alors membre des 49ers de San Francisco, qui avait commencé à poser un genou au sol pendant le Star-Spangled Banner, avant les matchs.

« Je ne me tiendrai pas debout pour montrer de la fierté envers le drapeau d’un pays qui opprime les Noirs et les gens de couleur, avait déclaré Kaepernick au site internet de la NFL. […] Il y a des morts dans la rue, des gens commettent des meurtres et s’en tirent. »

Il y avait déjà eu Eric Garner, Trayvon Martin, Tamir Rice et bien d’autres. Depuis, George Floyd et Breonna Taylor, notamment, ont contribué à allonger la liste de Noirs tués aux mains des forces policières.

C’est pour cette trop longue liste de gens, et pour dénoncer le racisme sous toutes ses formes, qu’ils étaient des milliers à marcher au centre-ville de Montréal, dimanche.

Parmi eux, il y avait Danny Maciocia, directeur général des Alouettes. Maciocia n’a pas oublié Kaepernick. Et il a tenu à le rappeler, parce que le commissaire de la NFL, Roger Goodell, na pas fait mention de Kaepernick dans son message dexcuses envoyé vendredi.

« J’ai vraiment apprécié sa sortie. Mais il manque un élément. Il faut ajouter le nom Kaepernick », a souligné Maciocia, en entrevue avec La Presse à la place Émilie-Gamelin.

« Il doit admettre qu’ils se sont trompés dans ce dossier. Il faut admettre qu’il y a 32 propriétaires qui ont pris une décision. Kaepernick mérite le respect, car ça lui a coûté très cher [de protester]. C’est bien que Goodell sorte avec une déclaration en disant qu’ils se sont trompés, mais il faut mettre en évidence Kaepernick. »

PHOTO MIKE MCCARN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Colin Kaepernick (à droite) et son coéquipier Eric Reid en septembre 2016

Maciocia n’était pas le seul à avoir pensé à Kaepernick. Dans une marche où les casquettes et chandails de sport étaient plutôt rares, un manifestant a été aperçu portant un chandail noir, numéro 7, de l’ancien quart-arrière, sans équipe depuis la fin de la saison 2016.

Au football comme dans la vie

La représentation sportive était plutôt mince – du moins, officiellement – en ce dimanche midi ensoleillé, mais les Alouettes étaient aux premières loges. Maciocia était sur place, casquette bleu-blanc-rouge sur la tête, en famille. Le président de l’équipe, Mario Cecchini, y était aussi, et a même été invité à prendre la parole sur la scène avant le début de la marche.

« C’était très important pour nous d’être ici. Notre ADN est construit autour de la diversité, a souligné Cecchini. On a tous été horrifiés par les évènements de la semaine dernière. Ça a enclenché une réflexion. On en a parlé au sein de la direction, avec Danny, avec Khari [Jones, l’entraîneur-chef]. »

« Les joueurs se sont tellement impliqués. James Wilder fils proteste pacifiquement tous les jours à Houston. On a vu ce que Tyrell Sutton a dit. On a vu ce qu’Eugene Lewis a dit. Un de nos anciens joueurs, Danny Desriveaux, était dans La Presse hier [samedi]. Ça peut juste nous interpeller. On s’est dit que c’était le temps de faire un geste concret. J’étais très content quand Anastasia Marcelin nous a invités à prendre la parole en avant. On ne pouvait pas refuser ça, c’était l’occasion de soutenir la population, mais aussi nos joueurs, très directement. »

Chez les joueurs, Sutton et Tony Washington, B. J. Cunningham et Trey Rutherford ont participé à la manifestation.

Maciocia, lui, était présent en famille. « Il faut montrer l’exemple à nos enfants, a rappelé le nouveau directeur général des Alouettes. Je ne pense pas que les gens naissent racistes. Ils le deviennent dépendamment de leur entourage, de ce qu’ils apprennent à la maison. »

Si des gens sont capables d’apprendre le racisme, nous sommes aussi capables de faire des changements, de réaliser que ce que nous avons appris dans notre entourage n’était pas toujours la bonne chose. Il y a une certaine éducation à faire.

Danny Maciocia, directeur général des Alouettes

Maciocia estime par ailleurs que la société pourrait prendre exemple sur le monde du sport pour mettre un terme au racisme dénoncé lors de la manifestation.

« Dans un vestiaire de football, il y a 60 joueurs, qui représentent plusieurs groupes ethniques et qui travaillent à un but commun. Que tu sois Blanc ou Noir, que tu viennes de Montréal-Nord ou d’Outremont, quand on embarque sur le terrain, on travaille pour le même but.

« Ça, ça s’applique à la vraie vie. C’est ce que j’aimerais que les gens réalisent. C’est beaucoup de travail, mais c’est faisable. Si c’est faisable dans un vestiaire de football, c’est faisable dans la société en général. »