Pendant que Jacques Chapdelaine et l'auteur de ces lignes discutaient près de l'entrée du stade Hébert après l'entraînement des Alouettes, hier après-midi, une tractopelle est passée à un mètre de nous. C'est une scène qui résume assez bien la situation des Alouettes, qui ne possèdent toujours pas leur propre site d'entraînement.

Le vestiaire des Alouettes se trouve au Stade olympique, où l'équipe tient également ses réunions d'équipe et ses séances d'étude vidéo. Pour ses entraînements, l'équipe se rend toutefois au parc Hébert à Saint-Léonard, un trajet qu'elle fait dans deux autobus scolaires. Pas le gros luxe...

«Ça nuit à tout. Les conditions de travail, le recrutement des joueurs autonomes, le développement des joueurs, la préparation en vue des matchs», a récemment résumé le président du club, Mark Weightman.

Les Alouettes cherchent le bon emplacement pour la construction d'un stade d'entraînement depuis une décennie. Ils ont regardé dans l'île de Montréal, sur la Rive-Sud, dans la couronne nord...

«C'est un dossier prioritaire sur lequel on continue de travailler. On a quelques options sur la table dans différentes villes, mais je n'ai pas le droit d'en parler spécifiquement», a indiqué Weightman.

Or, selon un autre membre de l'organisation, c'est un projet qui n'aboutira pas de sitôt. «Je ne sais pas si ça se fera un jour, mais je doute fortement que ça se produise à court terme», a dit cette source, qui a accepté de donner son point de vue anonymement.

Pas une excuse

Selon le règlement de la LCF, les joueurs doivent être disponibles pour une durée de quatre heures et demie par jour de travail. Le temps que les Alouettes perdent quotidiennement pour leurs déplacements est calculé dans cette période.

Est-ce que cette perte de temps a un impact sur les résultats de l'équipe? Pas selon plusieurs joueurs du club, dont Nik Lewis.

«Je préférerais évidemment que tout se déroule au même endroit. Mais il y a 24 heures dans une journée et tout le monde peut investir le temps nécessaire s'il le souhaite. Nous sommes des professionnels, et si l'on doit investir plus de quatre heures et demie, eh bien c'est ce qu'il faut faire. Point à la ligne», a tranché Lewis.

«Je ne crois pas que ça nuise à l'équipe significativement. On perd un peu de temps sur le plan de la préparation, c'est vrai, mais au bout du compte, les joueurs doivent mettre le temps nécessaire», a déclaré Jovon Johnson, qui s'est amené à Montréal comme joueur autonome.

À une certaine époque, les Alouettes s'entraînaient sur un terrain extérieur adjacent au Stade olympique. La construction du stade Saputo et l'arrivée de l'Impact dans le secteur ont changé la donne. Anthony Calvillo ne croit toutefois pas que les choses soient très différentes aujourd'hui.

«Nous devions marcher pendant 10 ou 15 minutes entre notre vestiaire et le terrain d'entraînement, alors ce n'était pas très différent de la situation actuelle. On perd peut-être un peu de temps en raison des déplacements, mais ça ne nous a pas empêchés de connaître beaucoup de succès dans le passé», a rappelé le coordonnateur offensif.

Le salaire avant tout

Les joueurs actuels des Alouettes soutiennent que ça ne change à peu près rien que l'équipe possède ou non son propre terrain d'entraînement. Les joueurs autonomes potentiels pensent-ils la même chose de façon générale?

«Au bout du compte, les joueurs veulent obtenir le plus d'argent possible. On ne fait pas des millions dans la LCF. Alors que l'on soit obligé de se déplacer afin d'aller s'entraîner n'influencera pas la décision d'un joueur autonome, selon moi», croit Johnson, qui s'est joint aux Oiseaux l'hiver dernier après avoir joué pour les Roughriders, les Blue Bombers et le Rouge et Noir.

«Pour être bien honnête, je ne crois pas que ce soit un facteur. Ce que veulent les joueurs autonomes, c'est un bon salaire et une bonne équipe», a estimé l'agent québécois Sasha Ghavami, qui représente quelques joueurs chez les Alouettes.

«Cela dit, les joueurs qui quittent les Alouettes pour une autre équipe vont parfois être impressionnés de voir les installations de leur nouvelle équipe. C'est notamment le cas de ceux qui se joignent au Rouge et Noir, qui possède des installations presque neuves», a nuancé Ghavami.

Pour l'entraîneur-chef des Alouettes, c'est à un niveau bien précis que les déplacements quotidiens de son équipe peuvent nuire. Chapdelaine aimerait avoir un peu plus de temps avec ses joueurs, ne serait-ce qu'une trentaine de minutes par jour.

«C'est probablement sur le plan du développement des quarts-arrières que notre situation a le plus grand impact. Personnellement, j'aime donner des répétitions aux quarts réservistes durant les entraînements, mais c'est plus difficile de le faire dans le contexte actuel. Nos déplacements grugent un peu le temps que je pourrais consacrer à nos jeunes quarts. Je sais, par contre, que l'organisation travaille fort afin de régler le dossier.»