Plus on passe de temps autour des Seahawks, plus il devient évident que Pete Carroll a construit son équipe à son image. Le conformisme n'est pas trop son truc, et ça se reflète de plusieurs façons chez les Seahawks.

À l'exception de San Francisco, peut-être, il n'y a pas un endroit dans la NFL où Carroll se serait senti plus à l'aise. L'une des villes les plus libérales des États-Unis, Seattle est taillée sur mesure pour lui.

À 62 ans, Carroll est l'entraîneur-chef le plus âgé de la NFL. Mais la façon dont il dirige son équipe est la plus novatrice de la ligue. Il n'y a pas le moindre doute à cet égard.

Dans l'auditorium où ont lieu les réunions d'équipe des Seahawks Demi-Cadratin et où se déroulent leurs conférences de presse à l'aube de la finale de la conférence Nationale qu'ils disputeront aux 49ers de San Francisco dimanche - se trouve curieusement un panier de basketball. Il est planté là, tout juste devant la scène sur laquelle les entraîneurs montent lors des réunions.

«Pete nous permet de nous amuser et de jouer au basketball avant nos réunions. Grâce à lui, le football m'est beaucoup plus agréable qu'il l'était auparavant», a expliqué Richard Sherman.

Le demi de coin étoile n'est bien sûr par le seul joueur qui aime l'approche de Carroll. Tous ceux qui ont parlé de lui ont essentiellement dit la même chose: Carroll les encourage à rester eux-mêmes. Ça peut sembler banal, mais dans l'univers militarisé qu'est le football, ça ne l'est pas du tout.

«Pete nous permet de rester nous-mêmes. C'est un environnement très libre. Certaines personnes de l'extérieur sont agacées par Pete. C'est peut-être parce qu'il y a une perception que tout doit être structuré, difficile et pas amusant au football. Il va à contre-courant de cette vision», a dit le receveur Doug Baldwin, hier.

«Il est diamétralement à l'opposé de l'entraîneur typique. Il n'est pas mou, mais c'est quelqu'un de très relaxe. Il l'est autant qu'un entraîneur pourrait l'être. Il permet à ses joueurs d'exprimer leur personnalité pourvu que ça ne nuise pas à l'équipe», a résumé Sherman.

* * *

Les Seahawks forment une équipe de négligés. De joueurs qui ont glissé au repêchage ou qui n'ont même pas été repêchés, parce qu'ils ne correspondaient pas au prototype du joueur «idéal». Dans bien des cas parce que leur personnalité était jugée trop forte ou atypique. Précisément le genre de joueurs que recherche Carroll.

«On veut des joueurs qui ont des personnalités particulières. Des gens qui peuvent apporter des choses différentes à notre équipe. Nos joueurs aiment notre approche et ça se voit. Ils fournissent toujours un effort maximal», a indiqué Carroll.

«Nos joueurs performent à la hauteur de nos attentes, alors on sait que notre recette fonctionne. On peut donc s'amuser à fond.»

Même s'il admet qu'il n'était pas aussi permissif lorsqu'il dirigeait les Jets de New York (1994) et les Patriots de la Nouvelle-Angleterre (1997 à 1999), le natif de San Francisco a toujours cru qu'il avait un bon filon.

«J'ai essayé les mêmes choses lorsque j'avais 24 ans et que j'étais un entraîneur adjoint, mais mes supérieurs disaient que j'étais fou, et je les ai crus.»

Carroll et les Seahawks ne se limitent pas à encourager leurs joueurs à dire ce qu'ils pensent ou à tenter des paniers de trois points dans un auditorium. Ils leur ont également fait découvrir les avantages de la méditation et du yoga, notamment.

«On a un médecin qui peut aider nos joueurs de plusieurs façons, que ce soit afin d'améliorer la qualité de leur sommeil, de leur alimentation ou la façon dont ils s'entraînent. Mais ce n'est pas comme si on méditait tous ensemble... Les choses ont été légèrement exagérées», a toutefois tenu à préciser Carroll, hier.

* * *

Carroll est l'un des rares entraîneurs-chefs de la ligue qui a le dernier mot quant à la composition de son équipe. Si les Seahawks connaissent autant de succès au repêchage depuis qu'il est arrivé à Seattle, il y a quatre ans, c'est d'abord grâce à lui.

Et c'est précisément en raison du pouvoir que les Seahawks lui ont consenti que Carroll a accepté de revenir dans la NFL. Après avoir occupé plusieurs postes dans la grande ligue de 1984 à 1999, Carroll est retourné dans la NCAA, où il avait passé les 10 premières années de sa carrière d'entraîneur (1974 à 1983).

C'est avec les Trojans de USC que Carroll a connu le plus de succès. De 2001 à 2009, il a remporté sept titres consécutifs de la conférence Pac-10 et deux championnats nationaux. Ces succès ont incité quelques équipes de la NFL à sonder le terrain, mais Carroll était loin d'être convaincu qu'il renouerait avec les rangs professionnels.

«Je savais exactement ce que je voulais afin de revenir, mais je ne croyais pas que je l'obtiendrais», a-t-il raconté, faisant allusion au pouvoir décisionnel qu'il a fini par obtenir chez les Seahawks.

«Je ne croyais pas que je reviendrais dans la NFL et j'étais confortable avec cette éventualité. Quelques équipes ont manifesté de l'intérêt à mon endroit, mais ce n'était jamais la bonne situation pour moi, jusqu'à ce que les Seahawks me contactent.»

L'équipe de Paul Allen, le cofondateur de Microsoft, ne regrette sûrement pas d'avoir donné un contrat de cinq saisons à Carroll, qui serait d'une valeur de 33 millions, selon le Los Angeles Times. Les Seahawks sont jeunes, talentueux, enthousiastes et rafraîchissants. Leur avenir n'a jamais été aussi prometteur. Et il n'y a probablement pas un club de sport professionnel plus intéressant à l'heure actuelle.