Quelques heures après l'annonce de l'embauche de Marc Trestman à Chicago, mercredi, on apprenait que Chip Kelly, le très en vue entraîneur-chef des Ducks de l'Université de l'Oregon, devenait le nouveau pilote des Eagles de Philadelphie. Trestman n'était déjà plus la grosse nouvelle du jour sur la planète NFL.

C'est ironique, car Trestman a toujours été dans l'ombre dans la NFL. Tout de même curieux lorsqu'on considère qu'il occupait un poste de coordonnateur à 32 ans à Cleveland. De nos jours, les jeunes entraîneurs sont monnaie courante dans la NFL, mais c'était une tout autre histoire dans les années 80.

Le fait que Trestman dirigeait l'attaque des Browns au début de la trentaine à une époque où la NFL était encore l'affaire de têtes blanches est révélateur. Et c'est d'ailleurs ce qui m'a toujours frappé le plus chez lui: son intelligence.

Lors d'une conversation avec quelques journalistes américains au Super Bowl de l'année dernière, ils me racontaient que la réputation de Trestman dans la NFL demeurait intacte, celle d'un génie de l'attaque (offensive mastermind).

Mais selon un récent article du site profootballtalk.com, certaines personnes dans la NFL seraient irritées par la pseudo suffisance affichée par Trestman, l'intellectuel. Trestman suffisant? Peut-être dans une autre vie, mais plus maintenant.

Quelques observateurs ont mis en doute la décision des Bears, dont Tim Brown, l'ancienne gloire des Raiders. Brown n'a pas aimé travailler avec Trestman à Oakland, notamment parce qu'il est devenu le deuxième receveur de l'équipe derrière... Jerry Rice.

Brown ne conteste pas les qualités de stratège de Trestman. Il se demande par contre s'il possède les qualités humaines pour être à la barre d'une équipe de la NFL, et c'est un point qui mérite d'être soulevé.

Le séjour de cinq saisons de Trestman avec les Alouettes a été le plus long de sa carrière, et plusieurs de ses adjoints sont partis en cours de route. Cela laisse présumer qu'il n'est pas toujours facile de composer avec lui.

Trestman, lui, n'a pas toujours su composer avec les joueurs qui avaient une forte personnalité chez les Als. Avon Cobourne a quitté Montréal en grande partie parce qu'il en menait trop large au goût de Trestman. Il y aura plus de gros égos à Chicago (Jay Cutler, ça vous dit quelque chose?), où la plupart des 60 joueurs du club sont multimillionnaires, ce qui n'était pas le cas à Montréal.

Davantage de gros égos et de médias, aussi. Trestman a toujours gardé ses distances avec les journalistes. Ma relation avec lui a toujours été bonne, mais on l'a déjà vu perdre patience et enguirlander des journalistes à quelques reprises. S'il ne veut pas faire les manchettes d'ESPN pour les mauvaises raisons, il devra éviter de s'emporter de cette façon.

Trestman connaîtra-t-il du succès avec les Bears? Il en a connu presque partout où il est passé. Ça ne changera pas maintenant qu'il n'est plus dans la LCF, ou qu'il n'est plus dans l'ombre de Jon Gruden, George Seifert ou Jimmy Johnson.

L'un de mes premiers textes à son sujet, à l'aube de sa première saison avec les Oiseaux, s'intitulait «La foi en Trestman». Je lui prédisais beaucoup de succès dans la LCF. Les cinq dernières années n'ont rien changé à ce que je pense de lui, au contraire. Montréal vient de perdre un champion.