Le repêchage du football canadien se déroulera jeudi, une semaine après celui de la NFL. Si l'événement suscite peu d'engouement - en partie parce que la grande majorité des joueurs étoiles de la LCF sont des Américains -, il reste essentiel au succès des huit équipes du circuit.

Rappelons que les 8 clubs de la LCF sont tenus de compter sur un minimum de 20 joueurs canadiens. En ajoutant les incontournables blessures, une équipe aura normalement fait appel à 25-30 joueurs canadiens au cours d'une saison. De là l'importance du repêchage.

Pour Jim Popp, il s'agira d'un 17e encan depuis qu'il est en poste avec les Alouettes. Le directeur général, qui a réussi sa part de bons coups depuis 1996, en est venu à développer une formule précise au rythme des ans.

«L'évaluation d'un espoir est un long processus, qui dure plusieurs mois, parfois plusieurs années. Lorsqu'on estime avoir une très bonne idée du type de joueur et de personne qu'est un espoir, on lui attribue une note. À partir de ces notes, on dresse notre liste finale, dont on dérogera rarement», m'a récemment expliqué Popp.

«Certains facteurs peuvent influencer notre liste. Par exemple, quelles sont les chances qu'un espoir se retrouve dans la NFL? Est-il originaire du Québec, ce qui représente une valeur ajoutée dans notre marché?»

La liste finale de Popp et des Als n'est jamais coulée dans le béton, mais il y a un piège qu'ils s'efforcent particulièrement d'éviter.

«Repêcher en fonction des besoins de son équipe est très dangereux, c'est la meilleure façon de rater la cible. Il est toujours préférable de sélectionner le meilleur joueur disponible. Regardez ce qui se passe dans la NFL. Les équipes de pointe comme les Giants, les Steelers et les Patriots repêchent presque toujours ce qu'elles estiment être le meilleur joueur disponible. C'est encore mieux si ce joueur comble une faiblesse, mais ça ne devrait jamais être l'un des principaux critères de sélection.»

Le «combine», un complément

L'autre gaffe que font certaines équipes, selon Popp, c'est d'accorder une importance démesurée aux résultats d'un espoir lors des fameux «combines», ces rencontres qui servent à évaluer la vitesse, la force et les autres habiletés physiques des espoirs.

«Le combine devrait être un outil pour complémenter ce qu'on a vu d'un joueur lors de ses matchs. Il sert, par exemple, à évaluer la vitesse d'un joueur en ligne droite. Or, en situation de jeu, un joueur qui étudie beaucoup sera presque toujours plus rapide qu'un joueur qui pourrait participer au 100 mètres, mais qui n'étudie pas. Et ça, le "combine" ne le démontre pas», souligne-t-il.

Popp estime que le «combine» est clairement la chose la plus surestimée dans l'évaluation d'un espoir, mais il convient qu'il peut servir à l'occasion. «Si on veut départager deux espoirs à qui on a décerné une note identique, ça peut être utile.»

Les résultats obtenus au «combine» viennent au dernier rang des critères de sélection de Popp, qui accorde de l'importance à cinq éléments précis.

«La première chose que je regarde, c'est le rendement du joueur lors des matchs. Est-il productif? La deuxième, c'est son intelligence et sa compréhension du jeu. Troisièmement, je veux savoir si ses relations avec ses entraîneurs et ses coéquipiers sont bonnes. J'analyse ensuite l'aspect de la robustesse. Craint-il le jeu musclé? Le dernier critère est la performance du joueur au combine, ou si vous préférez, ses qualités athlétiques.»

Prévenir les flops

D'après le DG, les experts et les recruteurs accordent souvent trop peu d'importance à l'attitude d'un joueur. Et c'est souvent précisément en raison d'une mauvaise attitude qu'un joueur se révélera un flop, croit-il.

«Pour savoir si un espoir est bon, on n'a qu'à le regarder jouer. On doit toutefois discuter avec plusieurs personnes afin de savoir s'il est travaillant, s'il étudie bien et s'il s'entraîne suffisamment. Je m'assure donc de faire tout ce que je peux afin d'obtenir les réponses. Je discute d'un espoir avec les entraîneurs-chefs et les coéquipiers, évidemment, mais aussi avec les entraîneurs adjoints, les soigneurs et même avec les préposés à l'équipement» dit-il.

«Il y a certaines choses qu'on ne contrôle pas, notamment les blessures. Mais les risques de flops sont moins grands lorsqu'on fait bien son travail, et ça commence avec une bonne connaissance des espoirs.»

Il y a une expression au football qui dit que le talent est plus important que tout (talent trumps everything). Popp semble plus ou moins d'accord avec cette vision.

«On veut obtenir des joueurs qui s'investissent dans la communauté et qui sont appréciés de leur entourage. Lorsque la cote d'un espoir dégringole subitement, c'est probablement parce que des doutes ont surgi quant à son attitude. Mais ça, on n'en parlera pas à la télévision.»