Qui est le joueur le plus utile à son équipe dans la NFL cette saison? Il y a de plus en plus de gens qui croient que c'est Peyton Manning qui devrait recevoir le titre du «MVP». Dire que le quart-arrière brille par son absence est plus qu'un euphémisme.

Manning ne recevra évidemment pas le titre du joueur par excellence sans même tenter une passe, mais la déconfiture des Colts donne des munitions à ceux qui ont toujours cru que cette équipe serait restée dans les bas-fonds n'eût été de son arrivée à Indianapolis, en 1998.

On a toujours su que Manning était essentiel aux succès des Colts, mais jusqu'à ce point? Il y a pourtant d'autres très bons joueurs à Indy, des gars qui ont participé à des Pro Bowls comme Reggie Wayne, Dallas Clark, Jeff Saturday, Dwight Freeney et Robert Mathis. Vrai qu'ils sont tous dans la trentaine, mais chacun d'eux était productif pas plus tard que l'an dernier.

Et ce n'est quand même pas comme si le jeu de Curtis Painter était abominable. Son coefficient d'efficacité de 85,2 est le 12e parmi les meilleurs, et supérieur à ceux de Michael Vick, Jay Cutler, Philip Rivers et Matt Ryan. Painter et Manning, c'est évidemment deux galaxies différentes, mais il n'est pas si mauvais depuis qu'il a remplacé Kerry Collins.

Bref, l'absence de Manning n'est pas le seul problème. La formation des Colts est l'une des plus vieilles de la NFL et l'avenir de l'entraîneur-chef Jim Caldwell semble de plus en plus incertain.

Rarement a-t-on vu un entraîneur-chef se faire dominer au Super Bowl comme Caldwell l'a été par Sean Payton, il y a deux ans. L'an dernier, Caldwell a utilisé certains de ses temps d'arrêt à des moments illogiques, des décisions incompréhensibles qui ont démontré qu'il n'était pas en pleine maîtrise de la situation.

Malgré tout ça, Bill Polian a accordé un vote de confiance à Caldwell, il y a quelques jours. Selon le DG, les déboires de son équipe s'expliquent par les blessures (voir Manning), tout simplement. C'est une façon de voir les choses. Une autre, c'est que les faiblesses de l'entraîneur-chef sont camouflées par le brio de Manning depuis deux ans.

Repêcher Andrew Luck?

Procéder à un changement d'entraîneur-chef n'est pas une mince affaire, mais même si Polian décide d'aller dans ce sens, ça pourrait très bien n'être que la deuxième décision en importance qu'il prendra au cours des six prochains mois. La première risque de concerner le premier choix du club. S'ils possèdent le tout premier du repêchage, les Colts peuvent-ils se permettre de l'échanger au lieu de sélectionner Andrew Luck?

«Suck for luck», c'est ainsi qu'on appelle la «course» au repêchage du jeune passeur du Cardinal de l'Université Stanford, qui est le meilleur espoir au poste de quart-arrière depuis... Peyton Manning. Les Colts auront de la compétition pour le dernier rang de la NFL, notamment des Dolphins et des Rams, mais s'ils possèdent la sélection initiale en avril, doivent-ils assurer l'après-Manning en sélectionnant Luck?

Ils pourraient choisir d'emprunter la même voie que les Packers, qui ont facilité le développement d'Aaron Rodgers en le laissant regarder Brett Favre jouer lors de ses trois premières saisons. Est-ce toutefois un luxe que peuvent se payer les Colts? Si Manning est en santé, pas sûr qu'il aimerait que l'équipe investisse le premier choix du repêchage dans un joueur qui restera assis sur le banc pendant que lui termine sa carrière.

Manning a signé un nouveau contrat de cinq saisons et de 90 millions, en août. Il serait inutile et risqué pour lui de revenir au jeu cette saison. Or, même si sa blessure au cou est sérieuse, il y a fort à parier qu'il jouera de nouveau - et pour plusieurs années encore.

En échangeant le premier choix à une équipe qui rêve d'obtenir Luck, les Colts pourraient recevoir une foule de choix et se renflouer rapidement. C'est assurément l'option que préférerait Manning. Et disons qu'avec ce qui se passe actuellement, son pouvoir de persuasion n'a jamais été plus grand.

À la croisée des chemins

D'autres choix difficiles attendent Polian et les Colts; Wayne, Saturday, Mathis, Joseph Addai et Pierre Garçon seront tous joueurs autonomes en mars. L'organisation est à la croisée des chemins. S'il s'avère que c'est effectivement la fin de leur domination, les Colts auront connu l'une des meilleures séquences de l'histoire de la NFL.

Entre 1999 et 2010, leur fiche en saison régulière a été de 138-54 et ils n'ont raté les séries qu'une fois en 12 ans. Lors de ces 12 saisons, ils ont remporté au moins 10 matchs chaque année, sauf une (2001). Ils ont participé deux fois au Super Bowl, remportant celui de février 2007.

Les Colts espéraient cette saison atteindre le Super Bowl pour une troisième fois, alors que la grande finale aura lieu dans leur stade. Ils doivent plutôt commencer à réfléchir à leur avenir. Tout en pansant leurs plaies à la suite de la raclée de 62-7 subie dimanche dernier au Superdome. Et le pire, c'est que cette humiliante défaite n'était peut-être même pas le fond du gouffre.

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