Lorsque Dan Rooney a effectué son discours de bienvenue aux joueurs des Steelers de Pittsburgh lors du début du camp d'entraînement l'été dernier, le message était différent de ceux que lui et son regretté paternel Art avaient livrés dans le passé.

Cette concession qui était devenue un exemple de stabilité, qui avait remporté cinq Super Bowl, accueilli en ses rangs les Terry Bradshaw, Jack Lambert et Ben Roethlisberger, et réuni des supporters d'est en ouest, vivait soudainement des moments d'inquiétude.

Rooney, le président du conseil d'administration, et Art II, le président de l'équipe, travaillaient dans le but de garder l'équipe à la suite de plusieurs mois de discussions familiales, mais le dénouement final était encore incertain.

Les plus récentes nouvelles à l'époque laissaient entendre que les quatre frères de Dan Rooney songeaient à vendre leurs parts au milliardaire Stanley Druckenmiller. Or, si ce projet se matérialisait, les Steelers ne seraient plus propriété de la famille Rooney, une première depuis la fondation de l'équipe si l'on exclut quelques mois en 1941.

Rarement cette organisation, reconnue pour sa solidité au fil des ans, avait été frappée par tant d'incertitude. Malgré cette nouvelle déstabilisante, les joueurs des Steelers ont accepté le défi que leur a lancé Rooney : «Laissez-nous nous tracasser avec cette histoire et vous, allez gagner des matchs de football».

«Je crois qu'ils ont accompli un merveilleux travail en évitant que cela devienne une distraction, parce qu'il s'agissait d'une grosse affaire», a confié l'ailier défensif Brett Keisel, en dévoilant les détails de cette rencontre pour la première fois.

Au bout du compte, les propriétaires et les joueurs auront tenu parole.

Ces derniers ont surmonté un calendrier difficile et de nombreuses blessures pour atteindre le Super Bowl pour la septième fois de leur histoire. S'ils battent les Cardinals de l'Arizona le 1er février à Tampa Bay, Dan Rooney saura très bien ce que ce triomphe signifiera : ils deviendront la première formation de l'histoire de la NFL à avoir remporté six Super Bowl.

De leur côté, les propriétaires des Steelers ont mis fin à presque deux ans de négociations, dont quelques-unes à voix haute, lorsque les frères de Dan Rooney ont accepté, il y a deux mois, de lui vendre toutes ou certaines de leurs parts.

Dan Rooney se tournera vers des investisseurs de l'extérieur pour financer en partie ce rachat d'actions, mais l'entente satisfait un pré-requis de la NFL selon lequel un propriétaire majoritaire doit détenir au moins 30 pour cent des actions.

Le commissaire Roger Goodell était également soulagé par la tournure des événements. Vers la fin du mois d'août,

Goodell avait réuni les frères Rooney à New York pour leur manifester son désir de voir l'une des concessions les mieux gérées de tout le sport professionnel demeurer la propriété de la famille Rooney.

«Leur mode de gestion devrait servir de modèle», a loué Goodell. «Je crois que tout le monde à Pittsburgh sait à quel point ils sont fiers des Steelers. Et nous, à la NFL, nous nous considérons fortunés d'avoir pu compter sur le leadership de Dan Rooney, et maintenant sur celui de Art.»

La philosophie des Rooney est relativement simple et tourne autour de trois grandes lignes directrices : dépensons sagement, embauchons des gens de qualité et soyons patient.

Cette patience a été particulièrement évidente lorsque la famille Rooney a maintenu sa confiance en Bill Cowher malgré des fiches de 7-9, 6-10 et 9-7 entre 1998 et 2000, trois saisons à l'issue desquelles les Steelers ont raté les séries. Or, lors des cinq saisons suivantes, les Steelers ont terminé avec des dossiers de 13-3, 15-1, 11-5, 10-5-1, participé à trois finales de l'Association américaine et un Super Bowl.