Bill Speros est un chroniqueur du site Boston.com. Il écrit régulièrement sur les Red Sox, les Celtics, les Bruins et les Patriots. La Presse lui a demandé de nous décrire les partisans de Boston, parmi les plus passionnés des États-Unis.

L'amateur de sport de Boston «typique» n'existe que dans votre esprit... Il fut un temps où il était pourtant facile de le décrire.

Habituellement tapageurs, utilisant un langage grossier, ces partisans odieux absorbaient chaque échec tragique dans leur ADN. Certains fléchissaient même sous des préjugés racistes qui, autrefois, s'accrochaient à cette ville comme une épidémie du virus Ebola. D'autres encore étaient complètement perdus dans leur amour des Red Sox, des Celtics, des Bruins ou des Patriots, pouvant même ressembler au personnage de Jimmy Fallon dans Fever Pitch.

Ils espéraient ce qu'il y a de mieux, ne priaient pour rien de moins, mais s'attendaient au pire. Oui, ces admirateurs ont déjà hué Ted Williams, dédaigné Bill Russell et traité leur équipe de la NFL comme s'il s'agissait d'un baril de déchets dangereux.

C'était le mauvais vieux temps... Seul le grand Bobby Orr, arborant le no 4, qui prend place aux côtés de Williams, Russell et Tom Brady au Mont Rushmore du sport, s'en est sorti indemne.

En mutation

L'histoire, au jeu et en dehors du jeu, a tout changé. Le temps a eu raison des tensions raciales et de la ségrégation géographique qui définissaient autrefois Boston. Le succès économique de ses industries techniques, médicales et financières a donné le ton tout comme l'apparition d'une nouvelle génération d'amateurs dont l'éducation leur permet de voir au-delà de la couleur, de l'origine ethnique et de toutes ces choses qui nous définissaient si souvent.

Quelques événements - à commencer par les répercussions de l'affaire de meurtre de Charles Stuart, en 1989, puis les attentats à la bombe du Marathon de Boston en 2013 - ont anéanti les vieilles façons de faire et ont rassemblé les gens de façon jusque-là inimaginable.

Un nouveau groupe de propriétaires pour les Red Sox avec, à sa tête, John W. Henry a continué de purger l'équipe de son passé teinté de racisme. Ce groupe de propriétaires des Red Sox a également investi des millions de dollars dans la rénovation de Fenway Park. Au même moment, Bob Kraft, propriétaire des Patriots, recueillait 325 millions de dollars pour la construction du Gillette Stadium après avoir obtenu environ 70 millions de l'État pour améliorer l'infrastructure environnante.

Le Boston Garden, miteux, exigu et spartiate, qui avait ouvert ses portes en 1928, a été démoli en 1995. Il a alors été remplacé par des installations modernes, incluant des améliorations telles que du stationnement, des toilettes fonctionnelles, la climatisation et des sièges qui ne sont pas situés directement derrière des poteaux.

L'âge d'or

Au jeu, l'âge d'or de l'univers du sport de Boston a commencé par un match en plein blizzard à Foxborough, au Massachusetts, le 19 janvier 2002. Brady et les Patriots étaient alors menés par les redoutés Raiders d'Oakland dans un match des éliminatoires de division de l'AFC. Lors de ce match, le quart arrière des Patriots a été heurté par Charles Woodson alors qu'il ne restait qu'environ deux minutes à jouer. Il a échappé le ballon et les Raiders l'ont récupéré. Ce jeu a d'ailleurs été considéré comme une passe incomplète, l'arbitre invoquant le «Tuck Rule». Les Patriots ont donc récupéré le ballon et remporté le match 16-13 en prolongation.

Deux semaines plus tard, la Nouvelle-Angleterre remportait le Super Bowl; une première victoire pour l'équipe en plus de 40 ans d'histoire. La prétendue «décennie de domination» de Boston venait de commencer. Cette période de 152 mois a débuté par le XXXVIe Super Bowl, a permis aux amateurs de sport de Boston d'encourager leurs équipes de la MLB, de la NBA, de la LNH et de la NFL au fil de huit championnats.

Ces mêmes amateurs ont également grincé des dents lorsque les Patriots ont perdu deux Super Bowl dans les dernières minutes du match aux mains des détestés mais respectés Giants de New York, vu les Celtics s'incliner en sept matchs devant Kobe Bryant et les Lakers lors des finales de la NBA de 2010, et poussé un long soupir lorsque les Bruins ont été éliminés en six matchs contre Chicago, lors des finales de la Coupe Stanley en 2013.

L'incroyable liste de championnats perdus de Boston s'est terminée en octobre dernier lorsque les Red Sox sont passés du dernier au premier rang, faisant vivre à la ville des montagnes russes d'émotions alors qu'elle tentait de se remettre des attentats à la bombe du marathon. Pour la première fois en 95 ans, les Red Sox remportaient la série mondiale au Fenway Park.

«Boston Strong», ce slogan apparu sur Twitter qui a rassemblé la ville, était alors au plus fort. Cette convergence de succès, de défaites épiques et de passage du temps et des générations a divisé les amateurs de sport de Boston en plusieurs factions.

Sur mon compte Twitter @RealOBF, j'ai demandé aux amateurs de se décrire. Parmi les réponses obtenues: passionnés, exigeants, cyniques, fidèles, positifs, gâtés, dévoués, respectueux, buveurs de bière, grossiers, odieux, aux idées arrêtées, prétentieux, intelligents avec un certain niveau de partialité, mais aussi des gens qui «associent des émotions extrêmes, aussi bien positives que négatives, avec certains jeux».

Les amateurs de sport de Boston sont tout ça, et bien plus. Ils ont fait preuve de classe et d'élégance en rendant hommage au grand Derek Jeter des Yankees lors des derniers matchs de sa carrière dans la ligue majeure.

Une question de générations

En règle générale, les amateurs de sport de Boston sont divisés par génération. Les plus de 40 ans, dont je suis, continuent de s'attendre aux échecs plutôt qu'aux succès. J'étais à Fenway Park, en 1975, du haut de mes 10 ans, lorsque les Red Sox ont perdu le 7e match de la série mondiale et j'ai assisté, du haut de mes 13 ans, au match éliminatoire de «Bucky F. Dent», en 1978, contre les Yankees.

Nous avions l'habitude d'écouter les Patriots en dernière place à la radio, parce que leurs matchs à domicile ne vendaient pas suffisamment de billets pour mériter une diffusion à la télévision locale. De l'âge de 7 ans jusqu'à 46 ans, je n'ai pas vu les Bruins gagner une seule Coupe Stanley. Mon fils, qui aura 21 ans en décembre, a grandi à une époque où remporter des championnats est la norme. Les luttes et les échecs, que ce soit à Fenway Park, sur la patinoire du Boston Garden ou à Foxborough, relèvent de l'anomalie.

C'est cette réalité que nous voulons. Mes parents sont morts sans avoir vu les Red Sox remporter une série mondiale ou les Patriots gagner un Super Bowl. Pourtant, leurs plus vieux petits-enfants ont applaudi ces équipes qui ont remporté six titres avant même d'atteindre l'âge de 20 ans. Lorsqu'on entend des gens dire que les amateurs de sport de Boston sont trop gâtés, c'est parce qu'ils ne comprennent pas les «traumatismes sportifs» auxquels nous avons fait face quand nous étions enfants. Pour nous, traumatisés, Boston ne pourra jamais remporter trop de championnats.

Et, comme le dit la tristement célèbre citation de Tom Brady, notre championnat préféré sera toujours le «prochain».