Révélation féminine du cyclisme canadien sur route cette saison, Olivia Baril a confirmé son accession au WorldTour l’an prochain. Sa nouvelle équipe : UAE Team ADQ.

La cycliste de Rouyn-Noranda pédalera donc dans les mêmes couleurs que Tadej Pogačar, double lauréat du Tour de France et récent vainqueur du Grand Prix de Montréal. Le contrat, qui doit être annoncé ce vendredi, est d’une durée de deux ans.

« C’est sûr que je réalise un rêve », a réagi Baril, jointe à San Sebastian, où elle vit depuis 2020. « Ça fait vraiment longtemps que je pense à ça. En fait, je croyais que ça arriverait avant cette année », précise la cycliste, qui ajoute qu’on ne se rend pas compte à quel point c’est un long processus et à quel point on doit s’y consacrer. 

La jeune femme de 24 ans ne débarquera pas en terrain inconnu. Avec Valcar-Travel & Service, une formation italienne de deuxième division, elle a disputé presque toutes les grandes épreuves du WorldTour, dont Liège-Bastogne-Liège, le Giro Donne, le Tour de France Femmes et le Ceratizit Challenge by la Vuelta.

« On a performé vraiment mieux que plusieurs autres équipes [WorldTour] »,
a-t-elle souligné au sujet de Valcar, qui lui a donné une chance après une première saison difficile en Europe sous les couleurs d’une équipe espagnole.

Baril s’est particulièrement signalée en première moitié de campagne, se glissant dans une échappée de 120 km au Tour des Flandres, remportant le Grand Premio Ciudad de Eibar en Espagne, terminant deuxième d’une étape au Tour du Pays basque et enlevant le maillot de meilleure jeune au Tour de Suisse, où elle a conclu au neuvième rang au classement général.

À cette période, elle savait déjà qu’elle ferait le saut en WorldTour, dont presque toutes les équipes la courtisaient.

Choix d’équipe

Son choix s’est donc arrêté sur UAE Team ADQ, à l’instar de trois coéquipières italiennes, Silvia Persico, Chiara Consonni et la jeune Eleonora Gasparrini, avec qui elle composait la colonne vertébrale de Valcar. Plusieurs membres du personnel d’UAE – anciennement Alé Cippolline et Alé BTC Ljubljana – sont également italiens.

J’ai vraiment aimé mon année et je reste dans le même environnement. UAE a tellement amené l’équipe des hommes à un autre niveau que je suis certaine qu’ils feront la même chose avec les filles ces prochaines années. Cette équipe va assurément [monter] dans le top 3 mondial, peut-être l’année prochaine ou l’année suivante.

Olivia Baril

Persico, révélation du dernier Tour (5e) et médaillée de bronze sur route aux récents Championnats du monde de Wollongong, est devenue une amie. Elle passera d’ailleurs la saison morte à la résidence de la Québécoise dans le Pays basque. L’Italienne de 25 ans faisait cuire les pâtes au moment de l’entrevue…

Comme son amie, Baril dit avoir d’abord reçu une offre de contrat de trois ou quatre ans, mais a préféré s’en tenir à deux, soit la durée de son entente avec son agent. Si tout se passe comme elle le souhaite, elle se voit prolonger ce pacte dès l’année prochaine, auquel cas elle n’aura pas à verser un pourcentage à son représentant actuel.

L’effectif et l’entourage de la formation seront considérablement remodelés, ce qui lui procure une grande confiance.

Une politique « contre-productive »

Comme Nord-Américaine, Baril s’estime privilégiée d’atteindre le plus haut niveau. Avec la jeune Magdeleine Vallières Mill, qui en sera à sa deuxième année de contrat avec EF Education-TIBCO-SVB, et la vétérane albertaine Alison Jackson, qui la rejoindra chez EF, Baril devrait être l’une des trois seules Canadiennes dans une équipe du WorldTour en 2023.

Avec Israel-Premier Tech qui devrait passer en deuxième division, le junior ontarien Michael Leonard, nouveau venu de 18 ans chez Ineos-Grenadier, pourrait être le seul chez les hommes.

« Avec la situation du vélo au Canada, c’est un exploit en soi de se rendre là », a affirmé Baril, rappelant que tous les représentants de la feuille d’érable ont dû payer leur billet d’avion au minimum pour prendre part aux Mondiaux en Australie, où elle a terminé 37e. « On est presque l’un des seuls pays comme ça. On est un pays bien développé, ce n’est pas comme si on était un pays du tiers-monde qui n’a pas d’argent pour nous envoyer là. »

À l’instar de son coéquipier Pier-André Côté, elle juge « contre-productive » cette politique de Cyclisme Canada dans un contexte de sport d’équipe. « Si tu n’es pas le leader, ça ne te donne pas envie de travailler pour quelqu’un d’autre quand tu as payé 4000 $ pour te rendre là. Tu n’as pas envie de ne pas finir la course. Ça fait que l’équipe, ça ne marche pas. »

Cette situation fâcheuse a pu être atténuée en Australie parce qu’un « commanditaire qui veut rester anonyme » a accepté de financer chacune des coureuses à la hauteur de 2500 $. À l’origine, il leur a même offert 3000 $ chacune « pour boycotter les Mondiaux » à l’image de leurs collègues masculins…

Mais les Mondiaux, ça reste les Mondiaux. On travaille fort toute l’année pour ça. On comprend qu’on veut passer un message, mais ça ne devrait pas être les athlètes qui en souffrent.

Olivia Baril

Après s’être ouvert un genou sur une chute à la troisième étape du Giro, Baril a tout fait pour revenir à temps pour le Tour de France trois semaines plus tard. À la réflexion, elle juge que cette course contre la montre a sapé ses énergies pour le reste de la saison. Sa participation annoncée au Tour de Romandie le mois prochain ne se matérialisera donc pas.

En 2023, la grimpeuse s’attend à partager le leadership avec Persico sur certaines épreuves par étapes. « Par exemple, elle pourrait viser le classement général au Tour de France et moi, au Giro. J’aimerais être constante toute l’année. »

Dans deux semaines, elle prendra part à une première activité d’équipe à Abou Dhabi, avant de « reprendre en force » en novembre en vue de la prochaine campagne.