(Nyborg) Antoine Duchesne n’a pas pris le temps d’admirer les champs de blé et le détroit du Grand Belt et ses éoliennes, samedi, dans le finale de la deuxième étape du Tour de France.

Le cycliste de Groupama-FDJ n’avait qu’une mission en tête : garder les yeux droit devant pour éviter le moindre souci à son meneur, David Gaudu.

« J’ai rarement été aussi concentré », a souligné le Québécois au terme de l’épreuve où tout le monde est rentré au bercail sain et sauf, dans le même temps que le vainqueur, Fabio Jakobsen.

« Je n’ai rien regardé ni n’ai parlé à qui que ce soit durant la journée. C’était stressant, j’étais stressé, il fallait vraiment être hyper attentif. »

À l’approche du sprint intermédiaire, avec un peu moins de 80 km à faire, Duchesne s’est montré à l’avant du peloton. Les coureurs commençaient à frotter, par crainte des vents de côté annoncés. Finalement, fausse alerte.

« David aime courir à l’avant. C’était un peu ça, le mot d’ordre. On ne voulait pas se donner d’excuses. On est plusieurs rouleurs qui sont là pour ça. On n’avait vraiment pas l’info pour les vents de côté. C’était important pour nous d’être bien placés. »

À part la chute impliquant le maillot jaune Yves Lampaert, la traversée du pont de 17 km a été pratiquement sans histoire. Avec le fort vent de face, le peloton a levé le pied dans la deuxième portion, en attendant le sprint massif.

« C’était un endroit vraiment spectaculaire, a noté Steve Bauer, directeur sportif d’Israel-Premier Tech. En cas de vent de côté, ça aurait pu être fou. Finalement, ça a été un sprint groupé comme prévu. Et on a un noble gagnant en Jakobsen. »

La formation israélo-québécoise a connu une petite frayeur quand Chris Froome a foncé vers des coureurs étendus au sol à la marque des 2,5 km. Heureusement, le Britannique a évité le pire.

Au moment où il a songé à se mêler au sprint, Guillaume Boivin a lui aussi été ralenti par l’empilade, l’esquivant in extremis.

« Ces gars-là sont vites, mais avec le vent de face, si tu prends la bonne roue, tu ne sais jamais, a-t-il souligné, assis dans l’un des coffres de l’autobus. Tu peux faire un petit résultat. En étant pris derrière la chute, c’était pas mal la fin de ma journée. »

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM D’ISRAEL-PREMIER TECH

Hugo Houle a terminé la journée au 21e rang.

Hugo Houle, lui, s’est rendu jusqu’à la ligne sans ralentir, mais ne s’est pas mêlé aux hostilités, observant la victoire de Jakobsen de l’arrière.

« J’étais un peu trop loin, je n’avais pas d’intérêt à aller faire le sprint », a expliqué Houle, 21e sur le fil.

Un « risque calculé »

Les deux Québécois d’IPT ont veillé au grain pour leur chef de file Jakob Fuglsang, sans trop forcer la note.

« Heureusement, ça a été moins dur que ce à quoi je m’attendais, a expliqué Houle. Il y avait évidemment le stress habituel de début de Tour de France, avec beaucoup de monde, de bruit, de changements de direction au début de l’étape. Moi, j’étais quand même assez relax à l’arrière du peloton toute la journée. Certaines formations mettaient beaucoup d’énergie pour rester placées et éviter toute chute ou cassure. »

Son coéquipier Krists Neilands a connu une petite mésaventure en visitant le pavé lors d’un passage sur un ponceau à 40 km de l’arrivée. Mais le Letton s’est relevé rapidement.

PHOTO SIMON DROUIN, LA PRESSE

Guillaume Boivin après le contrôle des signatures

« On n’a pas un favori cinq étoiles pour le classement général et pas de sprinteur, a rappelé Boivin, 39e. On a pris un risque calculé, si on veut, en se tenant derrière parce que c’était relativement plus facile, même si l’étape a été quand même nerveuse. On s’en est bien sortis. »

Si Houle et Duchesne se sont très bien sentis, Boivin a admis qu’il avait les jambes lourdes sur les 100 premiers kilomètres.

« Je pense que ça va m’avoir fait du bien, une longue sortie pour vraiment évacuer le voyage du corps. Je vais prendre les trois premiers jours ici comme ça va, puis avec le jour de repos pour le transfert lundi, j’espère être en pleine possession de mes moyens [cette semaine]. »

Michael Woods était soulagé d’être passé à travers cette deuxième étape sans souci. « Pour une étape de Tour, ce n’était pas trop dangereux, a évalué le cycliste d’Ottawa. Mais il y a eu des chutes et le peloton était toujours stressé. J’ai réussi à faire de mon mieux. »

Avec une autre arrivée au sprint prévue à Sønderborg, dimanche, les quatre Canadiens ne devraient pas jouer un rôle de premier plan à la troisième étape. À moins que des bordures ne donnent des idées à Boivin, qui n’a toujours pas reçu ses vélos et sa valise, égarés quelque part entre Montréal, Toronto et Copenhague.

Subito presto

Il a fallu jouer du coude à travers la foule dense de Nyborg pour se frayer un chemin de la salle de presse aux autocars des équipes, stationnés à un kilomètre de la ligne d’arrivée. Au pas de course, s’il vous plaît, parce que les coureurs ne traînent pas. Une douche en vitesse, et tout le groupe est prêt à décoller vers l’hôtel suivant. Premier arrivé, Guillaume Boivin est sorti assez rapidement pour donner une entrevue. Hugo Houle, lui, a dû rester près de l’aire d’arrivée pour se soumettre à un contrôle antidopage. À son retour, le bus s’apprêtait à partir. Ce n’est pas le moment pour une interview de fond.

Matthews doit revenir au Québec

Le champion en titre du Grand Prix cycliste du Québec reviendra au Canada pour tenter de doubler la mise, le 9 septembre. Michael Matthews a en effet mis les deux seules épreuves WorldTour disputées en Amérique à son programme, a confirmé Matt White, directeur sportif de BikeExchange, avant le départ de la deuxième étape du Tour de France, samedi matin, à Roskilde. Un an avant sa réussite sur la Grande Allée, l’Australien de 31 ans avait signé le doublé en s’imposant tant à Québec qu’à Montréal, imitant ainsi son compatriote Simon Gerrans (2014). Matthews a pris le 33e rang de l’étape jugée à Nyborg. Le Belge Wout van Aert, deuxième du contre-la-montre initial vendredi à Copenhague, a également mis les deux GP québécois à son agenda pour la toute première fois.

Une tape sur les doigts

Stefan Küng, coéquipier d’Antoine Duchesne chez Groupama, a donné une petite gifle sur le casque de Reuben Guerreiro, de la formation EF. Pour son geste, le Suisse a reçu une amende de 500 francs suisses et perdu 20 points UCI.