(Copenhague) Copenhague est la ville par excellence pour cyclistes et piétons. Chacun sa voie, bien délimitée et identifiée. Les autos ? Elles attendent sans rechigner, respectant leur propre corridor de circulation.

Mais il n’y a pas que des avantages à toutes ces marques de peinture blanche et bleue sur les routes. Tous les cyclistes le savent : quand il pleut, ça glisse. « Comme un pain de savon », a constaté le Suisse Stefan Bissegger (EF), un favori qui s’est étendu deux fois au sol durant le contre-la-montre d’ouverture du Tour de France, vendredi après-midi.

Dans ces conditions difficiles – et devant un public danois venu en masse – le Belge Yves Lampaert (Quick-Step) a surpris tous les prétendants partis avant lui, à commencer par son compatriote Wout Van Aert (Jumbo), qui occupait la position de tête depuis un bon moment.

« J’ai battu le grand Van Aert ! », a lancé un Lampaert incrédule et en pleurs après l’arrivée. « C’est incroyable pour moi, je n’ai jamais pensé revêtir le maillot jaune. Ma tête est en train d’exploser ! »

PHOTO MARCO BERTORELLO, AGENCE FRANCE-PRESSE

Yves Lampaert

Profitant d’une surface plus sèche, Lampaert, fils d’agriculteur de 31 ans, a devancé Van Aert de cinq secondes. Il a parcouru le circuit et sa vingtaine de virages à la vitesse moyenne de 51,8 km/h. Le double champion national de la spécialité a connu une deuxième moitié de parcours canon.

Je m’attendais à finir parmi les 10 premiers. Ça aurait été très bon. Finalement, j’ai devancé tous les meilleurs.

Yves Lampaert

Hugo Houle a salué le coup de force du Belge, reconnu pour ses qualités dans les classiques printanières : « Impressionnant, Lampaert. Je pense qu’il a surpris beaucoup de monde aujourd’hui. Moi, oui. C’est un très grand coureur, mais de là à dire qu’il battrait tous ces gars… Les leaders se sont fait un peu piéger [par la météo]. S’ils étaient partis derniers, ça aurait changé la donne. »

Bouche bée dans le fauteuil du meneur, Van Aert visait une troisième victoire consécutive au Tour de France. Il avait remporté l’ultime contre-la-montre et l’arrivée au sprint sur les Champs-Élysées, l’an dernier.

« Je suis déçu, évidemment, a-t-il réagi. C’est frustrant, mais avec les bonifications, il est possible de prendre le maillot jaune dans les prochains jours. Il y avait une possibilité aujourd’hui. C’est dommage ! »

L’autre grande nouvelle du jour est la troisième place de Tadej Pogačar, le Slovène de 23 ans qui vise un troisième titre consécutif. Non seulement il a devancé le champion mondial Filippo Ganna (Ineos), qui a cependant fini sur une crevaison lente, mais il a envoyé un message à tous ses autres rivaux au classement général.

« Je me sens confiant, satisfait, même si c’était tendu et stressant pour moi », a assuré le meneur de l’UAE. « Ça reste l’un de mes meilleurs départs au Tour. »

Ses deux adversaires attendus de Jumbo-Visma ont fait jeu égal. Le Danois Jonas Vingegaard (7e) et le Slovène Primož Roglič (8e) ont terminé respectivement à 8 et 9 secondes de Pogačar. Ce n’était donc pas vendredi que les dirigeants de la formation néerlandaise allaient établir la hiérarchie, un sujet qui s’annonce potentiellement délicat.

Le Britannique Adam Yates (Ineos) a fait une excellente opération en se glissant à la 13e place, à 16 secondes de « Pogi ». Ses coéquipiers Geraint Thomas (18e) et Dani Martínez (33e) ont fini un peu plus loin. Là aussi, les priorités restent à définir.

Le Français David Gaudu, coéquipier d’Antoine Duchesne chez Groupama-FDJ, a sauvé la mise en cédant moins d’une minute au meneur.

Le plus grand perdant notable est l’Australien Ben O’Connor (AG2R), quatrième du Tour en 2021, qui pointe déjà à près d’une minute de Pogačar.

La table est mise pour la deuxième étape, ce samedi, où Van Aert tentera de ravir le jaune à Lampaert. Toute l’attention sera tournée vers le double pont du Grand Belt, long de 18 km et qui relie les îles de Seeland et de Fionie. La ligne d’arrivée est située 3 km après la fin du pont. L’approche de 50 km s’annonce très nerveuse, surtout si le vent du large se lève.

Gros braquet

Pour les amateurs de matériel, Bissegger enroulait un grand plateau de 64 dents. Manifestement, cela ne l’a pas aidé. Le jeune Suisse d’EF a dégringolé au 99e rang après ses deux chutes. « Sur la piste, ils mettent de plus en plus de gros braquets, a noté Hugo Houle. Moi, j’avais une 60. » Chris Froome, qui a conclu à une anonyme 112e place, continue de pédaler avec un plateau ovoïde très prononcé.