Biniam Girmay n’oubliera jamais sa première victoire sur le Giro.

L’Érythréen de 22 ans est devenu le premier Africain noir gagnant d’une étape dans un grand tour, mardi.

Quelques minutes après son succès, il s’est envoyé dans l’œil gauche le bouchon de liège d’un magnum de prosecco qu’il venait d’ouvrir sur le podium… Il a été conduit à l’hôpital pour se faire soigner.

PHOTO MASSIMO PAOLONE, ASSOCIATED PRESS

Biniam Girmay

« En commençant le Giro, je savais qu’on avait la possibilité de gagner et d’obtenir de bons résultats, avait-il eu le temps de déclarer à la télé. Ce succès est aussi celui de mon équipe, de ma famille et de tout le monde. Chaque jour, on marque l’histoire. Je suis donc vraiment reconnaissant et heureux de ce que j’ai réussi. »

La nature de cette 10étape – 100 km tout plats avec un final casse-pattes – rendait son issue intrigante.

Dans le groupe d’une trentaine de coureurs en fin d’épreuve, il ne restait plus que les favoris au général et une poignée de puncheurs qui s’était accrochée dans l’ascension finale, dont le sommet pointait à huit kilomètres de l’arrivée.

Parmi eux, Mathieu Van der Poel, l’ogre en personne, le tueur de pédaliers, maillot rose pendant trois jours au début du Tour d’Italie. Le Néerlandais d’Alpecin-Fenix s’était lui-même envoyé un bouchon de liège en plein front pendant les célébrations.

Abandonné par tous ses coéquipiers au pied de la dernière bosse, Van der Poel s’était découvert à 5 km de la ligne tracée à Jesi. Manifestement, il craignait déjà Girmay, entouré pour sa part de trois coéquipiers d’Intermarché–Wanty-Gobert.

L’Érythréen a causé la sensation durant les classiques flandriennes en s’imposant à Gand-Wevelgem, ce qui en faisait le premier Africain gagnant d’une course d’un jour de niveau WorldTour.

À son premier Giro, Girmay a terminé deuxième de l’étape d’ouverture à Budapest, laissant échapper le maillot rose au profit de Van der Poel au bout d’un sprint en montée. L’explosif cycliste formé au Centre mondial du cyclisme a enchaîné avec quatre résultats parmi les cinq premiers.

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Mardi, la table était mise pour la 10étape, 196 km entre Pescara et Jesi, beaucoup trop dure pour les sprinteurs comme Caleb Ewan (lâché à 75 km), Mark Cavendish (151e, + 18 min) et même le bien affûté Arnaud Démare (50e, + 1 min 1 s).

Après les tentatives d’échappée avortées de Van der Poel, Simon Yates et Richard Carapaz, Girmay a reçu un appel du pied de Domenico Pozzovivo, son petit coéquipier plus habitué à grimper qu’à préparer des sprints. C’est finalement Van der Poel qui a pris la roue de l’Italien.

Au panneau des 350 m, Girmay n’a cependant pas hésité à placer son démarrage. Réagissant avec un temps de retard, Van der Poel a cédé un vélo et demi avant de remonter presque à la hauteur de l’Érythréen. À 10 m du fil, le Néerlandais a rendu les armes et levé le pouce droit en direction de Girmay à l’issue de ce sprint de haute volée.

Évidemment fou de joie, le vainqueur a reçu les félicitations de tout un chacun, dont Juan Pedro Lopez (Trek), l’autre figure sympathique de ce 105Giro. L’Espagnol de 24 ans a conservé son maillot rose de meneur pour la sixième journée consécutive.

Après une brillante prestation sur le brutal Blockhaus dimanche, Lopez détient toujours une mince priorité de 12 secondes sur le Portugais Joao Almeida (UAE), 4e en 2020 à 21 ans seulement.

Romain Bardet (+1 4 s), le champion olympique Caparaz (+ 15 s), titré en 2019, et l’Australien Jai Hindley (+ 20 s), gagnant au Blockhaus, suivent tout proche. Guillaume Martin (Cofidis) et Mikel Landa (Bahrain) pointent également à moins de 30 s.

Appuyé par une solide escouade Ineos, Carapaz paraît le plus fort parmi les prétendants. Sans doute profitera-t-il du travail des Trek de Lopez dans la prochaine semaine.

La 11étape de mercredi est destinée aux sprinteurs. Une revanche pour Ewan, battu d’un cheveu par Démare à la sixième étape ? Girmay, lui, décidera si son œil lui permet de prendre le départ en matinée.

Avec l’Agence France-Presse