Guillaume Boivin a craint le pire quand il s’est « barré le dos » sur un simple faux mouvement au début de Paris-Nice, il y a deux semaines. Il s’est accroché comme il a pu avant d’abandonner à l’issue de la deuxième étape.

« J’ai essayé de continuer, mais c’était vraiment trop souffrant. J’avais tout le dos complètement en contraction. J’avais de la misère à pédaler. Ça ne servait pas à grand-chose. »

Rassuré par les résultats d’une imagerie par résonance magnétique, le champion canadien a observé une période de cinq jours sans vélo avant de graduellement reprendre l’entraînement entre deux traitements de physiothérapie, chez lui, en Andorre.

Faute de pouvoir poursuivre Paris-Nice, où son nouveau coéquipier Hugo Houle s’est illustré (13e), Boivin s’est donc rabattu sur le Tour de Catalogne, qui a démarré lundi. Il souhaite y retrouver la forme d’ici dimanche en prévision de ses grands objectifs du début de la saison, le Tour de Flandres (3 avril), l’Amstel Gold Race (10 avril) et Paris-Roubaix (17 avril), où il s’était révélé avec une neuvième place l’automne dernier.

« C’est sûr que ça m’a vraiment inquiété. Finalement, tout était correct. Ce n’est jamais idéal dans ta préparation des classiques, mais il n’y a pas grand-chose à faire. Il faut composer avec ça et voir quelle sorte de forme j’aurai après la semaine ici. Il faut rester positif et espérer que ce soit bien. »

Cette première étape dans le nord-est de l’Espagne a été un test de taille. Avec ses cinq coéquipiers d’Israel-Premier Tech (IPT) et six membres de BikeExchange, Boivin a été au cœur de la bataille quand un échelon d’une vingtaine de coureurs s’est formé à la faveur du vent et de la route trempée. L’aventure a duré quelques dizaines de kilomètres et permis au Québécois de 32 ans de mesurer sa force.

« Ça a super bien été, s’est-il réjoui. C’était vraiment une journée très, très difficile où on a pris les initiatives et fait sauter le peloton dans le vent de côté. Le dos allait bien et la forme, pas trop mal non plus. »

Seulement sur le plan de la puissance, il n’y a pas beaucoup de courses où j’ai vu [un niveau] plus élevé.

Guillaume Boivin

Boivin a pris soin de son meneur et compatriote Michael Woods avant de céder dans l’ultime ascension du jour. « Il m’en manquait un peu dans la dernière bosse », a admis le 116e de l’étape, à près de 9 minutes du vainqueur, l’Australien Michael Mathews (BikeExchange). « J’ai fait beaucoup de travail pendant la journée, j’étais donc très content. »

Les IPT se sont un peu ratés dans le final. Leur coureur désigné, le Sud-Africain Daryl Impey, s’est retrouvé coincé à l’arrière. Finalement, le capitaine de route Simon Clarke a pris le septième rang tandis que Michael Woods (44e) s’est maintenu à l’avant et n’a pas cédé de temps, comme tous les favoris au général. L’équipe israélo-québécoise a cependant perdu le gros rouleur italien Alessandro De Marchi, tombé malade avant le départ.

Ce mardi, Boivin s’attend à une autre journée costaude sur un parcours « vraiment sinueux et des descentes extrêmement techniques », qu’il a reconnu la semaine dernière.

« Ce sera sur le bord de la côte, ils annoncent beaucoup de vent, il y aura peut-être encore des bordures dans le final. À la troisième étape, on commence déjà à aller en haute montagne avec une arrivée à La Molina. On va donc prendre ça une journée à la fois. »

Privé de Milan-San Remo, du Grand Prix E3 et de Gand-Wevelgem, le Longueuillois d’origine espère ne pas perdre au change en vue des classiques flandriennes du début d’avril.

« Ce sera une semaine extrêmement dure ici. Ça va me donner la forme et le fond nécessaires. Les classiques, j’en ai fait une et une autre. Je sais à quoi m’attendre, je connais les parcours. Il y a moyen de réchapper la situation et d’avoir quelques belles courses en Belgique quand même. »

Colbrelli s’écroule après sa deuxième place

Moment de frayeur à l’issue de cette première étape du Tour de Catalogne : l’Italien Sonny Colbrelli, deuxième du jour derrière Michael Matthews, s’est écroulé peu après son violent effort sur faux plat montant. Après des manœuvres d’urgence, le champion d’Europe a repris connaissance avant d’être transporté à l’hôpital universitaire de Gérone, où le cycliste de 31 ans était dans un état « stable » aux soins intensifs, selon son équipe Bahrain Victorious.

Mohoric l’innovateur

Ne comptez pas Guillaume Boivin parmi les futurs usagers de tige de selle télescopique. La pièce d’équipement, standard en vélo de montagne, a été utilisée par le Slovène Matej Mohoric dans sa folle descente du Poggio en route vers la victoire à Milan-San Remo, samedi.

« Je ne pense pas que j’ai le courage de prendre les risques qui viennent avec le dropper seat, a-t-il dit en souriant lundi. Des gens disent qu’il a gagné parce qu’il avait ça, mais je n’en connais pas beaucoup qui sont prêts à risquer comme ça. Il a vraiment joué le tout pour le tout et ça a payé. »

PHOTO MARCO BERTORELLO, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Matej Mohoric

À ses débuts dans le WorldTour chez Cannondale, en 2013, le Québécois se souvient que des coureurs comme Ivan Basso avaient déjà commencé à expérimenter la selle télescopique. À la même époque, il a également été le premier cochambreur de Mohoric, fraîchement couronné champion mondial U23. Le Slovène était déjà un descendeur d’exception, qui avait lui-même mis de l’avant le pédalage en « super toque », pratique aujourd’hui interdite par l’UCI pour des raisons de sécurité.

« C’est manifestement quelqu’un d’extrêmement brillant. Il cherche toujours à innover et à perfectionner sa façon de rouler. Je ne suis pas surpris que ce soit lui qui ait pensé à ça pour faire Milan-San Remo. Ça va avec la mentalité que je lui connais. »

Houle se remet d’une maladie

Si Hugo Houle n’a pas pris le départ de Milan-San Remo comme prévu, c’est parce qu’il est tombé malade peu après sa solide 13place à Paris-Nice. « J’ai eu besoin de la semaine pour récupérer, nous a-t-il écrit lundi. J’ai fait mon premier gros entraînement depuis Paris-Nice aujourd’hui. Je serai parfait pour le GP E3 vendredi. »