(Lausanne) Conspuée par les Occidentaux depuis le détournement d’un avion de ligne, la Biélorussie a perdu jeudi l’organisation des championnats d’Europe de cyclisme sur piste et voit son isolement diplomatique se doubler d’une mise au ban sportive.

Après deux jours d’hésitation, l’Union européenne de cyclisme (UEC) a annulé l’évènement prévu du 23 au 27 juin à Minsk, soit le dernier grand rendez-vous des pistards européens avant les JO de Tokyo, « à la lumière de la situation internationale actuelle ».

La veille déjà, les fédérations allemande et néerlandaise de cyclisme avaient annoncé le retrait de leurs équipes de l’évènement. Les Néerlandais avaient estimé que « la sécurité des coureurs et du personnel » ne pouvait « être garantie ».

« Nous nous employons déjà à trouver une solution alternative qui permette aux athlètes de nos 50 fédérations nationales de disputer la manifestation continentale cette saison », a promis le président de l’UEC Enrico Della Casa, cité dans un communiqué.

Si elle chamboule la préparation olympique des coureurs concernés, l’instance européenne n’a pas détaillé les options à sa disposition, alors que la crise sanitaire n’aide pas à trouver des solutions de repli.

Mondial de hockey

La France avait prévu d’envoyer à Minsk son groupe titulaire pour épreuves d’endurance et une équipe « B » pour le sprint – puisque les sprinteurs qualifiés pour Tokyo se trouveront alors « dans un cycle de préparation lourde », a précisé à l’AFP le directeur technique national Christophe Manin.  

Pour la Biélorussie, dont le président Alexandre Loukachenko avait fait du sport international un instrument de rayonnement personnel, cette décision est un nouveau signe de marginalisation.  

Loin de s’apaiser, la réprobation internationale visant le pays depuis la réélection contestée de M. Loukachenko en août 2020, jugée « truquée » par les Européens, a encore augmenté ces derniers jours.

Le régime est désormais accusé d’avoir détourné dimanche un avion de ligne Athènes-Vilnius pour arrêter un journaliste d’opposition à son bord, Roman Protassevitch, en prétextant une alerte à la bombe.

Face à l’avalanche de condamnations occidentales et de nouvelles sanctions de l’UE à l’encontre du régime qu’il dirige depuis 1994, Alexandre Loukachenko a assuré mercredi avoir « agi légalement en protégeant (ses) gens ».

Mais dès janvier, la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF) avait dû lui retirer la co-organisation de son championnat du monde, qui se dispute finalement en Lettonie, face à la pression des commanditaires et des opposants dénonçant une répression politique féroce.

Loukachenko indésirable aux Jeux

Et malgré les protestations de l’IIHF, la mairie de Riga a décidé de remplacer le drapeau biélorusse officiel par celui qu’utilise l’opposition, provoquant l’expulsion par les autorités de Minsk de l’ambassadeur de Lettonie et de son personnel.

De son côté, le Comité international olympique (CIO) a suspendu en décembre Alexandre Loukachenko « de toutes les manifestations et activités du CIO, y compris les Jeux olympiques », en raison de la « discrimination politique » frappant les sportifs du pays.

« Extrêmement déçu » par l’absence de progrès sur ce front, le CIO avait maintenu en mars ses sanctions contre les dirigeants sportifs du pays, incluant Viktor Loukachenko, le fils du chef de l’État, ainsi que Dmitry Baskov.

Dès la fin août 2020, plus de 300 sportifs de haut niveau, dont plusieurs médaillés olympiques et membres d’équipes nationales, avaient dénoncé dans une lettre ouverte le trucage des votes dans l’élection présidentielle revendiquée par M. Loukachenko, appelant à un nouveau vote.

Les signataires, réclamant également la fin des violences policières et la libération de tous les prisonniers politiques, avaient par ailleurs promis qu’ils feraient preuve de solidarité si l’un d’entre eux devait faire face à des représailles, « allant jusqu’au refus éventuel de concourir pour l’équipe nationale ».